Recommandations pour le traitement de la dermatite atopique canine - La Semaine Vétérinaire n° 1810 du 11/05/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1810 du 11/05/2019

SYNTHÈSE

PRATIQUE CANINE

Formation

La dermatite atopique canine (DAC) est fréquente chez le chien. Elle est définie comme une maladie chronique, inflammatoire et prurigineuse, à l’origine de signes cliniques caractéristiques, associée, le plus souvent, à la production d’anticorps de type immunoglobulines E, dirigés contre des allergènes environnementaux. Depuis 2010, des recommandations sont régulièrement établies concernant la prise en charge de la DAC par un groupe d’experts internationaux réunis au sein de l’International Committee on Allergic Diseases of Animals (Icada). Les dernières recommandations ont été formulées en 2015 et soulignent la nécessité d’une prise en charge multimodale, avec renforcement de la barrière cutanée, éviction des allergènes aggravant la dermatose, traitement des complications infectieuses et gestion du prurit et de l’inflammation.

Correction du défaut de la barrière cutanée

L’altération de la barrière cutanée est au cœur de la pathogénie de la DAC. Sa restauration constitue donc un point important de la prise en charge. L’utilisation régulière d’hydratants et d’émollients est un prérequis indispensable. Ceux-ci attirent l’eau de l’environnement ou du derme et des tissus sous-cutanés et peuvent jouer un effet occlusif. La diminution de la perte en eau transcutanée peut, à elle seule, significativement diminuer le score de prurit et, par conséquent, le recours aux traitements antiprurigineux.

L’intérêt des acides gras essentiels (AGE) est également bien documenté. Ils peuvent être apportés par voie orale (sous forme de compléments alimentaires ou directement intégrés dans l’aliment) ou topique. Actuellement, peu d’études comparatives témoignent de l’intérêt d’une de ces voies plutôt qu’une autre, bien qu’il semble que l’apport soit supérieur lorsque les AGE sont directement intégrés dans l’aliment. Aucun consensus n’existe sur le rapport idéal oméga 3/oméga 6.

Des analogues de lipides épidermiques sont également disponibles sous forme topique.

Traitement des facteurs environnementaux

Les facteurs environnementaux ont une influence majeure dans l’aggravation des symptômes. Les allergènes (aéroallergènes, trophallergènes) ont un rôle dans la pathogénie de la maladie. Un traitement d’éviction doit être considéré : éviction alimentaire, recherche des allergènes impliqués et mise en place de mesures d’éviction et d’une désensibilisation. Celle-ci consiste à administrer régulièrement à l’animal allergique des doses répétées des allergènes auxquels il est sensibilisé. Elle constitue actuellement l’un des traitements étiologiques de la DAC, puisqu’elle cible l’allergène responsable du déclenchement de l’inflammation. Elle est bien tolérée. Ses effets sont observés après plusieurs mois et son efficacité (fondée sur une amélioration d’au moins 50 % des signes cliniques) est estimée à 60 à 70 % chez le chien.

Des piqûres de puce peuvent aggraver la DAC et un traitement antiparasitaire rigoureux est donc indispensable chez tout chien atopique.

Traitement du déséquilibre de la flore cutanée

Les chiens atteints de DAC présentent une dysbiose, c’est-à-dire un déséquilibre de leur flore cutanée commensale. Bactéries et levures prolifèrent sur la peau et dans les oreilles des chiens atopiques et contribuent à l’aggravation de la maladie. Elles doivent donc être systématiquement recherchées et traitées, par voie topique et/ou systémique selon la localisation des lésions, leur sévérité, mais aussi la faisabilité des traitements. Des études sont en cours quant à la modification du microbiome lors de dermatite atopique et son possible impact sur sa prise en charge. L’intérêt sur le long terme de soins topiques respectant la flore microbienne saprophyte tout en prévenant la prolifération des agents pathogènes émerge depuis quelques années.

Traitement de l’inflammation et du prurit

Le dérèglement du système immunitaire cutané associé à la DAC et le prurit secondaire justifient l’utilisation de médicaments anti-inflammatoires, antiallergiques et/ou antiprurigineux – antihistaminiques, acide gras, glucocorticoïdes, ciclosporine, oclacitinib, lokivetmab – parfois au long cours.

Les antihistaminiques sont efficaces dans une minorité de cas (proche du pourcentage de l’effet placebo) dans la DAC et ne peuvent être, au mieux, que considérés comme préventifs. Les glucocorticoïdes, la ciclosporine, l’oclacitinib, le lokivetmab ont, en revanche, prouvé leur efficacité. Ils permettent de stopper la réponse immunologique de type “allergique” de façon plus ou moins ciblée ou d’agir sur certaines molécules impliquées dans la genèse du prurit, comme l’interleukine 31. Le choix de l’une de ces molécules dépend de la sévérité et du phénotype de la DAC, de l’animal et de son propriétaire (tableau). Lors de formes localisées, le recours à des immunomodulateurs topiques, comme le tacrolimus ou l’acéponate d’hydrocortisone, ne doit pas être négligé.

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Marion Mosca Diplômée du Collège européen de dermatologie vétérinaire, maître de conférences en dermatologie à VetAgro Sup (Lyon)

Émilie Vidémont-Drevon Diplômée du Collège européen de dermatologie vétérinaire, p raticienne au CHV Saint-Martin à Saint-Martin-Bellevue (Haute-Savoie).

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