Transport des animaux de rente en France : où en est-on ? - La Semaine Vétérinaire n° 1816 du 05/07/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1816 du 05/07/2019

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Auteur(s) : CHANTAL BÉRAUD 

MIEUX FORMER LES DIFFÉRENTS ACTEURS AUX BONNES PRATIQUES

Le BEA dépend de la façon dont l’animal perçoit une situation. Or, le transport d’un animal de rente est forcément pour lui une situation stressante, d’autant plus que les éleveurs habituent souvent moins aujourd’hui qu’autrefois leurs animaux à être manipulés, du fait notamment de l’augmentation du nombre d’animaux et de l’accroissement des technologies. Ainsi, il faut essayer de mieux former les éleveurs, les négociants, les chauffeurs routiers, de manière à ce qu’ils effectuent des montées et des déchargements de camions le moins brusquement possible, en tenant compte du comportement des animaux, car c’est le moment le plus stressant pour eux. En effet, ces mêmes animaux s’habituent généralement bien au transport par lui-même (à condition d’avoir une conduite adaptée, de respecter certaines limites horaires, les temps d’abreuvement, etc.). Il faut également veiller à utiliser des véhicules adéquats (par exemple, avec des cloisons pleines pour éviter aux bêtes de voir sur les côtés) et ne surtout pas mélanger des animaux de cheptels d’origine différente… Par conséquent, si l’on forme les gens, si on adapte le matériel, si on respecte les règlements, je pense qu’il est possible de gagner en temps et en stress, tant animal qu’humain ! Et il y aura aussi moins d’accidents.

Luc Mounier

PROMOUVOIR UN SEUL BIEN-ÊTRE : ANIMAL, HUMAIN ET ENVIRONNEMENTAL

Concernant la question du transport, c’est une source de stress. Cependant, ce problème est perçu différemment d’un éleveur à l’autre. Certains d’entre eux font, par exemple, confiance au système en place, tandis que d’autres préfèrent conduire eux-mêmes leurs bêtes à l’abattoir, ou encore privilégier l’abattage à la ferme. Pour aider à l’apprentissage du BEA, nous avons mis en place un projet européen Anicare. Il s’agit d’un programme Erasmus + visant, sur trois ans, à adopter une approche pédagogique innovante au moyen de débats entre les participants. Dans un premier temps, la réflexion concerne les bovins, les ovins et les caprins. L’objectif est de créer une boîte à outils de méthodes pédagogiques, afin d’impulser des changements positifs de pratiques en s’appuyant sur des films réalisés chez des éleveurs. Les modules de formation sont destinés aux éleveurs et aux “éducateurs” (conseillers agricoles, enseignants en lycée agricole, vétérinaires). Ils visent à promouvoir une pensée critique de l’apprenant. Je travaille actuellement avec les étudiants vétérinaires de Liège (Belgique) pour tester l’approche didactique. Nous souhaitons ainsi créer un cadre bienveillant et respectueux entre soignants et éleveurs, où ils approchent ce BEA, sans s’opposer, mais en cherchant ensemble des solutions éthiques aux problèmes quotidiens relatifs au BEA.

Jean-Pierre Durieux

LES AMÉLIORATIONS SONT PROGRESSIVES EN FRANCE

Il y a encore énormément de progrès à faire dans le transport des animaux vivants de rente. En effet, si les bons professionnels sont nombreux, il existe cependant encore des “moutons noirs” qui devraient être écartés. Et ce n’est pas si facile… Les contrôles de la part des diverses autorités (Direction générale de l’alimentation, diverses autorités de police) sont nettement insuffisants. Personnellement, je suis convaincu qu’une des voies de progrès passe par la mise en place au niveau des abattoirs d’un cahier des charges très précis, à faire endosser par leurs apporteurs. Cela permettrait d’identifier beaucoup plus facilement quels sont les maillons de la chaîne qui ne respectent pas les règles fondamentales qui permettent aux animaux vivants de voyager dans des conditions de transport les moins stressantes possible… D’autres mesures sont également nécessaires, comme la réduction du temps de transport, il faudrait privilégier le transport de carcasses, contrôler strictement et réellement la cohérence et le respect des carnets de route, réduire au minimum les transports maritimes, etc. Enfin, si l’ensemble des institutions vétérinaires françaises (Ordre, syndicats, etc.), avec d’autres parties prenantes (distributeurs, labels, etc.), se mettaient d’accord pour promouvoir d’une seule voix un étiquetage sur le BEA portant sur l’ensemble du cycle de vie (dont le transport), ce serait formidable, car cela aurait un impact politique et sociétal important.


Michel Courat
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