(Dé)connectés

Fidèles à l’esprit contestataire de Groland, les réalisateurs Benoît Delépine et Gustave Kervern développent depuis 2004 un cinéma atypique qui, à la manière des dessinateurs satiriques, utilise la farce et l’humour noir pour dénoncer le contexte social et moral peu reluisant d’aujourd’hui. Ours d’argent au dernier festival de Berlin, leur dernier film pointe les absurdités et les perversions de la surconsommation et de notre dépendance aux services dématérialisés, des réseaux sociaux au télémarketing. Comme toujours, c’est en accompagnant avec tendresse les laissés-pour-compte du système que le tandem construit cette chronique sentie de l’air du temps, mêlant humour et pathétique du quotidien avec un sens aigu de la dérision. Dans un lotissement de province, trois voisins sont chacun dépassés par leurs difficultés personnelles : argent, séparation, solitude, harcèlement, chantage à la sextape, mauvaises appréciations sur Facebook… Nostalgiques de leur combat commun (ils se sont connus lors de la crise des gilets jaunes), ils décident de partir en guerre contre les géants d’Internet. Leur résistance au pouvoir insaisissable du numérique les mènera au bout du monde. Au parfait trio d’interprètes pour camper les personnages principaux maladroits et touchants, se greffent une pléiade de têtes connues dans de petits rôles croustillants illustrant chacun une facette de l’absurde déshumanisation qu’entraîne l’emprise planétaire du virtuel. La dénonciation est féroce… et désopilante.

Effacer l’historique, de Benoit Delépine et Gustave Kervern, avec Blanche Gardin, Corinne Masiero, Denis Podalydès, France, 1 h 46.