Organisme génétiquement manipulateur - La Semaine Vétérinaire n° 1829 du 08/11/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1829 du 08/11/2019

FILM

DITES-NOUS TOUT

Auteur(s) : MICHEL BERTROU  

Cette fable dystopique au surréalisme ténu imagine une fleur dont le pollen transformerait les esprits à l’instar du toxoplasme qui en infectant le cerveau du rat altère la crainte qu’il a du chat et augmente ainsi les chances de boucler son cycle de vie. Une brillante phytogénéticienne, mère célibataire, qui travaille pour une société spécialisée dans le développement d’espèces végétales génétiquement modifiées, a créé une plante qui, quand on en prend suffisamment soin (en l’arrosant, en la maintenant au chaud, en lui parlant), fleurit et dégage dans son parfum de l’ocytocine (hormone de l’attachement), procurant ainsi du bien-être. Plusieurs incidents avec ses collègues du laboratoire et le comportement étrange de son fils (à qui elle a offert un spécimen) incitent peu à peu la chercheuse à soupçonner que la plante, conçue stérile, a muté pour modifier le comportement de ceux qui l’inhalent et les assujettir à garantir sa survie. Plus le cercle des gens contaminés s’élargit, plus la normalité change de camp. Nous commençons nous-mêmes à douter de la chercheuse, marginalisée. Satire corrosive des audaces de la science contemporaine, avec un substrat psychanalytique souterrain, ce film réalisé au scalpel et visuellement raffiné, interroge subtilement l’ambiguïté de nos perceptions et la difficulté d’être différent dans un monde qui donne raison à la majorité. Son atmosphère de paranoïa feutrée entête et nous poursuit longtemps comme si nous succombions nous-mêmes à la fleur virulente.

Little Joe de Jessica Hausner, avec Emily Beecham, Ben Whishaw, Royaume-Uni-Autriche-Allemagne, 1 h 45, sortie le 13 novembre.

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