La digestion des fibres - La Semaine Vétérinaire n° 1794 du 19/01/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1794 du 19/01/2019

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : CHANTAL BÉRAUD 

Bien qu’il ne produise aucune enzyme pour dégrader les fibres, également appelées parois végétales ou glucides pariétaux, le cheval peut se nourrir exclusivement de fourrages. De fait, ces glucides pariétaux arrivent pratiquement non dégradés dans le gros intestin. Leur digestion repose donc exclusivement sur les micro-organismes présents, qui ont la capacité de les hydrolyser, puis de les fermenter. La majorité des digesta atteignent le cæcum dans les 3 heures suivant l’ingestion, y demeurent entre 1 heure et demie et 5 heures, puis ont un temps de séjour dans le gros intestin de l’ordre de 20 à 48 heures.

Des milliers d’espèces bactériennes inconnues

Le gros intestin héberge de nombreux micro-organismes, parmi lesquels des bactéries, des protozoaires, des champignons, des archées et des bactériophages (virus). Ces micro-organismes interagissent entre eux, mais aussi avec leur environnement, faisant du gros intestin un écosystème complexe. D’autant plus qu’une étude récente, menée par l’équipe de recherche de Lab to Field à Dijon (Côtes-d’Or), a révélé que 98 % des espèces bactériennes sont encore inconnues à ce jour. Il a été cependant montré que ce sont les bactéries fibrolytiques dont il convient de prendre le plus grand soin, car elles jouent un rôle primordial dans le soutien du fonctionnement de tout l’écosystème du gros intestin.

Ensuite, les principaux acides gras à chaîne courte (AGCC) produits par la fermentation bactérienne sont l’acétate (environ 73 % des AGCC produits), le propionate (18 %), le butyrate (6 %), le valérate, l’isovalérate et l’isobutyrate. Très peu de lactate est, en revanche, produit lorsqu’un cheval ingère un régime riche en fibres. C’est l’absorption de ces AGCC par les parois intestinales du cæcum et du colon qui fournit 60 à 70 % de l’énergie d’un cheval nourri de cette façon.

Attention à l’amidon

Lorsqu’une grosse quantité d’amidon est ingérée, il n’est pas entièrement digéré dans l’estomac et l’intestin grêle des chevaux. Une fraction résiduelle arrive donc dans le gros intestin. C’est pourquoi il a été établi que la quantité d’amidon à ne pas dépasser est de 2 g/kg de poids vif (PV) par repas. Des études recommandent même de se limiter à 1 g/kg PV par repas. Il est donc essentiel de calculer les quantités d’amidon des différentes matières premières utilisées dans la formulation d’un concentré.

Un besoin d’études complémentaires

Des études complémentaires seraient nécessaires pour déterminer le ratio fibres solubles/insolubles optimal qui permettrait d’augmenter la dégradation microbienne des fibres totales, et notamment des parois cellulaires secondaires. La pulpe de betterave sucrière est, par exemple, riche en de telles fibres solubles. Par ailleurs, des études supplémentaires seraient également nécessaires pour vérifier l’impact de la quantité/qualité de protéines de la ration sur l’activité fibrolytique dans le gros intestin.

Du foin broyé, en granulé, en cubes, haché ou en brin long ?

Il semblerait que réduire la taille de particules de foin causerait une diminution de l’activité microbienne fibrolytique, mais elle serait compensée par une augmentation du temps de rétention dans le gros intestin, permettant une digestibilité des fibres tout aussi efficace. Conséquemment, il pourrait donc être envisageable d’apporter des aliments fibreux sous forme de particules réduites (par exemple, pour nourrir des chevaux ayant des problèmes dentaires).

Article rédigé d’après la présentation faite lors du congrès Lab to Field à Dijon (Côte-d’Or), en novembre 2018, et l’interview de Pauline Grimm, experte en physiologie de la digestion du cheval, ingénieure de recherche à Lab to Field.

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