LES NOUVELLES MESURES SONT-ELLES À LA HAUTEUR ? - La Semaine Vétérinaire n° 1840 du 07/02/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1840 du 07/02/2020

BIEN-ÊTRE ANIMAL

ANALYSE

Trois mois après ses promesses d’annonces « fortes » sur le bien-être animal, didier guillaume a enfin dévoilé 15 mesures « pour renforcer la lutte contre la maltraitance animale et améliorer le bien-être des animaux domestiques ».

L’Ambition et la rationalité » sont les deux principes qui guident les annonces en faveur de la protection et de l’amélioration du bien-être des animaux (BEA) faites par le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, didier guillaume, le 28 janvier1. Selon lui, « les animaux domestiques sont des êtres sensibles qui ont droit à du respect et à de la bientraitance. Mais l’amélioration du BEA doit tenir compte de la réalité économique des filières ». C’est pourquoi, les mesures annoncées sont prévues avec « la volonté de concilier au mieux sensibilité des animaux, regard de la société et, pour les animaux d’élevage, travail des agriculteurs ». Ainsi, outre la fin de la castration à vif des porcelets (protocole d’anesthésie élaboré par un vétérinaire obligatoire) et du broyage des poussins mâles d’ici 2021, un décret sera prochainement présenté au Conseil d’État pour pouvoir interdire toute pratique douloureuse en élevage et imposer un référent BEA dans chaque élevage. Les conditions de transport seront également renforcées avec l’objectif d’assurer 5 % de contrôles au chargement des animaux pour les transports de longue durée, par des vétérinaires privés habilités. Enfin, pour les animaux de compagnie, « il faut responsabiliser les propriétaires, les achats impulsifs, ne sont plus acceptable », selon le ministre. C’est pourquoi Loïc Dombreval, vétérinaire et député, a été chargé, fin décembre, d’une mission parlementaire pour définir les mesures nécessaires pour lutter contre l’abandon des animaux de compagnie.

« Très éloignées des promesses et insuffisantes »

Toutefois, pour les associations de protection animale comme Welfarm, « l’ampleur des mesures annoncées est très éloignée des promesses faites par le ministre de l’Agriculture ces derniers mois (…). Elles sont insuffisantes, voire décevantes puisque déjà connues, faiblement protectrices ou associées à un échéancier trop lointain ». De même, du côté des éleveurs, la Coordination rurale, deuxième syndicat agricole, a souligné « le manque d’un programme opérationnel clair et viable pour les agriculteurs ». Ainsi, concernant l’interdiction de la castration à vif des porcelets, « une mesure forte aurait été de l’interdire étant donné que des alternatives existent et sont déjà mises en œuvre par certains groupes de producteurs », a constaté Frédéric Freund, directeur de l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (OABA). De même, pour la fin du broyage des poussins mâles, quelle solution alternative efficace sera proposée aux professionnels ? Selon le ministre, « il faut que la recherche s’active et priorise ses travaux ». D’ailleurs, la France a déjà octroyé 4 millions d’euros depuis 2016 pour déployer une méthode de sexage in ovo et un appel à projet de 300 000 € sera lancé en 2020 pour tester de nouvelles possibilités.

Vers un étiquetage européen commun ?

En ce qui concerne le BEA à l’abattage, malgré les recommandations sur l’abattage rituel2, aucune mesure n’est annoncée. Bruno Ferreira, directeur général de l’alimentation, a seulement indiqué qu’à ce jour « six ou sept abattoirs sont volontaires pour rejoindre l’expérimentation de la vidéosurveillance ». Enfin, pour permettre aux consommateurs de devenir des « consommacteurs », le ministre souhaite adopter, « à l’échelle européenne, l’étiquetage des modes d’élevage sur l’ensemble des produits ». Cependant, comme il l’a indiqué, « ce n’est pas toujours simple de prendre des décisions communes, mais nous espérons que cet étiquetage spécifique sera possible d’ici à 2021 ». Rien n’est donc vraiment acté pour le moment même si le ministre se veut positif. « Nous sommes sur une ligne de crête, mais j’ai confiance dans nos filières, dans la recherche et dans les concitoyens pour que ce dossier avance », conclut-il. Reste donc à voir ce que nous réservent les prochains mois car, à la veille des élections municipales, comme l’a indiqué Loïc Dombreval, « le respect du BEA des animaux de compagnie et la gestion des populations sont des enjeux forts pour les villes. En effet, plus d’un foyer sur deux possède un chat en France, ce qui représente 14 millions de chats en France ».

1. www.bit.ly/2s3zm5i.

2. www.bit.ly/2gcusqy, www.bit.ly/2u8fwxd.

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