La cohérence cardiaquE, une discipline à explorer

En 2003, à l’occasion d’un diplôme interécoles de comportementaliste, je m’intéresse au lien entre les maladies cardiovasculaires et le comportement et choisis le modèle canin de la maladie mitrale comme sujet de recherche personnelle.

Les études sur l’étiologie de la maladie mitrale chez le chien de 1960 à nos jours ont montré que des neuromédiateurs, comme la sérotonine et la noradrénaline, seraient corrélés à son évolution ou à son apparition. Le scandale du Mediator^®, sérotoninergique puissant, a confirmé ces hypothèses en humaine. En 2014, des études sur le système nerveux autonome du chien ont révélé une corrélation entre la mesure de la variabilité cardiaque (VC) et la gravité de la maladie mitrale (la VC mesure l’état du système nerveux autonome). Enfin, en 2017, Richard Lawson publie une thèse sur la sérotonine et les maladies cardiovasculaire chez l’homme.

Pour les cardiologues de l’Acvim¹ (consensus de 2009), la maladie mitrale n’est pas une maladie “linéaire” et dépend des conditions environnementales. Je m’oriente ainsi vers des recherches sur l’influence des émotions de l’animal (et de leur propriétaire, lorsqu’il existe un renforcement de l’anxiété) dans l’apparition ou l’aggravation de la maladie.

En médecine comportementale vétérinaire comme en psychiatrie humaine, la régulation des systèmes noradrénergiques, sérotoninergiques et l’étude de la variabilité cardiaque (reflet du système ortho et parasympathique) fait partie des objectifs thérapeutiques. La psychiatrie rejoint la cardiologie et vice versa !

Le lien entre la cardiologie et le comportement est la psychocardiologie, elle a été initiée en France par le cardiologue Jean-Pierre Houppe en 2006. J’ai suivi son modèle et j’enseigne la psychocardiologie au diplôme universitaire de zoopsychiatrie (DU sous la triple égide de l’association Zoopsy, de l’université de Lyon² et de VetAgro Sup, campus vétérinaire, depuis 2014).

Séduite par cette nouvelle discipline, j’ai développé cette pratique et créé une association, Zenfeel, qui a pour but l’étude de la contagion des émotions grâce au suivi de la variabilité cardiaque et propose des ateliers de formation à ses adhérents sur la VC et la cohérence cardiaque. La cohérence cardiaque est une technique respiratoire qui permet d’équilibrer le système nerveux autonome. Zenfeel met à la disposition du public une application gratuite pour téléphone Android (Zenfeel sur Google Play Store).

Depuis 2015, je travaille avec le D^r David O’Hare (médecin de Montréal, spécialiste de la cohérence cardiaque, ancien associé de David Servan-Schreiber) sur la cohérence cardiaque en pratique vétérinaire (CCPV). Lors de mes consultations, les propriétaires d’animaux de compagnie sont informés de la possibilité de suivre un guide respiratoire les mettant à la neutralité émotionnelle et engendrant un “calme express” chez leurs animaux. De nombreuses études ont montré que nos patients à quatre pattes étaient stressés avant de rentrer en salle de consultation. La “cardio-accélération” de leur maître (peur d’être en retard, peur que leur animal ait mal, peur que leur animal ait peur, mauvais souvenir d’une consultation précédente, etc.), entraîne une augmentation de la vigilance de leur animal avec stimulation noradrénergique. La pratique de la cohérence cardiaque, par le propriétaire et les soigneurs, a un effet quasi immédiat sur le chien comme sur le chat. De plus, la CCPV diminue le stress de l’équipe soignante. La cohérence cardiaque est un outil très utile en médecine vétérinaire, qui mérite d’être connu. Elle existe déjà dans l’armée (pour les pilotes de chasse) et commence à être diffusée dans les écoles, avec de bons résultats sur les enfants (augmentation de la concentration et de l’empathie) ; elle mérite d’être diffusée dans notre profession !
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¹ American College of Veterinary Internal Medicine.

² Angrist, 1960 ; Pedersen, 1990, Rona, 2000 ; Cris Orton, 2009.