LA PRISE EN CHARGE DES CARDIOMYOPATHIES FÉLINES ÉVOLUE - La Semaine Vétérinaire n° 1854 du 15/05/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1854 du 15/05/2020

CONSENSUS ACVIM

PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC

FORMATION

Auteur(s) : TAREK BOUZOURAA

L’American College of Veterinary Internal Medicine (Acvim) s’est penché sur les cardiomyopathies félines et propose un consensus1 sur une nouvelle classification2, le diagnostic, le traitement et le suivi.

Phase préclinique sans congestion (stade B1)

En l’absence de signe de congestion et de dilatation atriale, aucun argument ne justifie l’initiation d’un traitement. Les chats doivent cependant être suivis annuellement afin de détecter tout signe d’évolution. Ces recommandations s’appliquent même à ceux qui présentent des signes échocardiographiques d’obstruction de la chambre de chasse du ventricule gauche.

Phase préclinique avec congestion débutante (stade B2)

Chez ces chats à risque de thromboembolie, une “thromboprophylaxie” est préconisée, bien que le niveau de preuve soutenant cette recommandation soit très limité3. L’emploi de clopidogrel est suggéré en priorité, compte tenu de sa capacité à minimiser le risque de récidive d’un événement thrombotique chez des chats suivis après avoir été rétablis d’une première thromboembolie aortique. La fréquence respiratoire peut également être suivie au domicile par les propriétaires dans une phase “calme” et ne devra idéalement pas dépasser un seuil de 30 mouvements par minute. L’emploi prophylactique de bénazépril, de spironolactone ou de pimobendane n’a pas démontré son intérêt. Enfin, en cas de troubles du rythme (extrasystoles ventriculaires répétées) ou de tachycardie marquée, de l’aténolol peut être proposé aux chats atteints de cardiomyopathie hypertrophique (CMH).

Phase clinique de décompensation (stade C)

En urgence, le clinicien devra associer une oxygénothérapie, du butorphanol afin de tranquilliser l’animal, idéalement une perfusion continue intraveineuse de furosémide, tout en réduisant au maximum les contraintes de contention durant la prise en charge. Si elle est jugée nécessaire, une thoracocentèse sera envisagée afin d’améliorer la fonction respiratoire en levant un éventuel collapsus pulmonaire. L’emploi de pimobendane n’est réservé qu’aux cas réfractaires pour lesquels une CMH obstructive est écartée. En ultime recours, et en l’absence de réponse à cette dernière manoeuvre thérapeutique, de la dobutamine pourrait être proposée dans le cadre d’un suivi intensif (avec cependant un faible niveau de preuve).

Une évaluation rénale (urémie, créatininémie) et électrolytique est indispensable afin de mesurer les effets de la thérapeutique diurétique sur l’équilibre rénal 5 à 7 jours après le début du traitement.

Suivi et accompagnement des chats (stade C)

La base de prise en charge consiste à garantir le maintien d’une diurèse constante à l’aide du furosémide en priorité, tandis que la thromboprophylaxie à l’aide du clopidogrel reste importante, notamment chez les chats continuant de présenter une dilatation atriale malgré les premières phases de soin. Le pimobendane n’est pas indiqué en priorité mais peut tout de même être employé chez les chats ne présentant pas d’obstruction de la chambre de chasse ventriculaire gauche. Ces chats doivent idéalement être suivis tous les 2 à 4 mois afin de ne pas omettre une possible progression de leur cardiopathie et de minimiser les risques de thromboembolie aortique souvent fatale.

Prise en charge des cas réfractaires (stade D)

L’emploi de spironolactone peut aider à lutter contre la congestion via un mécanisme de diurèse “complémentaire” du mode d’action du furosémide prescrit en première ligne. Cependant, une courte série décrit des cas de dermatite ulcérative faciale chez des chats de race maine coon (bien que cet effet indésirable n’ait pas été corroboré de manière générale). Enfin, du fait de son effet antialdostérone et de son activité plus puissante, le torasémide, disponible chez le chien uniquement, peut également être proposé en dernier recours chez le chat réfractaire aux autres soins (hors autorisation de mise sur le marché).

Prise en charge d’une thromboembolie aortique

Lors de thromboembolie aortique, c’est l’analgésie qui est indispensable, quelles que soient l’issue de la prise en charge et la décision des propriétaires de tenter ou non un traitement ciblé. Les opioïdes occupent une place primordiale (idéalement méthadone ou fentanyl). L’administration d’héparine de bas poids moléculaire pour son rôle anticoagulant est recommandée. Par ailleurs, l’emploi de rivaroxaban4 peut-être proposé. L’intérêt d’administrer un thrombolytique spécifique n’a, à l’heure actuelle, pas été assez étudié pour faire l’objet d’une recommandation consensuelle. À nouveau, le clopidogrel est préconisé afin de réduire les risques et le délai de récidive d’après une étude sur un faible nombre de cas.

1. Luis Fuentes V., Abbott J., Chetboul V. et coll. Acvim consensus statement guidelines for the classification, diagnosis, and management of cardiomyopathies in cats. J. Vet. Intern. Med. 2020;1-16.

2. Voir La Semaine Vétérinaire n° 1853 du 8/5/2020, pages 36 et 37.

3. Une étude relative à la prise en charge des thromboembolies aortiques chez le chat en activité générale a été publiée par l’équipe du Royal Veterinary College en 2014 : Borgeat K., Wright J., Garrod O. et coll. Arterial Thromboembolism in 250 cats in General Practice : 2004-2012. J. Vet. Intern. Med. 2014;28 (1):102-108. Cette étude rétrospective qui traite de 250 cas fait état d’un taux d’euthanasie en première intention d’environ 60 %, avec 12 % de cas supplémentaires qui décèdent sous 24 heures et 15 % sous 7 jours (soit un total de 87 % de décès en hospitalisation). Seulement 6 chats (2,4 %) ont survécu à long terme. Cette étude est mentionnée, mais ses résultats ne sont pas détaillés. Il apparaissait important de les développer.

4. Anticoagulant de pharmacopée humaine.

QUIZ

Radiographie de contraste chez un yorkshire (femelle) de 2 ans montrant un abouchement des uretères au niveau du col vésical.

1. Quel est votre diagnostic ?

2. Citez trois symptômes typiques.

3. Quel est le traitement ?

4. Quel est le pronostic ?

Réponses :

1. Uretères ectopiques.

2. Incontinence urinaire, infection urinaire unique ou répétée (pollakiurie, hématurie, strangurie), inflammation de la région locale ou périnéale (dermite urineuse, vulvite, vaginite).

3. Le traitement idéal est chirurgical.

4. Bon, en général. Environ un tiers des chiens auront besoin d’un traitement complémentaire médicamenteux pour une incontinence résiduelle.

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