La qualification mentionnée sur l’acte de vente, à savoir “compagnie”, est retenue - La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019

JURISPRUDENCE

ÉCO GESTION

Auteur(s) : CÉLINE PECCAVY  

Un jugement montre notamment que la volonté de faire reproduire un animal ne suffit pas pour écarter les dispositions du Code de la consommation.

Éleveuse, Mme V a cédé à Mme A, le 13 octobre 2017, un chiot femelle de race yorkshire pour la somme de 1 300 €. Lors de la délivrance de l’animal, et conformément à la loi, un certificat vétérinaire est remis à l’acheteuse. Celui-ci dispose que, le 10 octobre 2017, l’animal est en parfait état de santé.

En juin 2018 toutefois, un diagnostic de luxation congénitale des deux rotules va être établi.

Les parties ne parvenant pas à s’entendre, Mme A va saisir la juridiction de Bergerac (Dordogne) en mars 2019 et solliciter, dans un premier temps, 2 916,95 € au titre de la réparation de son préjudice financier lié à l’intervention sur la rotule gauche, outre frais divers, et 1 500 € au titre du préjudice moral.

En mai 2019, soit quelques jours seulement avant l’audience de plaidoirie, Mme A fera valoir qu’une chirurgie de la rotule droite est à prévoir. Un devis est communiqué pour un montant de 1 395,23 €.

Le débat sur le Code de la consommation

Classiquement, Mme A fait valoir pour ces affections qualifiées de congénitales le Code de la consommation et le défaut de conformité.

Mais tout en se fondant sur ces textes, Mme A a mis grandement en avant dans le procès le fait qu’elle destinait la chienne à la reproduction.

Rappelons donc que l’article liminaire du Code de la consommation, depuis la loi du 21 février 2017, dispose que : « Pour l’application du présent code, on entend par consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole. »

Celui qui achète et qui veut pouvoir bénéficier du statut de consommateur doit être désintéressé de tout aspect financier. Ce n’est pas le cas de celui qui achète un animal en vue d’en tirer un profit certain.

Mme V a donc argumenté sur ce point et sollicité l’irrecevabilité de toutes les demandes au titre du Code de la consommation.

La position du tribunal fut la suivante : « M me A, dont la qualité de consommateur est contestée, a, certes, affiché sa volonté d’acheter cet animal en vue de sa reproduction et de sa présentation à des concours de beauté. Cependant, cette seule affirmation ne saurait conférer à M me A la qualité d’éleveuse professionnelle, d’autant que le contrat de vente stipule expressément que l’animal est vendu exclusivement en tant qu’ani mal de compagnie. »

La volonté de faire reproduire ne suffit donc pas pour cette juridiction pour écarter les dispositions du Code de la consommation. En revanche, encore une fois, la décision vient contredire celle rendue de manière isolée par la Cour de cassation le 20 septembre 2017.

Ici, le tribunal retient la qualification mentionnée sur l’acte de vente, à savoir “compagnie”, et ne tient pas la position de dire qu’un chien de compagnie est obligatoirement un chien qui doit pouvoir reproduire. Intéressant donc à cet égard. Intéressant également quant à la demande fondée sur les frais annexes à l’opération de la première rotule.

Le Code de la consommation raisonne en effet en termes de réparation. Le vendeur doit à l’acheteur la réparation de l’animal. Celle-ci comprend-elle les frais de déplacement pour aller à la clinique choisie, les frais de repas et d’hôtel ?

Le tribunal a ici jugé que non : « Les autres dépenses invoquées par M me A qui, soit ne sont pas justifiées (frais d’ostéopathie), soit sont des dépenses non directement liées à la pathologie de l’animal (frais de stérilisation, frais de transport, d’hébergement et de repas), ne sauraient constituer un préjudice réparable et il conviendra de l’en débouter. »

Contestable, en revanche, apparaît la condamnation prononcée de la vendeuse sur devis simple à l’opération de la seconde rotule. La jurisprudence considère en effet, de manière constante, qu’un simple devis constitue un préjudice incertain et donc non indemnisable. Rien ne permet en effet d’avoir la certitude non seulement de cette intervention chirurgicale, mais aussi de son coût.

Une décision mitigée donc, mais qui a le mérite de préciser les contours de la réparation.

Source : jugement rendu par le tribunal d’instance de Bergerac, le 23 juillet 2019.

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