Comment fixer le bon prix de vente des actes et des produits ? - La Semaine Vétérinaire n° 1818 du 06/09/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1818 du 06/09/2019

FINANCES

ÉCO GESTION

Auteur(s) : CHRISTELLE FOURNEL 

Qu’est ce qu’un “bon prix de vente” ? Il existe plusieurs méthodes et le juste prix est un compromis entre les différentes approches envisagées. Il est indissociable de la notion de valeur créée, à la fois pour le client et l’entreprise.

Les chefs d’entreprise vétérinaire appliquent souvent la règle simple du prix recommandé sur l’étiquetage des produits et des prix communément admis dans la région concernant leurs actes. Toutefois, repenser notre gamme de prix constitue un vrai levier d’attractivité de la clientèle et de croissance interne pour la structure.

L’avis du gestionnaire

Pour fixer un prix, le gestionnaire considère le taux de marge ou coût de revient du produit ou du service. L’objectif est de dégager des bénéfices pour les actionnaires en complément de leur rémunération par le travail s’ils réalisent la prestation de service ou la vente de produit. Il suffit donc de connaître la rémunération par le capital souhaitée par les actionnaires et le coût de revient. Concernant un service, il conviendra de s’intéresser aux coûts directs et indirects, fixes et variables, de production et de distribution par unité vendue. Par exemple, pour une consultation à 40 € TTC (33 € HT) de 30 min réalisée par un vétérinaire salarié (forfait heure échelon IV), la société dépense 15 € (vétérinaire), 7 € (auxiliaire vétérinaire présent dans une clinique sans ancienneté), 7 € de location du local (si 3 000 € HT/mois) et environ 3 € de frais fixes de structure et de consommables. Le coût de revient est donc de 32 € et la marge, dans ce cas, de 1 €. Cet exemple montre combien il est fondamental de donner de la visibilité sur les marges de l’entreprise aux salariés, les alerter sur le fait que toute remise faite au client érode la marge globale de l’entreprise et que la vente à perte n’est pas si loin que cela.

Ainsi, fixer le prix d’un produit ou d’un service par son coût garantit la création de valeur pour les associés. Toutefois, la stratégie par les coûts n’est pas de la stratégie… En revanche, celle par les prix est possible. Un associé peut faire ce choix d’une marge faible de la consultation de base à dessein ; il s’agit alors d’un “service d’appel” : le client vient à la clinique pour une consultation, qui permet la vente d’actes ou de produits additionnels, à forte marge. Il peut aussi réduire le prix de l’alimentation de manière à concurrencer les ventes sur Internet; cela lui permettra d’augmenter le nombre de contact client. Là encore, il s’agira de susciter l’achat d’actes ou de produits complémentaires.

L’avis du stratège

Un responsable marketing stratégique proposerait d’étudier le marché et les concurrents. La question de sa capacité à se différencier de la concurrence doit être posée. En quoi mon offre est-elle assez attractive et originale ? En quoi répond-elle assez au besoin de mes clients pour justifier d’un prix “hors marché” ?

Il fixerait ensuite un prix proche du prix magique de “29,99 €”, qui représente 29 € pour le client mais 30 € pour l’entreprise, voire un prix psychologique qui maximise la demande des consommateurs.

De notre point de vue, cette approche s’applique mal à l’activité vétérinaire. En effet, des paramètres comme la relation entre le vétérinaire, le propriétaire et son animal ou la proximité du domicile constituent des critères de choix majeurs de la structure et des actes ou produits achetés. Ainsi, depuis une dizaine d’années, les structures low cost tentent de percer sans grand succès et la guerre des prix peut être lancée face à des animaleries ou d’ambitieuses pharmacies, mais ne fait guerre de sens, en France, dans l’activité de soins.

L’avis du chercheur

Enfin, un chercheur en marketing, quant à lui, s’interrogerait sur la valeur perçue pour le consommateur, c’est-à-dire sur la différence entre la qualité perçue du produit ou du service, notamment liée à l’expérience vécue, et le sacrifice à payer. Par cette expression, il entend tout ce que le consommateur doit consentir pour obtenir le bien proposé, tout ce qu’il donne en échange (temps, argent, explications, administration des traitements, etc.). La valeur perçue est donc extrêmement subjective. Elle peut être optimisée en cas de cocréation : client et vétérinaire participent tous deux au processus de production du service. Dans tous les cas, il importe de pas oublier que le client a souvent un budget en tête avant sa visite en clinique. S’il dépasse son budget, il doit avoir vécu une expérience qui dépasse ses attentes. Dans le cas contraire, il ressentira ce sacrifice à payer et jugera avoir payé trop cher pour le service rendu ou le produit prescrit.

Pour en savoir plus :

Darpy et Volle. Dunod, 2007.

Rivière et Mencarelli. RAM, 2012.

Zeithaml. J. of marketing, 1988.

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