Cession d’animal : quel règlement pour le paiement ? - La Semaine Vétérinaire n° 1812 du 25/05/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1812 du 25/05/2019

JURIDIQUE

ÉCO GESTION

Auteur(s) : CÉLINE PECCAVY  

La vente des animaux est un sujet complexe. Le droit français ne subordonne pas le transfert de propriété au paiement du prix. Le vendeur doit en avoir conscience lors de contentieux afin de se prémunir d’éventuels désagréments.

Postulat de base : la vente se caractérise fondamentalement par le paiement d’un prix dont le montant est laissé à la libre appréciation des parties. Sans celui-ci, on tombe dans le régime bien différent de la donation. Les règles sont alors tout autres et, parmi elles, la plus notable est l’absence totale d’action en garantie après délivrance de l’animal contre le donateur.

Un prix est donc indispensable pour que le régime du droit de la vente s’applique. Un prix seulement ? Pas forcément. Si le prix ne peut être écarté, il peut en revanche être complété. Dans les ventes de chiens et de chats, on rencontre parfois des conventions de cession qui stipulent, en plus du prix de vente, des droits de saillie attachés au mâle vendu. Ces droits sont parfaitement valables, à la condition toutefois qu’ils ne soient pas perpétuels. La perpétuité n’est pas vue d’un bon œil par les magistrats. Elle va en outre à l’encontre des prérogatives essentielles attachées au droit de propriété. Celui qui veut pouvoir faire valoir un contrat contenant des droits de saillie devra donc en limiter très clairement le nombre et leur mise en œuvre dans le temps.

Quand payer l’animal ?

Un prix, oui, mais à payer quand ? Le principe se trouve dans l’article 1651 du Code civil qui dispose que : « S’il n’a rien été réglé à cet égard lors de la vente, l’acheteur doit payer au lieu et dans le temps où doit se faire la délivrance. » La loi fait donc la part belle à la volonté contractuelle et les parties ont ainsi tout loisir de prévoir un paiement anticipé intégral ou partiel, seulement à la remise de l’animal ou différé. Dans le domaine des animaux, le plus souvent, le cédant sollicite un premier versement pour la réservation, puis octroie des délais de paiement. Mais ces derniers sont loin d’être sans risques, risques souvent méconnus par le cédant. La principale surprise que notre vendeur pourrait avoir est celle d’être actionné en garantie alors que l’acheteur n’a pas payé intégralement le prix de vente. Action irrecevable ? Pas du tout. Ainsi en a jugé la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 28 mai 1991. Ceci s’explique simplement par le fait que le droit français ne subordonne pas le transfert de propriété au paiement du prix. Rappelons que l’article 1583 du Code civil dispose que « la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé. » Le vendeur n’est cependant pas sans ressources pour contrer ces désagréments.

Les ressources du vendeur

En premier lieu, un vendeur prudent pourrait simplement décider de ne pratiquer que des ventes au comptant. Dans une telle hypothèse, il dispose d’un droit de rétention qui lui permet de refuser de remettre l’animal tant qu’il n’a pas été payé intégralement. En outre et sur le fondement de l’article 1657, il pourra « de plein droit et sans sommation » disposer à nouveau de l’animal et le revendre si l’acheteur n’est pas venu en prendre livraison à la date convenue. Sur le principe, il pourrait même demander des dommages et intérêts au premier acheteur s’il n’a pu ensuite revendre l’animal qu’à un prix plus bas.

En second lieu et si notre vendeur tient à accorder des délais de paiement, il peut se protéger en faisant figurer dans son acte de vente une clause de réserve de propriété. Celle-ci lui assure de rester propriétaire tant que l’intégralité du prix n’a pas été payée et évite par ailleurs toute possibilité d’action en garantie dans ce même délai. Une action en revendication judiciaire de l’animal sera ultérieurement possible pour le cédant si l’acheteur ne régularise pas la situation.

Enfin, si notre vendeur a la qualité de professionnel et s’il est principalement intéressé par le paiement du prix, il doit garder à l’esprit qu’il dispose seulement d’un délai de deux ans pour agir valablement (article L.218-2 du Code de la consommation) et réclamer son dû.

En conclusion : prudence ou prise de risque, le vendeur doit faire son choix.

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