De nouvelles approches en matière de surveillance - La Semaine Vétérinaire n° 1797 du 10/02/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1797 du 10/02/2019

FAUNE SAUVAGE

ACTU

Auteur(s) : AMANDINE GAUTIER  

Le symposium Faune sauvage, qui s’est déroulé à VetAgro Sup, a été l’occasion de présenter l’apport de nouveaux outils de surveillance des pathogènes circulant dans la faune sauvage.

Les 1er et 2 février se tenait à VetAgro Sup le symposium Faune sauvage, qui fêtait les 10 ans de la création du réseau Vétérinaires faune sauvage1. Organisé par Emmanuelle Gilot-Fromont, enseignante-chercheuse à VetAgro Sup, et Élodie Monchâtre, directrice du Laboratoire de la rage et de la faune sauvage de Nancy (Meurthe-et-Moselle), il réunissait de nombreux acteurs, tels que l’ONCFS, l’Inra, la Tour du Valat, l’ENSV2, l’Institut Pasteur, les écoles nationales vétérinaires de Nantes (Loire-Atlantique) et de Toulouse (Haute-Garonne), ou encore des vétérinaires praticiens. Avec 70 % des maladies infectieuses provenant de la faune sauvage, cette dernière requiert toute l’attention des chercheurs et des pouvoirs publics, au titre de la santé humaine (exemple du virus Zika), de celle des animaux domestiques (le virus Schmallenberg a envahi l’Europe en deux ans), mais aussi pour elle-même, confrontée à des phénomènes d’extinction. De plus, actuellement, les mutations sociales, à l’instar des mobilités, ne peuvent être ignorées, comme le montre l’épisode de peste porcine africaine. Dans ce contexte, de nouvelles approches pour la surveillance des maladies infectieuses se sont développées depuis les années 2010 et élargissent le champ des possibles en matière de santé publique.

Un suivi en temps réel

Ces dernières années, une révolution s’est opérée en matière de surveillance. Jusque-là, seul un petit nombre de pathogènes connus étaient surveillés et la génétique permettait de reconstituer a posteriori la dynamique spatiale et temporelle des maladies. Mais les crises sanitaires sont imprédictibles et savoir ce qui s’est passé avant ne renseigne pas de manière satisfaisante sur ce qui se passera ensuite. De plus, auparavant, seuls les services administratifs exerçaient cette surveillance. Désormais, elle est opérée sur de nombreux pathogènes en même temps, y compris ceux qui ne sont pas connus. Leur dynamique est suivie en temps réel, grâce à de nouveaux outils, tels que les séquenceurs de poche. En extrayant l’ADN d’un taon ou d’autres insectes hématophages, il est possible de savoir de quoi l’animal s’est nourri et dans quelles conditions. La surveillance du virus Ebola en temps réel permet, par exemple, de prendre des mesures concrètes sur le transport d’animaux. Au final, les délais entre la surveillance et l’action sont diminués.

Les sciences participatives à la rescousse

Les citoyens peuvent être également impliqués dans la surveillance, participer à des collectes et pallier les équipes scientifiques limitées. À titre d’exemple, l’application Citique a fourni aux chercheurs plus de 14 000 signalements de piqûres de tiques sur des animaux sauvages, domestiques et sur des humains, et abouti à une collecte de 4 000 tiques pour les laboratoires. Les réseaux sociaux permettent de faire de l’épidémiologie participative ou encore de la recherche à partir des données disponibles. Dans le second cas, il s’agit d’une surveillance dite passive qui consiste à réaliser du data mining, en repérant des mots-clés tels que “grippe” ou “dengue” sur Twitter. Ces méthodes posent de nouvelles questions aux chercheurs qui veulent maintenir la participation des citoyens : comment animer ces plateformes ? Comment assurer les retours vers les citoyens, alors que le temps de la recherche ne s’accorde pas nécessairement avec celui de l’éleveur ou du naturaliste ?

1 Le VFS apporte une expertise pluridisciplinaire dans le domaine de la santé de la faune sauvage.

2 Office national de la chasse et de la faune sauvage, Institut national de la recherche agronomique, Institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes, École nationale des services vétérinaires.

LES VÉTÉRINAIRES AUX AVANT-POSTES

Le symposium a mis en évidence la part importante des compétences des vétérinaires en lien avec la biodiversité et la faune sauvage. Si l’histoire des maladies infectieuses montre les liens tenaces entre santé animale et santé humaine, et que beaucoup de maladies sont partagées par les hommes et les animaux, les jeunes vétérinaires ne prennent pas la place qu’ils pourraient prendre, selon Jean-François Cosse, vétérinaire, écologue et chercheur à l’Institut national de la recherche agronomique. Or d’après lui, « on est aussi légitimes, vétérinaires, que les médecins ». Aussi, par l’investigation de la faune sauvage mais aussi par des mesures de lutte encadrées et le renforcement de celles de biosécurité, les vétérinaires sont les acteurs à l’interface entre la faune domestique et la faune sauvage.

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