Syndrome brachycéphale : une nouvelle méthode d’exploration - La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019

INNOVATION

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : TANIT HALFON  

Une équipe de l’université de Cambridge propose d’associer un test à l’effort à l’examen clinique pour évaluer les chiens brachycéphales. Une nouvelle méthode, accessible aux vétérinaires généralistes, pour mieux lutter contre les hypertypes.

Àl’université de Cambridge, un groupe de scientifiques, dont des vétérinaires, mènent depuis 2005 des recherches1 sur le syndrome brachycéphale. Dans ce cadre, ils ont validé une méthode2 qui améliore la sensibilité de l’examen clinique d’un chien brachycéphale de races carlin, bouledogues anglais et français. Le principe : y associer un test à l’effort de 3 minutes de marche rapide (trot), ainsi qu’une auscultation laryngée. Dans l’étude, le test à l’effort a permis d’obtenir une sensibilité d’environ 93 %, en comparaison avec les résultats d’un test de pléthysmographie barométrique3 (WBBP pour whole-body barometric plethysmography), contre seulement 56 % si l’examen clinique seul était effectué, permettant ainsi de mieux grader les chiens. Une auscultation laryngée effectuée après le test à l’effort est apparue, de plus, utile pour affiner le diagnostic. Un stridor audible était fortement spécifique d’un collapsus laryngé, en particulier pour les stades avancés, mais son absence ne permettait pas de conclure. À la clé : « un test rapide, simple et universel pour le diagnostic du syndrome brachycéphale. »

Malgré ces bons résultats, l’idée d’une méthode standardisée se heurte à des biais notamment environnementaux, comme l’indiquent les auteurs de l’étude et le confirme Cyrill Poncet. « Le taux d’humidité, la température ambiante et le stress de l’animal en consultation sont des biais majeurs lorsque l’on évalue la tolérance à l’effort d’un chien brachycéphale. Ce test ne peut donc constituer qu’un élément diagnostic supplémentaire aidant ou orientant au bon diagnostic de la maladie. » Pour lui, le test à l’effort devrait être réalisé dans des conditions standardisées, avec une fourchette de température ambiante et de degré d’humidité, mais aussi hors cadre clinique qui peut rajouter du stress pour certains animaux.

Combiner anamèse et expertise

En clinique, il rappelle ainsi l’importance de combiner anamnèse et expertise du praticien. « Je discute d’abord avec le propriétaire de l’animal pour avoir une idée de la fréquence et de l’intensité des signes respiratoires. L’examen clinique vient dans un second temps, durant lequel je caractérise le type de l’animal, mais à ce jour, cette étape est assez subjective, car nous ne disposons pas de données scientifiques suffisamment étayées relatives aux mesures morphologiques d’un animal. J’inclus enfin le test du doigt, qui consiste à créer une pression positive au niveau du pharynx de l’animal. Un chien brachycéphale se met en apnée directement, explique-t-il. Tout cela me permet d’obtenir le degré de gène d’un animal et de décider s’il convient d’explorer et d’intervenir chirurgicalement. »

Une sélection raisonnée des reproducteurs

Malgré les limites de l’étude, sa publication a débouché, au début de l’année 2019, sur un partenariat avec le Kennel Club4. Objectif : conseiller les éleveurs et permettre une sélection raisonnée des animaux mis à la reproduction. Pour ce faire, un réseau d’assesseurs régionaux, tous des vétérinaires formés à la méthode de Cambridge, et couvrant l’ensemble du Royaume-Uni, a été constitué. Le test est recommandé à partir de 12 mois d’âge, suivi d’un contrôle tous les 2 ans, au moins jusqu’à l’arrêt de leur mise à la reproduction. Cette initiative permettra également de récolter des données potentiellement utiles pour la recherche. Cette application sur le terrain repose sur un grading fondé sur le niveau d’atteinte de la fonction respiratoire (bruits respiratoires, effort à l’inspiration et présence de dyspnée, de cyanose, de syncope) avant et après le test à l’effort. Les auteurs de l’étude définissent ainsi quatre grades : les grades 0 et 1 correspondent à des chiens cliniquement sains. Dans ce cas, l’équipe de Cambridge conseille de les suivre tous les 6 à 12 mois. De plus, il n’y a pas de contre-indication à la mise à la reproduction. Pour ceux des grades 2 et 3, une exploration plus poussée est recommandée : examen des voies respiratoires sous anesthésie suivi d’une intervention médicale et/ou chirurgicale. De plus, les chiens de grade 3 doivent être obligatoirement exclus de la mise à la reproduction. « Ce grading paraît plutôt approprié pour le test à l’effort de 3 minutes de trot, car il y a une assez bonne corrélation en matière de sensibilité clinique », souligne notre confrère Cyrill Poncet.

1 https://vet.cam.ac.uk/boas.

2 bit.ly/352I8dE.

3 Test de la fonction pulmonaire qui consiste à mettre l’animal dans une boîte étanche. Il permet d’identifier le degré de sévérité de la maladie.

4 Équivalent de la Société centrale canine.

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