Un risque de suicide accru chez les praticiennes, et en canine

Menée, notamment, avec des données de l’American Veterinary Medical Association (AVMA), une étude américaine¹ a comptabilisé 398 mortalités par suicide chez les 11 620 vétérinaires décédés qu’elle a inclus, soit 3 %. Elles concernent 82 % d’hommes. Toutefois, cette proportion est amenée à évoluer, car le taux de suicide est plus élevé chez les femmes. Il est en effet 3,5 fois plus important que dans la population générale, contre 2,1 fois chez les messieurs. De plus, alors qu’au début des années 1980 les hommes vétérinaires étaient largement majoritaires, les femmes représentaient 60 % des vétérinaires en 2017, et 80 % des étudiants intégrant une école vétérinaire en 2016. Ainsi, malgré un pourcentage de suicide féminin stable de 2000 à 2015, le nombre de défunts augmente, en raison du nombre croissant de femmes vétérinaires. Enfin, le suicide concerne des femmes jeunes. En effet, près des deux tiers d’entre elles (63 %) sont passées à l’acte entre 25 et 45 ans (âge moyen de 42 ans), alors que 45 % des hommes avaient entre 45 et 64 ans (âge moyen de 57 ans). La tendance pourrait ainsi s’amplifier dans les années à venir.

Un tempérament prédisposant ?

Plusieurs enquêtes révèlent que les facteurs de risque de suicide sont plus importants chez les vétérinaires que dans la population générale. Par exemple, 66 % des 701 vétérinaires interrogés en 2012 en Alabama ont rapporté souffrir de dépression et 24 %, avoir envisagé de mettre fin à leurs jours. Une enquête menée en 2014, avec 11 627 praticiens, montre que 31 % avaient vécu des épisodes dépressifs et 17 % avaient pensé au suicide depuis qu’ils avaient quitté l’école vétérinaire. De plus, les femmes auraient plus souvent des idées suicidaires.

D’après l’étude, la sélection d’étudiants ayant certains traits de personnalité liés à un risque plus important de développement d’anxiété et de dépression, comme le perfectionnisme, nécessaire à la réussite du concours, favoriserait également le développement des troubles psychologiques et des idées suicidaires lors d’un haut niveau de stress.

Ainsi, 79 % des vétérinaires ayant mis fin à leurs jours exerçaient en clinique, exclusivement ou principalement canine pour la majorité d’entre eux, ce qui pourrait être dû au stress des horaires de travail, des attentes des clients, des difficultés économiques, du manque de soutien, etc.

La prévention nécessaire

Enfin, 45 % des vétérinaires se sont suicidés en se servant d’une arme à feu et 39 %, de substances pharmaceutiques. Parmi les autres méthodes (16 %) figurent la pendaison, l’inhalation de gaz et la noyade. 51 % des hommes sont décédés par arme à feu, alors que 64 % des femmes ont utilisé des produits pharmaceutiques. Les praticiens en clinique sont également plus nombreux à avoir usé de médicaments.

La connaissance et la facilité d’accès aux produits euthanasiants, et le fait d’être souvent confronté à l’euthanasie, considérée comme une méthode acceptable pour arrêter les souffrances chez les animaux, pourraient réduire la peur des vétérinaires face au passage à l’acte.

Le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) souhaite mettre en place des stratégies pour limiter le suicide chez les vétérinaires, comme des aides économiques, la limitation de l’accès aux produits euthanasiants, l’identification et l’aide des personnes à risque, etc. Un partenariat pourrait être créé dans ce sens entre les associations médicales, des experts en prévention du suicide, l’AVMA, d’autres associations vétérinaires et les écoles vétérinaires.
•

¹ Tomasi S. E., Fechter-Leggett E. D., Edwards N. T. et coll. Suicide among veterinarians in the United States from 1979 through 2015. J. Am. Vet. Med. Assoc. 2019;254:104-112.