Un cas de maladie d’Aujeszky diagnostiqué en Meurthe-et-Moselle - La Semaine Vétérinaire n° 1803 du 23/03/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1803 du 23/03/2019

PSEUDO-RAGE

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : JULIEN BUQUET 

Chaque année, une demi-douzaine de chiens atteints par cet herpèsvirus sont recensés dans l’Hexagone. Si le sanglier est le réservoir sauvage, le virus peut se transmettre à des espèces comme le chien, le chat, le cheval ou les ruminants par consommation d’abats ou par aérosol.

En décembre 2017, un salarié de notre confrère Claude Neu, en Meurthe-et-Moselle, reçoit un chien de chasse pour un œdème de la face associé à un prurit démentiel et à des lacérations des babines. L’animal présente une hyperthermie et hurle de douleur. « C’est le premier cas de maladie d’Aujeszky que je voyais depuis la fin de mes études, raconte notre confrère, mais les signes cliniques étaient faciles à reconnaître », témoigne-t-il. Impossible de calmer les douleurs du chien, que ce soit avec des morphiniques ou des anti-inflammatoires. Seule une anesthésie générale a permis d’arrêter la crise. Le chien a été euthanasié le lendemain, environ cinq jours après avoir été en contact avec des sangliers et moins de 24 heures après l’apparition des premiers signes de la maladie.

Encéphalite mortelle

La maladie d’Aujeszky ou pseudo-rage est causée par un herpèsvirus dont le réservoir sauvage est le sanglier. Le porc domestique en élevage plein air, s’il est en contact étroit avec un suidé sauvage infecté, peut également contracter le virus et le transmettre, bien que la France continentale soit indemne pour le moment, le virus circulant dans la faune sauvage n’étant pas pris en compte pour l’obtention ni le maintien de ce statut. Par consommation d’abats ou par aérosol, le virus peut se transmettre à des espèces comme le chien, le chat, le cheval ou les ruminants.

« Chez le porc, la sensibilité de l’individu est liée à son âge, explique Nadia Haddad, professeure en maladies réglementées, zoonoses et épidémiologie à l’École nationale vétérinaire d’Alfort. Le porcelet de moins de 15 jours est le plus sensible et meurt d’une encéphalite grave. Le porc à l’engrais souffrira d’un syndrome fébrile et de troubles de la croissance pouvant être associés à des signes respiratoires ou nerveux, alors que chez l’adulte la maladie s’exprimera essentiellement par des troubles de la reproduction, avec notamment des avortements chez les femelles gestantes. Chez les espèces autres que les suidés, qui sont des hôtes accidentels, il n’y a pas eu de coadaptation hôte-virus. Une encéphalite mortelle est donc observée comme chez le très jeune porcelet. »

Un manque de déclaration, pourtant obligatoire

En 2018, le laboratoire national de référence pour la maladie d’Aujeszky de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) de Ploufragan (Côtes-d'Armor) a recensé une vingtaine d’analyse d’échantillons sur des cas de chiens suspects. Afin de mettre en évidence le virus, le génome viral est amplifié par polymerase chain reaction (PCR) sur l’encéphale de l’animal dont la moitié aura été transmise au laboratoire Anses de la rage et de la faune sauvage de Nancy (Meurthe-et-Moselle) afin d’exclure la rage.

« Nous recensons environ une demi-douzaine de cas par an et ce chiffre reste stable », explique Marie-Frédérique Le Potier, expert de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) pour la maladie d’Aujeszky et responsable de l’unité de virologie et d’immunologie porcine du laboratoire de Ploufragan.

Le nombre de cas est sous-évalué car, bien que la déclaration soit obligatoire dès la suspicion chez tous les mammifères (maladie réglementée de catégorie 1), certains cas ne le sont pas et parfois l’animal meurt rapidement chez lui sans avoir été vu par un vétérinaire.

Des régions plus concernées que d’autres

La maladie d’Aujeszky est présente chez le sanglier sur la quasi-totalité du territoire, mais les régions Nord-Est, Centre et Sud-Est, plus récemment, sont les plus touchées, avec des niveaux de prévalence atteignant parfois 30 % chez le sanglier. Il n’y a cependant plus eu d’enquête nationale sur la présence de la maladie dans la faune sauvage depuis le début des années 2000. Les données épidémiologiques récentes émanent donc de recensements locaux organisés par des fédérations de chasse et de la déclaration de cas chez le chien qui peut être considéré comme sentinelle pour cette maladie, bien que ces derniers cas soient peu nombreux à être déclarés. Une collaboration et une bonne communication entre les différents acteurs de terrain est donc plus que jamais nécessaire, afin d’obtenir des données fiables sur la maladie. Il convient également d’informer systématiquement les clients chasseurs sur les risques qu’ils encourent à donner les viscères de sanglier en récompense à leurs chiens, ainsi qu’à les laisser s’approcher ou mordre ces animaux, les exposant ainsi au virus.

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