Médicaments vétérinaires : la f in des importations de la discorde - La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019

AFFAIRE JUDICIAIRE

ACTU

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO-MORADEL  

La Cour de cassation sonne le glas des importations illégales de médicaments vétérinaires à la frontière espagnole. Elle décide de relaxer les éleveurs mis en cause.

Le feuilleton des importations illégales de médicaments vétérinaires à la frontière espagnole prend fin (enfin ?). La Cour de cassation a rendu, début novembre, deux arrêts tranchants qui relaxent les éleveurs mis en cause pour avoir acheté à la frontière espagnole des médicaments vétérinaires moins chers. « Les éleveurs n’étaient pas tenus, en présence d’une réglementation non conforme aux articles 34 et 36 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de solliciter une autorisation administrative préalable pour l’importation des médicaments vétérinaires considérés, a estimé le juge du droit. D’autre part,(…) les obligations en matière de notice, d’étiquetage et de pharmacovigilance étaient inopposables aux éleveurs qui étaient exclus, en méconnaissance du droit de l’Union, de la procédure d’importation parallèle de médicaments vétérinaires. »

Une carence de l’État français

Après plusieurs années de procédure, les faits, qui se sont déroulés entre 2006 et 2009, ont été soumis au jugement de la Cour de cassation en 2017. À cette époque, la réglementation française supposait qu’une autorisation d’importation soit délivrée par l’Agence nationale du médicament vétérinaire (Anses-ANMV). Or, cette procédure n’était pas accessible aux éleveurs. La cour rappelle d’ailleurs, dans l’un de ses arrêts rendu le 5 novembre, que les juges en appel ont noté que l’État français n’a pas mis en place la procédure simplifiée permettant aux éleveurs de procéder à de telles importations. Selon ces derniers, il ne peut donc être reproché aux prévenus de ne pas avoir demandé et obtenu une autorisation d’importation parallèle qui ne pouvait que leur être refusée. En appel, cette carence de l’État français au regard du droit européen aura suffi aux juges pour prononcer la relaxe des éleveurs. De même, n’a pas été relevé par les juges le fait que les éleveurs se soient vu délivrer des ordonnances établies sans la moindre vérification ni la moindre connaissance des animaux concernés, en se soustrayant aux obligations relatives à la délivrance de prescriptions médicales sérieuses, à l’étiquetage, aux notices et à la pharmacovigilance. Pour la Cour de cassation, ses obligations sont inopposables aux éleveurs, car la procédure d’importation parallèle de médicaments vétérinaires ne leur était pas accessible.

Possible sous conditions

Le juge du droit retient qu’il revient au législateur français de mettre en place une procédure adaptée qui permette aux éleveurs d’importer légalement des médicaments vétérinaires pour les besoins de leurs élevages. Un décret a été publié en juin 2018 pour modifier le droit français en ce sens. La demande d’importation est possible, mais sous conditions. Les éleveurs doivent se rapprocher de l’ANMV afin de déposer un dossier spécifique. Ainsi, à chaque demande d’importation, l’éleveur a l’obligation de prendre contact avec le vétérinaire chargé du suivi sanitaire régulier de son élevage. Sa demande d’importation se limite à la quantité des spécialités à importer pour les animaux identifiés sur l’ordonnance. Aussi, la durée de validité de l’autorisation sera alignée sur celle de la prescription vétérinaire. La procédure d’importation cible uniquement les médicaments vétérinaires fabriqués par une entreprise d’un État membre ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) ayant obtenu des autorisations de mise sur le marché (AMM) en France pour les mêmes animaux de destination. De même le réétiquetage et les obligations de pharmacovigilance incombent à l’éleveur.

Voir aussi La Semaine Vétérinaire n° 1755 du 16/3/2018, pages 10 et 11, et n° 1768 du 14/06/2018, pages 10 et 11.

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