UNE NOUVELLE CLASSIFICATION DES CARDIOMYOPATHIES FÉLINES - La Semaine Vétérinaire n° 1853 du 08/05/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1853 du 08/05/2020

CONSENSUS ACVIM

PRATIQUE CANINE FÉLINE ET NAC

FORMATION

Auteur(s) : TAREK BOUZOURAA

Un consensus de l’American College of Veterinary Internal Medicine (Acvim) relatif à la classifi cation et à la prise en charge des cardiomyopathies félines est paru1. Les conclusions des experts proposent des moyens adaptés pour le dépistage, le diagnostic, l’accompagnement en phase préclinique et la prise en charge thérapeutique des cardiomyopathies félines, tout comme cela existe chez le chien. Les éléments de prise en charge et du suivi sont présentés dans le consensus, mais ne seront pas développés dans cet article.

Classification

Une cardiomyopathie correspond à une atteinte impliquant primitivement le myocarde et générant secondairement un dysfonctionnement cardiaque culminant vers la congestion et l’insu sance cardiovasculaire. Les cardiomyopathies félines constituent un ensemble hétérogène dont le classement “phénotypique” n’est pas toujours aisé. Elles sont désormais catégorisées de la manière suivante (par ordre de fréquence selon les experts) :

- cardiomyopathie hypertrophique (CMH : représentant 15 à 29 % des cas),

- cardiomyopathie restrictive (CMR),

- cardiomyopathie dilatée (CMD),

- cardiomyopathie arythmogène droite (ARVC),

- cardiomyopathie non-spécifique (non-classifi ée ou inclassable : CMI).

Les définitions échocardiographiques correspondantes sont les suivantes : CMH : épaississement focal ou généralisé du septum interventriculaire sans dilatation de la chambre ventriculaire gauche. CMR : visualisation d’un stigmate ou d’une bride hyperéchogène (fi brotique) endocardique qui “ponte” le septum interventriculaire avec le bord libre de la paroi ventriculaire gauche. Cette bride cause une obstruction fi xe mi-ventriculaire avec un amincissement pariétal du ventricule gauche voire un anévrisme. Il est à noter qu’une dilatation atriale gauche ou biatriale marquée est très fréquente. CMD : dysfonction systolique, dilatation ventriculaire, possible réduction de l’épaisseur de la paroi ventriculaire gauche et dilatation atriale.

ARVC : dilatation atriale et ventriculaire droite, dysfonction systolique ventriculaire droite avec amincissement pariétal du ventricule droit. Arythmie et insu sance cardiaque droite.

CMI : toute cardiopathie ne correspondant aux descriptions préalables.

Les auteurs précisent que cette classifi cation reste imparfaite, car tous les cas ne réuniront pas la totalité des caractéristiques précises d’une catégorie. Par ailleurs, il est primordial de savoir qu’un chat peut présenter une progression d’une cardiopathie appartenant initialement à une catégorie puis évoluant dans le temps vers une autre forme. C’est notamment le cas chez les chats atteints de cardiomyopathie inclassable chez lesquels il est fortement suspecté qu’une autre forme ait préexisté. Ces chats auraient probablement un diagnostic tardif d’une cardiomyopathie en phase terminale.

D’autre part, les maladies générales ou éléments extérieurs peuvent causer une dysfonction myocardique et entraîner une cardiomyopathie acquise. Cela se produit notamment lors d’hypertension artérielle, d’hyper thyroïdie, à la suite de traitements (corticothérapie, fl uidothérapie, anesthésie), plus rarement lors d’infi ltrations néoplasiques du myocarde, d’amyloïdose et d’acromégalie. L’évaluation des cas de cardiopathie acquise n’est pas aisée et ces situations pathologiques compliquent la désignation d’une cardiomyopathie, ainsi que l’assignation fi able à l’une des catégories évoquées. Ces éléments expliquent pourquoi cette évaluation nécessite une habitude et la consultation auprès d’un spécialiste en cardiologie, estiment les experts.

Signes cliniques

Une fréquence non négligeable de chats atteints de cardiomyopathie occulte demeurent en bon état général et d’apparence normale. Ils ne présentent pour seul signe clinique qu’un sou e cardiaque systolique isolé. Ce constat vaut pour presque 80 % des chats atteints de CMH infraclinique (contre environ 40 % des chats sains). Rarement, des chats atteints de CMH “occulte” présenteront des dysrythmies ou un bruit de galop (jusqu’à 20 % des cas). Chez ces chats atteints de maladie infraclinique, les complications à 5 ans sont peu fréquentes, même si jusqu’à 23 % des cas peuvent mourir durant cette période succédant le diagnostic. L’évolution pathologique est inévitable, avec l’apparition d’une insuffisance cardiaque congestive et/ou d’une thromboembolie aortique fatale.

Stades cliniques

Les experts proposent d’employer un système de classifi cation du degré de gravité clinique proche de celui proposé chez le chien, lui-même adapté et inspiré de l’American Heart Association (AHA) et de l’Acvim :

- stade A : races “prédisposées” aux cardiomyopathies (du moins surreprésentées),

- stade B1 : faible risque d’insu sance cardiaque et de thromboembolie,

- stade B2 : risque non-négligeable,

- stade C : préexistence d’un oedème pulmonaire ou d’une thromboembolie stabilisés médicalement,

- stade D : nécessité de soins lourds (injectables) et continus. Les indices échocardiographiques de gravité incluent la dilatation atriale, qui permet d’ailleurs de différencier les stades B1 (sans) et B2 (avec dilatation). Lors de CMH, les indicateurs à l’échocardiographie de dysfonction diastolique ventriculaire et atriale gauche, ainsi que l’importance de l’épaississement du septum interventriculaire (parmi d’autres) conditionnent également l’importance de l’atteinte et donc le pronostic.

1. Luis Fuentes V., Abbott J., Chetboul V. et coll. Acvim consensus statement guidelines for the classifi cation, diagnosis, and management of cardiomyopathies in cats. J. Vet. Intern. Med. 2020;1-16.

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