Pour MSD Santé animale, l’avenir de la profession se conjugue au présent - La Semaine Vétérinaire n° 1801 du 09/03/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1801 du 09/03/2019

DÉBAT

ACTU

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO-MORADEL 

Les nouveaux outils numériques abreuvent le marché vétérinaire, les pratiques changent, les chaînes de cliniques se mettent en place et les attentes des jeunes diplômés évoluent. La profession pourra-t-elle s’adapter ? Pour en parler, embarquement avec le laboratoire MSD Santé animale, pour ses rencontres du 11 mars.

Une balade sur l’eau pour anticiper le futur. Le 11 mars, sur un bateau naviguant sur la Seine, le laboratoire MSD Santé animale a souhaité donner la parole à des acteurs clés pour échanger sur l’avenir de la profession vétérinaire, à l’occasion du lancement de son premier e-congrès de la santé animale. La question du recrutement a ouvert le débat. Pour Isabelle Chmitelin, directrice de l’école nationale vétérinaire de Toulouse, l’heure n’est plus au constat, mais aux solutions. « Ce ressenti de pénurie doit être caractérisé pour tenter de l’objectiver », a-t-elle indiqué. Les écoles vétérinaires travaillent en étroite collaboration avec le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) et le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires (CNOV) pour endiguer le problème. Une étude conduite par le CNOV et confiée à un cabinet d’études tentera de répondre à cette question complexe.

La course au recrutement

Par ailleurs, des travaux de recherche sont menés au sein des écoles, notamment une thèse qui s’intéresse aux processus de recrutement dans les entreprises vétérinaires et les difficultés qu’elles rencontrent. Des solutions concrètes ont également été apportées, telles que l’augmentation significative du numerus clausus. « Nous passons à des promotions de 160 étudiants », souligne Isabelle Chmitelin. Autre solution qui fait débat : l’intégration d’un oral de motivation lors du concours d’entrée en école vétérinaire. « Il s’agit de savoir si les candidats n’ont pas une vision “télévisuelle” du métier de vétérinaire. » Les stages en cours de scolarité sont également une voie privilégiée par les écoles. « L’augmentation du nombre de diplômés doit être regardée à la lumière de ce que doivent faire les vétérinaires de demain », précise-t-elle, avant d’ajouter qu’il est nécessaire de revoir la rémunération des jeunes diplômés « qui sont actuellement moins payés que les ingénieurs agronomes qui ont fait deux ans d’études de moins. »

Le vétérinaire à l’ère du numérique

Pour Éric Lejeau, vice-président du SNVEL, la problématique du recrutement révèle aussi un changement du rapport au travail. Selon lui, les jeunes diplômés sont en quête d’un équilibre entre vie privée et vie professionnelle : « Il faut que nous soyons capables, dans nos structures, de tenir compte de ces changements si l’on veut intéresser les talents de demain. » L’organisation des tâches devra progressivement être revue et passera certainement par une délégation des actes à d’autres membres de l’équipe. « La délégation de soins fait partie des solutions envisagées pour que le vétérinaire se recentre sur son cœur de métier. » Face au développement du numérique, le vétérinaire de demain sera aussi confronté à un changement de paradigme dans sa façon d’exercer son métier. Pour le représentant du SNVEL, cette évolution ne devrait pas être une source d’inquiétude pour la profession. « C’est un fait, le vétérinaire va devoir s’adapter. Mais il ne semble pas en avoir pris conscience », souligne-t-il. La profession doit être accompagnée dans ce changement. « Il est indispensable d’être au cœur de la donnée et d’en disposer. Dans la révolution numérique, les données récupérées vont être nécessaires pour que le vétérinaire mise sur la prévention plutôt que sur le soin et l’aspect curatif. »

Faire évoluer la formation

Du côté des industriels aussi, il est rappelé que le praticien doit prendre toute sa place dans ce débat autour du numérique. « L’animal est maintenant communicant. Or, il y a 50 ans, le vétérinaire était le seul à pouvoir le faire parler. Ces nouvelles technologies viennent élargir le circuit d’informations. Le vétérinaire doit démontrer sa valeur ajoutée », indique Jean-Louis Hunault, président du Syndicat de l’industrie du médicament et réactif vétérinaires (SIMV). Cette évolution permettra sans aucun doute au vétérinaire de confirmer son virage vers la prévention. « L’industrie est là pour l’accompagner. C’est un enjeu de monter en gamme », ajoute-t-il. Cette volonté est partagée par MSD Santé animale. Pour son directeur général, Loïc Jegou, ce changement est déjà entamé. « MSD y croit tellement que nous comptons investir 3 milliards de dollars pour incorporer une compétence qu’on puisse apporter au monde vétérinaire, afin qu’il accède à un certain nombre de données d’animaux connectés », annonce-t-il. En outre, la formation continue des praticiens ne devrait pas se limiter aux éléments techniques, mais aussi incorporer des enseignements sur l’utilisation des données issues de l’intelligence artificielle.

FAUT-IL AVOIR PEUR DE L’“UBÉRISATION” ?

En France, les chaînes de cliniques sont craintes par les uns et plébiscitées par les autres. « Nous voyons l’arrivée de structures très organisées et déjà implantées à l’étranger avec un nombre de cliniques conséquent. C’est un modèle qui propose des opportunités par rapport aux attentes des jeunes vétérinaires », indique Éric Lejeau (Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral). Il encourage la profession à être proactive. Pour Patrick Govart, président-directeur général développement chez Evidensia, les vétérinaires ne devraient pas craindre l’implantation de cliniques low cost. Il note par ailleurs un changement de mentalités. Les jeunes diplômés ne souhaitent plus devenir actionnaires des cliniques. Selon lui, ces modèles répondent aux problématiques rencontrées par les vétérinaires qui désirent pérenniser leur investissement, mais aussi se recentrer sur leur cœur de métier et se débarrasser des tâches administratives. Du côté de l’industrie, cette évolution du marché exprime un besoin de la profession. « Nous concentrons nos efforts à aider les vétérinaires à voir ses opportunités et à acquérir des moyens de les saisir. Ce qui compte, peu importe la nature juridique de la structure, c’est la qualité de l’éthique, du soin et de l’engagement à maintenir un niveau de confiance », souligne Loïc Jegou. « La profession devra se pencher sur les problèmes éthiques qui pourraient être suscités par ce changement », ajoute Jean-Louis Hunault (Syndicat de l'industrie du médicament et réactif vétérinaires).
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