Traitement de l’hypertension pulmonaire - La Semaine Vétérinaire n° 1815 du 28/06/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1815 du 28/06/2019

CONFÉRENCE

PRATIQUE CANINE

Formation

Auteur(s) : GWENAËL OUTTERS  

Le traitement de l’hypertension pulmonaire (HTP) vise à améliorer la qualité de vie de l’animal, en corrigeant les signes cliniques tels que fatigabilité, léthargie, syncopes, signes congestifs d’insuffisance cardiaque droite.

Quand traiter ?

La priorité est de traiter la cause de l’HTP : fermeture du canal artériel, lutte contre les parasites pulmonaires, antiagrégants plaquettaires, traitements thrombolytiques, molécules de l’insuffisance cardiaque gauche (diurétiques, vasodilatateurs, antiarythmiques), hydroxyurée lors de polyglobulie, chirurgie (masse thoracique).

L’ajout d’un traitement spécifique de l’HTP se fait après identification de signes cliniques évidents liés à l’HTP et la décision de traiter dépend de la mesure de la pression artérielle pulmonaire, ainsi que de l’évaluation fonctionnelle du ventricule droit. Lorsque la régurgitation tricuspidienne est supérieure à 55 mmHg et le rapport atrium gauche/aorte est supérieur à 1,7, le pronostic est mauvais. En effet, la forte régurgitation induit une pression atriale gauche forte et des remaniements pulmonaires irréversibles.

Chez les chiens atteints d’une maladie valvulaire et d’HTP, au-delà d’une pression transtricuspidienne supérieure à 48 mmHg1, le traitement de la maladie valvulaire devient inefficace sur la baisse de la pression artérielle pulmonaire : il serait donc raisonnable de traiter indépendamment l’HTP lorsque la régurgitation tricuspidienne dépasse les 48 mmHg.

Chez les chiens atteints d’HTP lors de maladie pulmonaire, une étude2 suggère que l’ajout de sildénafil3 apporterait une amélioration clinique et radiographique (diminution de la fréquence respiratoire, augmentation du score clinique, diminution du score d’infiltration pulmonaire et du reflux tricuspidien).

Molécules spécifiques

Inhibiteurs de la phosphodiestérase 5

Le sildénafil, chef de file de cette famille, est un vasodilatateur artériel. Il fait baisser de façon significative la pression artérielle pulmonaire. Il est bien toléré et apporte une amélioration de la qualité de vie, ainsi qu’une meilleure tolérance à l’effort, mais sans amélioration de certains paramètres cliniques (fréquences respiratoire et cardiaque, pression artérielle systémique). La dose est de 1, 2, voire 3 mg/kg, en deux ou trois prises quotidiennes. Le tadalafil3 (1 à 4 mg/kg en une prise toutes les 48 heures) a une demi-vie plus longue. Son utilisation nécessite un suivi de l’hypotension.

Inhibiteur de la phosphodiestérase 3

Le pimobendane, utilisé à la dose de 0,4 à 0,6 mg/kg/j, inotrope et vasodilatateur artériel, apporte une amélioration clinique, une diminution du NT-proBNP à court terme et une baisse à court et long terme du reflux tricuspidien lors de maladie valvulaire associée à une HTP. L’association du pimobendane et du sildénafil n’apporterait pas d’amélioration significative par rapport à l’utilisation du sildénafil lors de maladie pulmonaire. Il semblerait qu’il faille réserver le pimobendane aux HTP associées aux maladies valvulaires.

Perspectives et autres molécules

L’imatinib (10 mg/kg), inhibiteur de la tyrosine kinase, limite la prolifération des cellules au niveau des muscles lisses des artères pulmonaires et apporterait une amélioration clinique des paramètres biologiques de tous les chiens. Son coût est toutefois prohibitif. Les antagonistes de l’endothéline ont une indication lors d’HTP chez l’homme, mais aucune étude vétérinaire n’a été menée. Les analogues de la prostacycline (vasodilatateur) pourraient éventuellement apporter de bons effets (chez l’homme), non référencés en médecine vétérinaire. Enfin, sans que ces traitements soient consensuels, certains experts utilisent l’amlodipine (inhibiteur calcique vasodilatateur, à la dose de 0,125 à 0,25 mg/kg, intéressant pour son coût) et/ou la théophilline (inhibiteur faible des phosphodiestérases 3, 4 et 5, bronchodilatateur, à la dose de 20 mg/kg en deux prises quotidiennes).

1 Chiavegatto D. et coll. Vet. Radiol. 2009.

2 Kellihan H. B. et coll. J. Vet. Cardiol. 2015.

3 Pharmacopée humaine.

Guillaume Derré Praticien à Marseille (Bouches-du-Rhône). Article rédigé d’après une présentation faite au congrès de l’Afvac à Marseille, en novembre 2018.

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