Le chat est devenu, pour nous vétérinaires, notre chien moderne - La Semaine Vétérinaire n° 1800 du 02/03/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1800 du 02/03/2019

ACTU

2018, l’année du chat ! Nous n’avions jamais autant entendu parler de lui dans notre petit monde vétérinaire. Tous les acteurs de la profession ont communiqué, laboratoires et petfooders en tête. À juste titre. 13,5 millions de chats, 7,3 millions de chiens. Nous avons enfin compris l’importance qu’avait prise ce “nouveau” compagnon de nos foyers. Je dis “nouveau” car il n’a effectivement plus la même place qu’avant. De commensal, chasseur apprécié, toléré dans nos maisons, il est devenu notre compagnon, ou plutôt notre “bébé”. Je ne suis pas sûr que nous, vétérinaires, ayons totalement pris la mesure de ce changement, mais le chat est bien devenu notre chien moderne. Il est, dans l’esprit de nos concitoyens, l’animal idéal de nos intérieurs : indépendant, pouvant rester une semaine tout seul, “autonome”, qui n’a pas besoin d’être sorti, propre, suffisamment petit pour rentrer dans un 40 m2. Or, tout le monde veut son animal, c’est-à-dire son chat, voire même ses deux chats. Et la vie moderne, c’est une famille monoparentale, en ville, dans un petit appartement. Il semble entrer merveilleusement bien dans nos vies.

Le chat, cet incompris de notre quotidien

Nous oublions un peu vite ses besoins, en particulier celui d’être stimulé ou de choisir ses colocataires. Nous le laissons s’empâter jusqu’à l’obésité, fléau sanitaire de nos braves félins, se morfondre sur son canapé, dans un ennui terrible, ou encore tourner en rond profondément stressé… Je ne dis pas qu’il faut arrêter d’adopter des chats. En revanche, une meilleure connaissance de son éthogramme me paraît essentielle : pour nos clients, mais aussi pour nous, vétérinaires. C’est à nous de conseiller, de transmettre, de savoir prendre un rendez-vous pour un problème de malpropreté et pas seulement de prescrire des phéromones. Évidemment, ce n’est pas facile de changer notre pratique, surtout lorsque cela complique notre quotidien, mais c’est notre responsabilité. Qui d’autre que nous a cette légitimité pour parler du chat, de ce qu’il est ? Qui d’autre que nous a l’opportunité de rencontrer le maître et son chat au moins une fois dans sa vie ? Près de 90 % des chats sont, en effet, stérilisés. C’est notre chance. Nous avons donc deux objectifs à atteindre : nous former sur les bases du comportement du chat et communiquer à nos clients ses besoins essentiels. Tout maître croit savoir ce qu’est un chat car il en a eu un quand il était enfant. Pourtant, nous, vétos, constatons qu’il est anthropomorphisé et pas toujours respecté en tant que chat.

Un mantra : deux examens préventifs par an

Il est aussi peu suivi médicalement. Nos clients ne savent pas que le chat cache ses symptômes. Ils ne détectent pas les signaux faibles qu’il émet. C’est ainsi que nous le voyons à 6 mois pour sa stérilisation puis à 10 ans pour une maladie rénale… Notre rôle de véto est majeur. Qui peut parler de santé à son maître ? Internet ? Le magnétiseur ? Nous sommes parfaitement légitimes pour expliquer à nos clients que la prévention est particulièrement intéressante chez le chat. Je recommande d’ailleurs deux examens préventifs par an. C’est un message que je passe systématiquement quand je suis avec des consœurs et des confrères. On me pose alors la question de ce que l’on met dans cette seconde consultation. C’est bien connu, une consultation, c’est pour faire un vaccin ! Quand il n’y en a plus à faire, on ne comprend pas pourquoi réaliser une deuxième consultation. Pourtant, une consultation pourrait être tout simplement construite sur un examen, et tout le reste de la prévention, dont les vaccins, si c’est le moment. Le message doit devenir un mantra de notre profession. Plus nous en parlerons, plus il passera auprès de la profession, mais aussi de nos clients.

Une prise en charge globale de nos clients

Quand nos clients ont bien compris qu’un chat pouvait être malade comme un chien, qu’en appartement, il pouvait aussi attraper le coryza ou des puces, nous devons les aider à le médicaliser. Nous devons communiquer en permanence : à la prise de rendez-vous, avant la visite, par un mail, sur notre site internet, sur notre page Facebook. Nous devons leur parler de médecine, de maladie, de prévention, mais nous devons aussi parler du quotidien. Comment lui faciliter le transport jusqu’à la clinique ? Comment mettre en contact deux chats ? Comment bien l’accueillir lors de son adoption ? Nos clients attendent d’être pris en charge. Ils cherchent la facilité et le confort. Il faut soigner leur chat mais aussi tenir compte de son bien-être et de celui de son maître. Ils veulent entrer chez nous comme dans un pôle multiservice pour animal où ils trouveront toutes les réponses à leurs questions. Et ils veulent s’y sentir bien, écoutés, chouchoutés.

Le Grif

Nous avons créé un groupe de vétos chats, accompagnés de vétos aux compétences business et nouvelles technologies, il y a un an et demi. Nous voulons aider la communauté vétérinaire à optimiser l’accueil du chat dans nos structures. Il s’agit du Grif, le Groupe de réflexion et d’intérêt félin. Nous invitons les vétérinaires et les ASV à nous rejoindre sur notre page Facebook. Nous y partageons des astuces. Nous échangeons sur des pratiques. Notre groupe souhaite diffuser les bonnes pratiques en médecine féline, partager des recommandations et développer nos établissements vétérinaires dans le domaine félin.

CYRIL BERG (N 98)

consacre son activité à la médecine féline depuis sept ans et dirige deux cliniques (sous l’appellation Mon chat et moi) en région nantaise. Il est à l’origine du Groupe de réflexion et d’intérêt félin (Grif), créé il y a un an et demi pour partager avec les confrères les bonnes pratiques de médicalisation du chat qu’il considère comme un nouvel animal de compagnie, tant sa place dans les foyers s’est modifiée ces dernières années.

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