Analyse de l’air exhalé et diagnostic d’une inflammation des voies respiratoires profondes - La Semaine Vétérinaire n° 1792 du 06/01/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1792 du 06/01/2019

ÉTUDE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : ANNE COUROUCÉ 

Les maladies inflammatoires desvoies respiratoires profondes (MIVRP) non-infectieuses regroupent trois entités principales chez le cheval : la MIVRP ou asthme équin modéré, le syndrome d’inflammation trachéale (syndrome of tracheal inflammation ou STI) et l’hémorragie pulmonaire induite à l’exercice (HPI).

Le diagnostic de ces diverses affections repose sur la réalisation d’une endoscopie et/ou de prélèvements respiratoires, comme un lavage trachéal et/ou broncho-alvéolaire, et donc d’examens invasifs pour le cheval.

Chez l’homme, en recherche biomédicale, l’analyse de biomarqueurs dans le condensat de l’air expiré (CAE) est utilisée comme méthode non invasive pour l’évaluation directe du poumon. Par exemple, une acidification du CAE a été mise en évidence chez l’homme atteint d’affection des voies respiratoires profondes. De même, la concentration de H2O2 a été corrélée avec la sévérité et la réponse au traitement de l’asthme.

La question est donc la suivante : est-ce possible et réalisable chez le cheval ?

Pour répondre à cette question, l’équipe de Hugues et coll. à l’université Charles Sturt, en Australie, a utilisé un système de masque permettant la collecte de la condensation de l’air expiré. Des valves de non-retour à la sortie de la chambre de condensation permettaient d’éviter la contamination de l’air par celui de l’environnement.

Matériels et méthodes

Un total de 47 chevaux ont été utilisés : 27 chevaux présentés dans leur clinique pour problème respiratoire ou contre-performance et 20 chevaux ne présentant aucun symptôme respiratoire, provenant du cheptel de recherche de l’université.

La collection de condensat de l’air expiré a été effectuée et analysée pour déterminer le pH, la concentration en peroxyde d’hydrogène (H2O2) et de leucotriène B4 ou LTB4 (eicosanoid pro-inflammatoire). Les animaux ont été tranquillisés et ont reçu des examens complémentaires :

- une endoscopie pour grader la quantité de mucus dans la trachée,

- un lavage trachéal pour analyse cytologique,

- un lavage broncho-alvéolaire pour analyse cytologique.

Les animaux ont ensuite été répartis en groupes en fonction des résultats cliniques, endoscopiques et de critères cytologiques.

Les sujets étaient considérés comme présentant :

- de l’asthme équin modéré (MIVRP), lorsqu’étaient observés des neutrophiles ≥ 10 %, des mastocytes ≥ 5 % et des éosinophiles ≥ 5 % ;

- une hémorragie pulmonaire induite à l’exercice (HPIE), lorsque le grade endoscopique était supérieur à 1 et/ou que le cheval présentait plus de 20 % d’hémosidérophages dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire ;

- un STI, avec un score ≥ 6/9 (calculé à partir du score de mucus trachéal, de la densité de cellules et de la proportion de neutrophiles dans le lavage trachéal).

Les chevaux étaient également inclus dans un groupe plus large de maladie des voies respiratoires profondes (MVRP), lorsqu’ils présentaient une combinaison de ces différentes affections.

Résultats et discussion

Parmi les 47 chevaux inclus dans l’étude, 23 présentaient une MIVRP, 15 une HPIE et 9 un STI. Un total de 32 chevaux ont été inclus dans le groupe des MVRP avec 6 chevaux présentant à la fois une MIVRP et une HPIE.

Les résultats de cette étude mettent en évidence que la concentration en H2O2 et le pH étaient plus élevés chez les chevaux atteints d’une MVRP. Ces deux paramètres montraient une corrélation positive avec le pourcentage de neutrophiles dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire, alors que LTB4 présentait une corrélation positive avec le pourcentage d’éosinophiles. Les mastocytes étaient, pour leur part, associés négativement avec le pH.

Ces biomarqueurs mesurés de façon non-invasive dans le condensat de l’air exhalé pourraient donc être des indicateurs intéressants pour évaluer le type de maladie inflammatoire présenté par les chevaux et obtenir des informations quant à la pathophysiologie, la progression ou la réponse au traitement de ces différentes affections respiratoires.

Deux points délicats auxquels il convient de faire attention sont les paramètres environnementaux et méthodologiques qui peuvent influencer ces biomarqueurs. Il est donc important de bien standardiser la méthode de collection et d’analyse des échantillons.

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