Qu’attendez-vous de la loi résultant des États généraux de l’alimentation ? - La Semaine Vétérinaire n° 1794 du 19/01/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1794 du 19/01/2019

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Auteur(s) : CHANTAL BÉRAUD 

SES PRINCIPES S’INSCRIRONT-ILS DANS LA RÉALITÉ ?

Pour les praticiens libéraux, il en résulte surtout que si les éleveurs parviennent à mieux valoriser le prix de vente de leurs produits, ils seront vraisemblablement plus enclins à davantage investir dans la prévention ou le suivi de leur cheptel. Tout l’enjeu, c’est de voir comment les grands principes de cette loi vont maintenant être appliqués par le marché ou non ! On ne peut malheureusement pas attendre que cette loi efface toutes les difficultés des éleveurs (aléas climatiques, revenu)… Toutefois, les vétérinaires pourraient les aider à s’adapter aux changements, avec notamment du conseil en matière d’alimentation. Il faudrait que notre profession agisse dans une relation plus synergique avec les autres acteurs du monde de l’élevage, ou en développant leurs entreprises en y intégrant des profils d’employés aux compétences variées. Enfin, j’ai aussi un regret : que la possibilité1 de promouvoir auprès des détenteurs d’animaux les solutions alternatives aux traitements curatifs (antibiotiques en particulier) n’ait pas été retenue dans ce texte.

1 L’article 87 de la loi, qui visait à autoriser la publicité pour des vaccins vétérinaires à destination des éleveurs, a été censuré par le Conseil constitutionnel, qui l’a considéré comme étant un cavalier législatif (décision n° 2018-771 DC du 25 octobre 2018).
LAURENT PERRIN

DES EXPÉRIMENTATIONS INTÉRESSANTES SUR L’ABATTAGE

En tant que président de la commission bien-être animal (BEA) de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), je pense que le sujet des abattoirs est important. L’article 71 lance, sur la base du volontariat et à titre expérimental pour deux ans, l’installation de la vidéosurveillance sur les postes de la mise à mort et de la saignée. Mais ce sont des postes de travail mal valorisés, pour lesquels le recrutement est difficile. Il faut donc faire attention à ne pas ostraciser le personnel. Croyant en la vertu de l’observation et du dialogue, je ne suis donc pas déçu par ce qui a été décidé. De nombreux abattoirs devraient s’impliquer dans cette expérimentation, car elle répond à une demande des consommateurs. Par ailleurs, l’article 73 concerne l’expérimentation de l’abattage mobile durant trois ans et demi, pour en évaluer tant l’impact sur le BEA que la viabilité économique. Ce sera vraisemblablement une possibilité choisie par certains éleveurs, et ce pourrait aussi être une solution intéressante pour des animaux accidentés. Cela permettrait en partie de répondre à la raréfaction des abattoirs en gros animaux, en diminuant, via des circuits courts, les problèmes liés au stress, aux temps de transport et d’attente des animaux à abattre.


FRANÇOIS COUROUBLE

IL NE FAUT PAS TOUT ATTENDRE DE LA LOI

Ces États généraux de l’alimentation étaient porteurs d’espoir, avec une participation citoyenne exceptionnelle. Mais pour les ONG de protection animale, dont l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (OABA), la loi qui en résulte n’a pas répondu aux attentes. Les députés ont majoritairement rejeté des amendements qui auraient pu améliorer le bien-être des animaux en élevage et la bientraitance en abattoir. C’est donc un rendez-vous manqué pour la protection animale. Quant au contrôle vidéo, il a été sauvé grâce à un amendement de repli mettant en place une expérimentation de deux ans sur la base du volontariat. On est loin de l’obligation de la vidéo de la proposition de loi Falorni, adoptée en janvier 2017 par l’Assemblée nationale (mais qui n’a pas connu de suite législative). Heureusement, d’autres évolutions ont été annoncées par la grande distribution. Ainsi, le groupe Casino a instauré un étiquetage “bien-être animal” (BEA), qui impose la vidéo, à l’initiative de l’OABA, de CIWF1 et de LFDA2. Puis le groupe Carrefour a décidé d’auditer ses abattoirs fournisseurs, selon un référentiel de protection animale qui impose la vidéo de contrôle. 84 audits seront réalisés avant fin 2019 par un organisme indépendant, le Bureau Veritas. Le cahier des charges et la formation des auditeurs du Bureau Veritas sont assurés par l’OABA.

1 Compassion in World Farming.
2 La Fondation droit animal, éthique et sciences.
JEAN-PIERRE KIEFFER
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