Le modèle économique des cliniques passé au crible - La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019

ANALYSE

ACTU

Auteur(s) : FRANÇOISE SIGOT 

Une étude menée par l’ENVT a permis de dégager quelques grands enseignements sur l’organisation et l’activité économique des cliniques. Les charges de personnel et les ventes de médicaments sont deux postes méritant une attention toute particulière pour maintenir la rentabilité.

Face à l’évolution du contexte d’exercice de l’activité vétérinaire en productions animales, l’École nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT) cherche, dans le cadre du plan ÉcoAntibio et en partenariat avec la Société nationale des groupements techniques vétérinaires, à faire la lumière sur le modèle économique des cliniques. Elle vient de franchir une première étape en analysant les comptes de 11 cliniques mixtes1. Pour réaliser cette étude, deux scénarios extrêmes ont été choisis. Le premier vise à répartir l’ensemble des charges de la clinique proportionnellement au chiffre d’affaires de tous les actes et à la marge commerciale sur la vente de médicaments. Le second part du principe que la vente de médicaments pendant une consultation ne nécessite pas de ressources humaines supplémentaires et donc ne justifie pas l’imputation de charges de personnel sur la marge commerciale réalisée avec la vente de médicaments. Partant de ces deux postulats, l’objectif était de voir comment se forme la marge nette des structures vétérinaires. « Dans le premier scénario, le taux de marge nette 2 est quasiment identique sur la vente de médicaments et sur les actes. Dans le second, nous constatons beaucoup plus de variabilité entre les différents actes », résume Didier Raboisson, enseignant-chercheur en économie de la santé animale à l’ENVT, et auteur de cette étude. Un autre enseignement tient à la grande variabilité des taux de marge entre les différentes structures étudiées. Cela signifie que beaucoup de structures disposent de marges de progrès importantes. C’est aussi pourquoi une autre étude portant sur un nombre plus important de cliniques va être lancée rapidement, avec l’espoir de dresser une sorte de profil type de la clinique qui dégage de la rentabilité.

Dépendance au médicament et marché du conseil

Sans attendre les résultats plus fins, l’étude qui vient d’être publiée permet d’ores et déjà de tirer quelques conclusions. « Il est essentiel de s’intéresser à la ventilation des charges de personnel. Cela signifie que, dans certaines cliniques, il faudra revoir l’orga nisation du travail, par exemple en limitant les chirurgies à quatre mains ou le concours d’une ASV sur certains actes », explique Didier Raboisson. L’autre conclusion de l’étude vient confirmer l’importance de la vente de médicaments pour garantir la rentabilité des cliniques. Pour l’activité rurale, suivant les scénarios, entre 67 et 80 % des profits proviennent de la délivrance des médicaments. Au contraire de l’activité canine pour laquelle ce pourcentage ne varie qu’entre 35 % à 44 %. « La forte dépendance à la délivrance du médicament vétérinaire est problématique, car la plupart des structures perdraient une grande partie de leurs revenus et surtout de leur marge en cas d’un éventuel découplage entre prescription et délivrance. Cela vaut surtout en rurale où le médicament est très rentable, mais aussi dans les autres secteurs », analyse Didier Raboisson. Là encore, une prochaine étude viendra affiner le poids de la vente de médicaments dans le chiffre d’affaires et dans la marge des différents types de cliniques. Au-delà de l’analyse financière, il s’agira également de parvenir à isoler quelques pistes de développement nouvelles pour pallier les pertes liées à un potentiel découplage. Évoluer vers du conseil est une solution qui sera notamment abordée lors des travaux complémentaires, afin de vérifier si un marché existe pour de telles prestations et, dans l’affirmative, comment il peut être exploité.

1 Les données collectées proviennent de structures vétérinaires de différents secteurs d’activité : animaux d’élevage, équidés, animaux de compagnie, etc.

2 Le taux de marge nette correspond au rapport entre la marge nette (ou profit) et le chiffre d’affaires. Il représente ce que rapporte 1 € facturé.

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