Le projet de recherche Smartbees ouvre la voie de la sélection génétique - La Semaine Vétérinaire n° 1806 du 06/04/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1806 du 06/04/2019

ABEILLES

PRATIQUE MIXTE

L'ACTU

Auteur(s) : TANIT HALFON  

Quatre années de recherche sur l’abeille domestique ont permis de mettre en évidence plusieurs marqueurs génétiques associés à la résistance à Varroa destructor.

Dans un contexte mondial de déclin des pollinisateurs, le projet de recherche européen Smartbees1 s’est penché sur la diversité génétique des abeilles domestiques, notamment sur la résistance naturelle au parasite Varroa destructor. Objectif : développer, au niveau européen, l’émergence de colonies d’abeilles mellifères locales, résistantes au parasite. Réunissant 16 partenaires européens issus de 11 pays, le projet a mis au jour, en quatre années de recherche, des milliers de marqueurs génétiques. « Plus de 2 200 prélèvements d’abeilles ont été analysés, ce qui a servi à identifier des marqueurs permettant de distinguer les différentes lignées européennes d’abeilles, et même les sous-espèces locales », explique Richard Thiéry, directeur du laboratoire national de référence santé des abeilles de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) de Sophia Antipolis (Alpes-Maritimes), qui collaborait au projet. Parmi eux, 2 407 marqueurs SNP2 étaient associés à la résistance à Varroa, plusieurs d’entre eux étant localisés à proximité de gènes impliqués dans la sensibilité aux odeurs3. À la clé : l’obtention d’une puce génétique en cours de développement, qui devrait, à terme, permettre d’effectuer des tests rapides, “au pied des ruchers”, pour accompagner les apiculteurs dans la sélection des colonies.

Une diversité génétique virale

Dans ce projet, l’Anses s’est spécifiquement penché sur les interactions entre Varroa et le virus des ailes déformées (deformed wing virus ou DWV). Ce dernier peut, en effet, être transmis par le parasite, à l’origine de plus fortes charges virales et de symptômes (déformations des ailes, mortalité précoce). Pour ce faire, une collecte d’échantillons de 121 colonies issues de 15 pays, dont trois sites indemnes de Varroa (îles de Colonsay, Ouessant et Aland), a été réalisée. « Notre objectif était de comprendre pourquoi le virus devenait davantage virulent lorsqu’il était transmis par le parasite », souligne Richard Thiéry. Si les données sont toujours en cours d’analyse, les premiers résultats ont révélé un continuum de variants différents, et l’existence de multiples recombinants entre les deux formes de virus : DWV et VDV-14. « Nous avons notamment identifié les sites de recombinaison du virus, précise le chercheur. En revanche, nous n’avons pas pu associer ces variants à un niveau de virulence. » Ainsi, les taux de mortalité et de déformations des ailes étaient équivalents pour le DWV et le VDV-1.

1 smartbees-fp7.eu/Overview.

2 Single nucleotide polymorphism : mutation ponctuelle du génome correspondant à la substitution d’un seul nucléotide (A, G, T, C) à un locus donné. Ces mutations s’observent toutes les 100 à 1 000 bases. Elles représentent le polymorphisme le plus abondant du génome. En sélection génomique, les SNP sont utilisés comme marqueurs génétiques.

3 L’odorat des abeilles leur permet notamment de trouver des sources de nourriture (bit.ly/2veuiFa).

4 Varroa destructor virus 1.

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