Oniris abandonne les lapins vivants en physiologie - La Semaine Vétérinaire n° 1805 du 06/04/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1805 du 06/04/2019

ENSEIGNEMENT

ACTU

Auteur(s) : FRÉDÉRIC THUAL  

L’école nantaise fait un nouveau pas dans l’apprentissage par simulation. Sans attendre la finalisation d’un projet d’automate, les physiologistes de l’établissement ont décidé d’arrêter le recours aux lapins vivants et ont revu leurs méthodes pédagogiques. Quitte à prendre les étudiants comme cobayes !

Après avoir diminué le nombre de séquences invasives pour permettre le réveil de davantage de lapins de laboratoire et limiter leur euthanasie, les enseignants de physiologie et physiopathologie d’Oniris, à Nantes (Loire-Atlantique), ont décidé, cette année, d’arrêter le recours aux lapins vivants dans leur enseignement. « Le monde change. L’enseignement de la physiologie doit lui aussi évoluer », explique Julie Hervé, maître de conférences en physiologie-physiopathologie à Oniris. « Nous avions envie de presser le pas. De cette manière, nous allons stimuler l’innovation dans les pratiques pédagogiques », dit-elle, engagée par ailleurs dans la coordination d’un projet de simulateur réaliste mené en partenariat avec les ingénieurs de l’Institut Mines-Télécom (IMT) Atlantique, les enseignants de physiologie des trois autres écoles vétérinaires françaises et la faculté des sciences et techniques de l’université de Nantes. « L’objectif du projet est de créer un automate haute-fidélité qui puisse se substituer aux lapins et permettre aux étudiants d’observer et de comprendre comment les grandes fonctions se coordonnent et se régulent au sein de l’organisme. »

Une expérimentation multisite

Inspirés par le centre de simulation en réanimation et soins intensifs, Virtual Critical Care, et par Virtual Vet, dédié à l’apprentissage des premiers gestes vétérinaires, implantés à Oniris, les ingénieurs de l’IMT Atlantique ont commencé à plancher sur un automate “maison” et une interface dédiée. « Il présente un battement cardiaque très réaliste, se réjouit Julie Hervé, mais sa ventilation est encore trop caricaturale ! ». L’objectif est d’être prêt pour 2020. Après avoir fait ses preuves à Nantes, le prototype sera testé à Maisons-Alfort, à Toulouse et à Lyon. L’expérimentation devrait s’accompagner d’une levée de fonds pour valoriser l’innovation vétérinaire. Classé comme prioritaire par le département d’enseignement, ce projet pédagogique, qui vise à terme à entrer dans le nouveau référentiel de compétences, a bénéficié d’une rallonge budgétaire de 10 000 €.

Sur le terrain, l’enseignement des travaux pratiques dispensés aux premières années a d’ores et déjà été revu. « En attendant l’automate, les étudiants travaillent sur une interface informatique. Pour conserver l’aspect pratique, le lapin vivant est remplacé par les étudiants eux-mêmes, les chiens du chenil pédagogique et des reliquats d’échantillons biologiques », détaille Julie Hervé.

Des étudiants cobayes

L’enseignement se divise en quatre ateliers de deux heures. Pour le premier d’entre eux, les étudiants deviennent les sujets de l’étude, sur lesquels on teste la force musculaire en fonction de la fatigue, du stress, des encouragements. Lors de la deuxième séquence, les futurs vétérinaires sont monitorés et équipés d’un kit respiratoire et soumis à un test d’effort sur un vélo d’appartement pour mesurer les fonctions cardiovasculaires. La troisième séance fait appel, cette fois, aux chiens du chenil de l’école. « Nous utilisons beaucoup le renforcement positif, avec des caresses, des croquettes, des jouets... Nous parlons beaucoup de bien-être animal », dit-elle. Enfin, le dernier atelier concerne la physiologie rénale et l’homéostasie. « Nous travaillons à partir de reliquats d’échantillons biologiques de sang et d’urine pour mesurer l’hématocrite, la vitesse de sédimentation, la glycémie, etc. Ces exercices de physiologie sont aussi un prétexte pour aborder les questions de biosécurité et parcourir le centre hospitalier universitaire vétérinaire. » La révision de ces protocoles, organisée autour du futur robot, a écarté les actes de chirurgie et d’anesthésie, toujours enseignés en 3e année.

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