FACE À LA CRISE, LE GOUVERNEMENT EST-IL À LA HAUTEUR ? - La Semaine Vétérinaire n° 1851 du 24/04/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1851 du 24/04/2020

EXPRESSION

LA QUESTION EN DÉBAT

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO-MORADEL

Pénuries de masques, de lits, de respirateurs, la gestion de la crise sanitaire actuelle par le gouvernement est au cœur des débats. Certaines de ses décisions ont suscité l’incompréhension, d’autres ont parfois révélé un manque d’anticipation. La stratégie de l’exécutif est-elle à la hauteur des enjeux ?

LE GOUVERNEMENT ÉTAIT CLAIREMENT DANS L’IMPROVISATION

FRÉDÉRIC GENTY (T 91)

Vétérinaire rural à Pontrieux (Côtes-d’Armor)

Dès le début de cette crise sanitaire, le gouvernement a manqué d’anticipation. La pénurie de masques, de matériels de protection, de respirateurs ou encore de lits de réanimation illustre le fait qu’il n’a pas suffisamment pris en compte la gravité de la situation. Comparé à d’autres pays européens, il était clairement dans l’improvisation. Il y a eu beaucoup de mesures et de contre-mesures. La situation révèle que la France a un retard énorme sur la gestion du sanitaire en médecine humaine. Je déplore la fermeture récente d’une usine de fabrication de masques implantée dans ma région. Rien n’a été fait pour maintenir son activité. Les gouvernements successifs ont eu une politique à court terme qui n’a pas pris en compte la mondialisation et les mouvements des personnes et des marchandises. Mais malgré la cacophonie ambiante, le confinement montre son efficacité, car le nombre d’hospitalisations est en baisse.

LE GOUVERNEMENT N’EST PAS ALLÉ ASSEZ VITE

STÉPHANIE BOUSQUET-MARINKOV (L 91)

Vétérinaire canin à Charbonnières-Les-Bains (Rhône)

Pour certaines mesures comme le port du masque ou le report des élections, le gouvernement n’est pas allé assez vite. Le masque aurait dû être généralisé depuis longtemps. Avec, on laisse plus de chance à une immunité de se faire. Certains discours officiels sur la difficulté de porter un masque étaient franchement ridicules. De même, si l’on veut sortir du confinement, tout le monde devrait être testé. Par ailleurs, cette crise sanitaire est l’occasion pour la profession d’être reconnue comme un acteur de la santé publique. Le fait que des laboratoires d’analyses vétérinaires aient appelés à développer les tests, que du matériel à usage vétérinaire ait été requis, ainsi que la mobilisation de nombreux confrères en tant que volontaires médicaux démontrent notre engagement fiable et reconnu dans une telle crise. Du côté de nos organisations professionnelles, la gestion de la crise est remarquable. Je les remercie sincèrement pour leur engagement.

UNE ERREUR EST EXCUSABLE SI ELLE EST RECONNUE

PHILIPPE LOULIER (L 86)

Vétérinaire canin à Feyzin (Rhône)

Les autorités sanitaires négligeaient l’intérêt de la « protection naso-buccale ». Le demi-mensonge du gouvernement était motivé par la pénurie de masques. Une erreur est excusable lorsqu’elle est reconnue, un mensonge pour la couvrir est inacceptable. Le président de la République dit que « tester tout le monde n’aurait aucun sens ». Cela me laisse sans voix. Détection-isolement est le principe de base pour enrayer une épidémie, largement expérimenté par les vétérinaires. Les handicaps étant (re) connus sur la ligne de départ, les solutions drastiques devaient être envisagées : dès le début de l’épidémie, concentrer tous les moyens disponibles sur les secteurs stratégiques (santé, alimentation, énergie et transport) et leurs sous-traitances indispensables. Ensuite, définir un cahier des charges précis, responsabiliser chaque branche pour trouver les solutions adaptées. Ce qu’a fait notre profession avec l’accompagnement efficace de l’Ordre et du Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral pour harmoniser le process.

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