De l’administration et de la responsabilité du vétérinaire - La Semaine Vétérinaire n° 1821 du 27/09/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1821 du 27/09/2019

JUSTICE ORDINALE

ACTU

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO-MORADEL 

L’administration des médicaments par le détenteur des animaux doit être faite sous la responsabilité personnelle du vétérinaire, rappelle la Chambre nationale de discipline, dans une décision rendue en avril 2019.

Le docteur vétérinaire A a méconnu ses obligations relatives au bon usage des médicaments », déclare la Chambre nationale de discipline dans une décision rendue le 18 avril dernier. L’affaire concerne le praticien A, accusé d’avoir enfreint les dispositions du Code rural et de la pêche maritime et du Code de la santé en rédigeant des ordonnances non conformes et par une mauvaise pratique d’utilisation des médicaments. En première instance, la chambre régionale de discipline l’a suspendu temporairement du droit d’exercer la profession pour une durée de six mois sur tout le territoire national, assortie du sursis pour une durée de quatre mois. En appel, la Chambre nationale de discipline confirme cette sanction. Tout part d’un contrôle mené en 2013 dans un élevage de lapins suivi par le Dr A.

Une prescription très supérieure

Lors de leur visite, les inspecteurs ont trouvé 19 ordonnances rédigées par ce praticien « prescrivant invariablement 3 t d’aliments médicamenteux contenant des antibiotiques, quel que soit le nombre d’animaux des lots concernés. Deux de ces ordonnances ont été signées à un jour d’intervalle pour le même lot d’animaux avec une prescription identique ». Pour les services de contrôle, les quantités prescrites étaient beaucoup trop importantespour le nombre d’animaux des divers lots. Par ailleurs, lors de cette même visite, les inspecteurs ont constaté l’existence d’une ordonnance prescrivant du Draxxin® dont l’utilisation était laissée à l’éleveur. Sur la rédaction de ces ordonnances, la Chambre nationale de discipline observe que « la prescription d’une quantité d’aliments médicamenteux très supérieure aux besoins des bandes visées par les ordonnances conduit à des surdosages, la concentration de médicament dépassant ainsi ce qui est préconisé au résumé des caractéristiques du produit concerné (le RCP) ». Pour la juridiction disciplinaire d’appel n’est pas recevable l’explication du Dr A selon laquelle le fournisseur de l’élevage refuserait de livrer une quantité d’aliments médicamenteux inférieure à 3 t.

La chambre retient ainsi que le vétérinaire accusé a « aliéné sa liberté de prescription ». La juridiction ordinale ajoute que le Dr A a méconnu les exigences de forme des ordonnances imposées par l’article R.5141-111 du Code de la santé publique, notamment quant à l’identification des animaux destinataires des spécialités prescrites.

Une source d’erreur pour l’éleveur

Face à la chambre, la ligne de défense du praticien ne fera pas mouche. En effet, elle retient que la rédaction de certaines ordonnances pouvait être une source d’erreur pour l’éleveur. Elle rappelle, concernant Draxxin®, « qu’un tel médicament dépourvu d’autorisation de mise sur le marché peut être administré par le détenteur des animaux ». Elle souligne que cela doit être fait sous la responsabilité personnelle du vétérinaire. « En ce cas, celui-ci ne peut s’exonérer de ses obligations en invoquant la faculté laissée à l’éleveur de pratiquer certains actes infirmiers. » La Chambre nationale de discipline retient également que le Dr A aurait dû s’assurer préalablement que l’éleveur était en mesure de respecter sa prescription et des conditions satisfaisantes d’administration. Selon elle, le praticien a méconnu ses obligations relatives au bon usage des médicaments.

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