Traitements alternatifs utilisés en élevage poulet de chair bio - La Semaine Vétérinaire n° 1796 du 03/02/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1796 du 03/02/2019

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : TANIT HALFON 

En élevage biologique, le cahier des charges recommande d’utiliser en priorité les thérapies non conventionnelles (phytothérapie, homéopathie et oligoéléments). Hormis la vaccination et les antiparasitaires, un seul traitement à base de médicaments vétérinaires allopathiques chimiques de synthèse ou d’antibiotiques est autorisé à des fins curatives pour les animaux à « cycle de vie productive inférieur à 1 an » (règlement n° 889/2008). C’est pour comprendre ces spécificités et identifier les éléments visant à maîtriser la santé dans ces élevages qu’une enquête épidémiologique a été menée entre janvier 2014 et avril 2015 auprès d’un échantillon représentatif de 85 éleveurs volontaires de poulets de chair biologiques1, dont 70 appartenant à une organisation de production et 15 à des éleveurs indépendants.

Deux visites d’élevage

L’objectif était triple : établir un état des lieux de l’utilisation des traitements alternatifs, décrire l’état de santé et de bien-être des animaux et identifier les conditions d’élevage influençant cet état pour pouvoir proposer aux éleveurs des mesures préventives. À ces fins, un questionnaire a permi de récolter des informations sur l’exploitation, les pratiques d’élevage, les données sanitaires et les traitements utilisés. L’unité épidémiologique était un lot par élevage. Deux visites, réalisées à 3 semaines (avant la sortie sur le parcours) et 11 semaines d’âge, ont permis de suivre un lot de poulets pour évaluer le bien-être des animaux, leur atteinte parasitaire, et l’état du bâtiment d’élevage. Dans cet article, seuls les résultats des traitements alternatifs sont présentés2.

Un usage préventif majoritaire

62 produits différents ont été recensés et employés dans 70 lots, 15 lots n’en ayant reçu aucun. Dans 60 lots, 160 utilisations de produits ont été faites à titre préventif, à raison d’une ou deux en cours d’élevage pour la moitié d’entre eux. 43 produits ont été employés à titre curatif dans 29 lots, avec essentiellement un seul produit curatif utilisé en cours d’élevage. Au total, ce sont près de 80 % des usages qui se font à titre préventif. Aucune différence dans la fréquence d’utilisation des produits n’a été notée entre les éleveurs indépendants et ceux appartenant à des groupements d’élevage.

Des produits simples et des mélanges

Un classement des produits en neuf familles a été réalisé (figure du haut de la page) : extraits de plantes, aromathérapie, homéopathie, oligoéléments et minéraux, vitamines de synthèse, probiotiques, acides organiques, traitements conventionnels et biocides. Chaque produit n’étant pas toujours composé d’une seule famille, des catégories selon le nombre de familles ont été créées : “simple” pour les produits composés d’une seule famille, “complexe 2” pour ceux comprenant deux familles, etc. Ainsi, presque la moitié des 62 produits employés sont simples. La phytothérapie arrive en tête : 75,8 % des produits utilisés par les éleveurs sont à base de plantes, parmi lesquels 48,4 % sont à base d’huiles essentielles et 27,4 % d’extraits de plantes.

Sur l’ensemble, 41,2 % contiennent des oligoéléments et des minéraux.

Aromathérapie et oligoéléments, un duo gagnant

Que ce soit en préventif ou en curatif, les familles aromathérapie et oligoéléments/minéraux sont les plus utilisées. Les principaux motifs sont la croissance et l’ossification (24,6 %), la lutte contre les vers (23,6 %) et contre les entérites (16,2 %), le premier motif constituant l’allégation la plus fréquemment indiquée par les fabricants : croissance, démarrage et ossification (63 %). à noter que 32 éleveurs ont signalé avoir connu un problème sanitaire lors de la période d’enquête, avec seulement 6 d’entre eux qui, en dernier recours, ont fait usage de produits conventionnels (5 antibiotiques et 1 anticoccidien). Les antibiotiques ont servi à traiter 2 entérites nécrotiques, 2 arthrites à Staphyloccoccus et 1 syndrome respiratoire ayant entraîné la mort de l’animal. Un recours fréquent à la vaccination contre les coccidioses au couvoir (74/85 lots) est également observé.

Face à la place essentielle de la phytothérapie dans la gestion de ces élevages et au nombre restreint de spécialités vétérinaires à base de plantes disposant actuellement d’une autorisation de mise sur le marché, ces résultats légitiment, pour les auteurs de l’étude, la clarification du statut juridique de ces produits et la création d’un observatoire des pratiques d’usage des plantes, afin de collecter les informations des utilisateurs des produits non commercialisés en tant que médicaments vétérinaires.

1 Exploitations de plus de 250 animaux.

2 L’article de La Semaine Vétérinaire n° 1795 du 8/2/2019, pages 30 et 31, a présenté les résultats de l’état de santé et de bien-être des lots.

Sophie Le Bouquin, Rozenn Souillard Chercheuses à l’Anses. Article rédigé d’après une présentation faite lors des journées de la recherche avicole et palmipèdes à foie gras à Tours (Indre-et-Loire), en 2017.

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