Nouveautés et fondamentaux en matière de paratuberculose - La Semaine Vétérinaire n° 1792 du 06/01/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1792 du 06/01/2019

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE 

à ce jour, en France, la prévalence intercheptels de la paratuberculose est assez bien connue dans le Grand Ouest, avec, selon les données recueillies par les groupements de défense sanitaire (GDS), 50 à 80 % des élevages infectés à différents niveaux par le bacille de la paratuberculose Mycobacterium avium partuberculosis (MAP).

Des signes indirects

Cependant, malgré cette forte prévalence, des signes cliniques sont assez rarement observés (chez seulement 1 à 2 % des adultes, chaque année, dans les élevages les plus infectés), car les éleveurs réforment souvent les animaux avant. Les pertes occasionnées sont par conséquent essentiellement indirectes : diminution de la production laitière (environ 1,5 l par vache et par jour de lactation), baisse de l’efficacité alimentaire, réformes prématurées et réduction de la fertilité.

Des plans de maîtrise globaux

Les plans de prévention et de lutte actuels contre la paratuberculose s’articulent autour d’un dépistage sérologique, d’une élimination des animaux testés positifs et de la mise en place de mesures d’hygiène. Cependant, ces solutions sont insuffisantes pour éliminer la maladie si elles sont prises seules. Selon notre confrère Éric Meens, l’unique stratégie efficace consiste en une approche globale qui repose sur sept points clés. Il convient tout d’abord d’améliorer les capacités de renouvellement du cheptel pour permettre la réforme des animaux dépistés positifs en redonnant de la longévité aux vaches.

Importance de la biosécurité externe et interne

Par ailleurs, selon lui, il est indispensable de maîtriser la biosécurité externe de l’élevage, car la paratuberculose est principalement une maladie d’achat. En effet, du fait de la prévalence intercheptels élevée et de la faible sensibilité des tests sérologiques Elisa, l’introduction de bovins infectés est fréquente (faibles excréteurs ou infectés latents). Pour s’en prémunir, il convient donc de classer les cheptels suivant leur niveau de risque (indicateurs du GDS). Ainsi, par exemple, dans le département de la Seine-Maritime, le GDS estime qu’environ 25 % des élevages laitiers peuvent être considérés comme à risque élevé. Sans statut de troupeau, la recommandation est de réaliser, sur les bovins de plus de 24 mois, une sérologie individuelle suivie d’une PCR sur fèces si la sérologie est négative et, chez les jeunes, seulement une polymerase chain reaction (PCR). Dans le même temps, Éric Meens insiste sur l’importance de réduire au maximum la contamination de l’environnement. Au sein de l’élevage, des dépistages doivent être réalisés régulièrement afin de pouvoir réformer rapidement (sous 30 jours) les animaux super-excréteurs (sérologie fortement positive) et, dans un deuxième temps, les autres bovins séropositifs (90 jours). Pour identifier les super-excréteurs, la sérologie (individuelle ou de mélange de 10 avec reprise en sérologie individuelle des mélanges positifs sur le sang) est, à ce jour, la méthode la plus sensible. Pour limiter l’émergence de super-excréteurs, il est nécessaire d’associer aux plans de maîtrise des mesures nutritionnelles (prévention de l’immunodépression et de l’inflammation chronique) grâce à une bonne gestion du péripartum notamment. Le conférencier rappelle aussi l’importance de protéger les veaux de toute contamination potentielle en agissant sur les différents niveaux de contamination possible (in utero, lors du vêlage, via l’environnement, par le colostrum et le lait). Pour cela, il est en particulier recommandé d’écarter du reste de l’élevage, dès la naissance, les veaux nés de mères séropositives, mais aussi de protéger les sujets sains, issus de mères porteuses du germe de paratuberculose, de toute contamination : mise en place de “boîte à câlins” ou, si la concentration bactérienne est faible, en pasteurisant le colostrum (1 heures à 60 °C) et le lait (à 65 °C). Enfin, la paratuberculose est une maladie encore trop méconnue des éleveurs, sur laquelle les vétérinaires devront accentuer leurs efforts d’information.

Une maladie zoonotique ?

La mise en place de tels plans de maîtrise est d’autant plus importante actuellement que de nouveaux travaux de recherche laissent à penser que la maladie pourrait être zoonotique. En effet, les travaux de McNees1 de 2017 révèlent la présence de mycobacterium avium spp. paratuberculosis (MAP)chez 100 % des animaux atteints de la maladie de Crohn (PCR), tandis qu’aucun des 217 témoins n’était porteur. D’autres enquêtes devront encore être menées pour confirmer ces résultats.

Vers de nouvelles mesures

Toutefois, comme l’a conclu le conférencier, même si de telles mesures d’éradication sont adoptées par certains éleveurs, il serait essentiel de rendre la lutte concertée et généralisée. Pour cela, un nouveau classement de la maladie – depuis 2010 en catégorie 3 (actions volontaires d’initiative professionnelle uniquement) –, par l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), est nécessaire. De même, des études sont menées actuellement en recherche génomique (GDS, Inra, Allice, Oniris) pour la sélection d’animaux plus résistants.

1 McNees A. L., Zayyani N. R., Markesich D. et coll. Mycobacteriuml avium spp. paratuberculosis (MAP) can be reliably detected and cultured from peripherical blood of 100 % of patients with recent onset Crohn’s disease ». Gastroenterology. 1er avril 2017;152(5).

Éric Meens Vétérinaire, GDMA 76. Article rédigé d’après une présentation faite aux journées nationales des GTV à Nantes (Loire-Atlantique), du 16 au 18 mai 2018.

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