Abandon d’un animal : de la prison ferme prononcée ! - La Semaine Vétérinaire n° 1810 du 11/05/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1810 du 11/05/2019

JURISPRUDENCE

ACTU

Auteur(s) : NICOLAS CORLOUER, AVOCAT À LA COUR   

La reconnaissance de la maltraitance animale gagne du terrain dans notre droit, des sanctions de plus en plus lourdes sont prononcées. Un récent jugement montre une application du Code pénal dans une affaire d’abandon d’animal.

Par un jugement du 4 avril 2019, le juge correctionnel du tribunal de grande instance d’Evry (Essonne) a fait une application de l’article 521-1 du Code pénal dans une affaire d’abandon d’animal. Pour mémoire, l’article 521-1 du Code pénal prévoit que « le fait, publiquement ou non, d’exercer des sévices graves, ou de nature sexuelle, ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou tenu en captivité, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 d’amende ». Précisons d’ores et déjà que ces peines sont également encourues en cas d’abandon d’un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité. En outre, une peine complémentaire d’interdiction, à titre définitif ou non, de détenir un animal peut être prononcée.

Enfin, il appartient au tribunal de statuer sur le sort de l’animal. Celui-ci peut être confisqué pour être remis à une fondation ou à une association de protection animale.

L’enquête

En l’espèce, le prévenu était propriétaire d’un chien de race pitbull, non déclaré, ni stérilisé. Si le chiot a été traité convenablement au début, le propriétaire a fini par le laisser à l’abandon le plus total : le chien était attaché très court dans l’appartement, au point qu’il ne pouvait pas se retourner ; il n’a été nourri qu’épisodiquement (une fois tous les trois jours selon les déclarations du prévenu) ; il n’était plus promené en extérieur et vivait dans ses déjections, accumulées en quantité importante. C’est l’odeur des excréments qui a fini par alerter le voisinage et permis de mettre un terme au calvaire de l’animal. Les forces de l’ordre l’ont alors saisi ; une intervention applaudie par le voisinage, a tenu à préciser le parquet. L’animal a été placé au sein d’une association dans l’attente du procès.

Au cours de l’enquête, illustrée par des photos, qualifiées tant par le procureur de la République, que par le juge, « d’insoutenables », il a été constaté, lors du bilan vétérinaire, que le chien : présentait une très grave dénutrition (14 kg au lieu d’un poids compris normalement entre 23 et 30 kg, compte tenu de son âge), était également atteint de maladies de peau impliquant de nombreuses plaques d’alopécie, n’était ni vacciné ni pucé, ce qui laissait présager que l’animal n’avait jamais été présenté à un vétérinaire.

Une sanction exemplaire pour ce type d’affaire

Au regard de la gravité des faits reprochés et nonobstant les excuses formulées par le prévenu, qui justifiait son acte par un état dépressif, le juge est entré en voie de condamnation en prononçant une sanction exemplaire pour ce type d’affaire :

- huit mois de prison ferme (précisons que cette peine, bien qu’elle soit ferme, n’aboutira pas nécessairement à un emprisonnement, un aménagement de celle-ci pouvant être prononcé par le juge de l’application des peines) ;

- une interdiction à vie de détenir un animal ;

- la confiscation du chien, confié à une association qui pourra en disposer librement ;

- le versement d’une somme de 1 000 € au profit d’une association de protection des animaux.

Ajoutons, fait peu commun méritant d’être souligné, que le juge a précisé que sa décision aurait été plus sévère en l’absence d’actes de contrition du prévenu. Une telle sanction, peu habituelle dans ce domaine, démontre une réelle volonté des juges de réprimer ce type d’infractions, qu’ils ont trop fréquemment à juger.

Quant au chien, il s’est parfaitement rétabli.

Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr