Maladies respiratoires des broutards : plusieurs protocoles vaccinaux à l’étude - La Semaine Vétérinaire n° 1799 du 24/02/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1799 du 24/02/2019

ANALYSE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE  

En atelier d’engraissement de taurillons, les maladies respiratoires (association de virus et de bactéries, notamment Mannheimia haemolytica) sont à l’origine de la majorité des problèmes sanitaires rencontrés durant le premier mois d’engraissement1 et, par conséquent, de pertes économiques et de retards de croissance importants. Or, pour traiter les broutards atteints, les éleveurs ont recours à des antibiothérapies parfois administrées à l’ensemble du lot. C’est pourquoi, afin de limiter ces pratiques à risque en matière d’antibiorésistance, la vaccination préventive est une alternative qui a été étudiée ici grâce à la comparaison des impacts zootechniques de plusieurs protocoles vaccinaux (faisabilité et efficacité).

Trois protocoles comparés

Le vaccin Bovilis® Bovigrip a été administré à 248 broutards provenant d’élevages commerciaux (10 élevages naisseurs et 6 ateliers d’engraissement) suivant trois protocoles vaccinaux différents qui ont été comparés deux à deux (performances de croissance des animaux, résultats sanitaires, examen des poumons à l’abattoir). Dans le premier cas (V1), une vaccination précoce est réalisée avec deux injections au moins 15 jours avant le départ de chez le naisseur ; la vaccination intermédiaire (V2) correspond à la réalisation d’une première injection chez le naisseur et d’une deuxième en centre de rassemblement ; enfin, lors de vaccination tardive (V3), la première injection est faite au centre de tri et la deuxième chez l’engraisseur. Ces animaux n’ont reçu aucun traitement antibiotique collectif à l’entrée dans l’atelier d’engraissement.

Lors de cette étude, les chercheurs ont observé que les gains moyens quotidiens (GMQ) mesurés chez les animaux V1 et V2 correspondent aux objectifs de production définis pour les jeunes bovins de race charolaise (1 400 à 1 600 g/j)2, tandis que chez les V3 ils sont légèrement inférieurs à cet objectif. De même, les durées d’engraissement sont moins longues chez les V1, puis chez les V2, et enfin chez les V3 (écart de 2 mois entre V1 et V3). Cet essai indique donc que le choix du protocole de vaccination a une influence sur les performances de croissance des taurillons et que la vaccination réalisée avant le départ de l’élevage “naisseur” permet d’avoir un gain de poids significatif lors de l’engraissement.

Impact sur les lésions pulmonaires

Concernant les lésions pulmonaires (observées sur 29 animaux au moment de leur abattage), un plus grand nombre de poumons sont atteints (signes de pneumonie, de bronchopneumonie ou de pleurésie) chez les animaux vaccinés tardivement, ce qui corrobore les résultats déjà obtenus sur les impacts positifs de la vaccination réalisée avant toute contamination3 (V1).

Une morbidité similaire

À l’inverse, bien que la morbidité observée par les éleveurs (signes cliniques respiratoires identifiés par les éleveurs) était faible (20 % des animaux) dans la majorité des lots suivis et inférieure aux valeurs qui ont pu être mesurées dans de précédentes études lorsque les animaux n’étaient pas vaccinés3, elle était similaire quel que soit le protocole vaccinal. Cette absence de différence significative de morbidité entres lots peut s’expliquer, selon les auteurs, par une potentielle protection croisée entre les lots hébergés dans un même bâtiment chez un engraisseur donné, mais aussi par la subjectivité des observations des animaux “malades” faites par les éleveurs (biais selon les pratiques d’élevage, fréquence des visites et pratiques de traitement)2.

Par conséquent, cet essai suggère qu’il existe un intérêt zootechnique (GMQ, faible morbidité) à acheter des animaux vaccinés (V1). De plus, la modalité vaccinale intermédiaire (V2) apparaît moins intéressante et peut rencontrer des freins de faisabilité liés à la volatilité du négoce. Les résultats obtenus pourraient, par conséquent, permettre d’objectiver les effets positifs d’une telle pratique, afin de motiver les éleveurs pour qu’ils réalisent une vaccination précoce des broutards chez le naisseur.

1 Réseaux d’élevage, 2010, Lefol et Assie, 2013.

2 Bastien et coll., 2011 et Anon. 2016.

3 Guatteo et Assie, 2014, et Assie et coll., 2013.

Article rédigé d’après une présentation faite lors des journées 3R à Paris, les 5 et 6 décembre 2018. Mounaix B. et Brun-Lafleur L. (Institut de l’élevage, Le Rheu, Ille-et-Vilaine), Assie S. (Oniris UMR Bioepar, Nantes, Loire-Atlantique), Jozan T.(MSD Santé animale, Beaucouzé, Maine-et-Loire).

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