Les ulcères de la portion glandulaire de l’estomac Partie   2 : éthiopathogénie des ulcères glandulaires - La Semaine Vétérinaire n° 1788 du 30/11/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1788 du 30/11/2018

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : ANNE COUROUCÉ  

Étiopathogénie des ulcères glandulaires

Il est très probable qu’il n’existe pas une seule étiopathogénie pour les ulcères gastriques glandulaires (UGG). L’anatomie et la physiologie des régions pyloriques et fundiques sont différentes et la réponse au traitement le sera elle aussi. Un pH bas de façon permanente peut causer des dommages sur la muqueuse et inhiber sa cicatrisation. Le stress peut influencer la production de gastrine et l’apport de sang à la muqueuse glandulaire et être un facteur d’initiation et de maintien de ces ulcères.

Les lésions glandulaires sont généralement inflammatoires et contiennent des neutrophiles, des lymphocytes et des cellules plasmatiques. La majorité d’entre elles sont lymphoplasmocytiques, avec également une composante éosinophilique et neutrophilique.

Il n’existe pas de preuve de l’implication des bactéries dans la pathogénie des UGG. Helicobacter pylori est impliqué chez l’homme, mais n’a jamais été mis en évidence chez le cheval. D’autres bactéries, comme Escherichia fergusonii, Streptococcus bovis et Enterococcus faecium, sont potentiellement pathogènes et ont été retrouvées en association avec des UGG. Toutefois, leur pathogénicité n’est pas totalement prouvée. Les enzymes mucolytiques produisant des bactéries peuvent contribuer à une détérioration de la barrière protectrice dans certaines espèces. Néanmoins, leur rôle n’est pas connu chez le cheval.

Il est peu probable que les bactéries aient un rôle primaire dans le développement des UGG, même si certaines espèces ont la capacité de coloniser et d’endommager la muqueuse et de ralentir sa cicatrisation.

Quels signes cliniques pour les ulcères glandulaires ?

Le syndrome des ulcères gastriques équin a été associé avec une grande variété de signes cliniques chez les chevaux adultes. Malheureusement, il existe, à ce jour, peu d’évidence scientifique de l’association entre des signes cliniques d’ulcères et la présence réelle de lésions dans l’estomac des chevaux visibles à la gastroscopie. La plupart des signes cliniques sont peu spécifiques et souvent subjectifs ; il arrive même que certains chevaux n’en présentent pas. De plus, les chevaux atteints d’UGG et d’ulcères gastriques non glandulaires (UGNG) présenteront des signes cliniques différents.

Les signes cliniques associés aux UGG sont multiples (encadré).

Modifications du tempérament

Les changements de tempérament peuvent être une manifestation de stress. Il a été récemment montré que les chevaux présentant des ulcères gastriques glandulaires ont des taux de cortisol plus élevé en réponse à un nouveau stimulus, suggérant que ces chevaux seraient plus sensibles au stress. Les changements de tempérament de ces chevaux seraient donc plutôt une cause pour les ulcères gastriques qu’un effet. C’est le cas également chez l’homme présentant des ulcères peptiques.

Coliques

La douleur gastrique est bien décrite chez l’homme et est définie comme une douleur localisée due à l’acidité gastrique. La nature de la douleur varie en fonction de la cause sous-jacente (reflux gastro-œsophagien, gastrite ou ulcères peptiques). Il est probable que les chevaux avec des ulcères gastriques glandulaires éprouvent une douleur comparable.

Par ailleurs, les coliques causées par d’autres affections gastro-intestinales peuvent augmenter le risque de survenue d’ulcères glandulaires chez les chevaux, avec probablement des mécanismes comme une acidité secondaire à une alimentation intermittente, un défaut de vidange gastrique et un reflux biliaire.

Appétit diminué, perte de poids inexpliquée

Un appétit réduit et une perte de poids sont souvent reliés à la présence d’ulcères gastriques. Néanmoins, la relation entre la cause et l’effet n’est pas forcément très claire. En effet, chez l’homme, la douleur épigastrique postprandriale est bien décrite lors d’ulcères. Cela peut causer une perte de poids du fait de la douleur ressentie en mangeant qui induit ainsi une crainte de manger. Il semblerait logique qu’un mécanisme similaire existe chez le cheval et explique une prise alimentaire modifiée et une perte d’état. Il n’est pas exceptionnel non plus que ces chevaux remangent normalement quelques jours après la mise en place du traitement. Il a également été suggéré que certaines lésions glandulaires soient la manifestation d’une maladie intestinale inflammatoire et que la perte de poids soit donc une conséquence d’une maladie gastro-intestinale plus généralisée.

Contre-performance

Une baisse de performance a longtemps été associée avec la présence d’ulcères gastriques chez le cheval. Il reste néanmoins à définir quel type d’ulcères a un impact sur la performance et pourquoi. Lors d’UGG, il apparaît que cela se manifeste par des modifications de comportement lorsque le cheval est monté, avec notamment une réticence au travail. Le mécanisme exact n’est pas connu, mais il est fort probable que cela soit dû à l’existence d’une douleur épigastrique.

Sensibilité cutanée

Le signe clinique le plus intrigant est la sensibilité cutanée chez des chevaux présentant des UGG. Les propriétaires rapportent que les chevaux affectés sont réactifs lors du sanglage, du pansage ou lors de l’utilisation des aides à la monte. Les chevaux peuvent également être vus en train de se mordre les flancs. L’explication la plus plausible serait l’existence d’un réflexe viscérosomatique (douleur projetée) pour laquelle un stimulus viscéral dans l’estomac produirait une activité réflexe et une hyperesthésie reliée à des structures somatiques telles que la peau. Par ailleurs, des signaux afférents provenant de la peau via les nerfs thoraciques 6 à 9 peuvent être affectés par des afférences viscérales et mal interprétés dans le cerveau.

Pour en savoir plus :

- Rendle, D. I., Bowen, I. M., Brazil et coll. EGGD consensus statement. Recommendations for the management of equine glandular gastric disease. UK Vet. Equine. 2018:2;1-12. bit.ly/2B7fwnE.

- Hepburn R. J. Endoscopic examination of squamous and glandular gastric mucosa in sport and leisure horses: 684 horses (2005-2011). In: proceedings of the 11th International Equine Colic Research Symposium. p. 5. 2014.

- Luthersson N., Nielsen K. H., Harris P., Parkin T. D. The prevalence and anatomical distribution of equine gastric ulceration syndrome (EGUS) in 201 horses in Denmark. Equine Vet. J. 2009:41;619-624.

LES SIGNES CLINIQUES

Tim Brazil DMV, diplomate Eceim.


• Changement dans leur tempérament (incluant la nervosité et l’agressivité).

• Coliques aiguës et chroniques (avec des manifestations d’inconfort abdominal souvent postprandial).

• Appétit diminué, perte de poids inexpliquée.

• Contre-performance et modification de comportement lorsque le cheval est monté (incluant une baisse de l’envie de travailler).

• Sensibilité cutanée (se mordre les flancs ou réaction au sanglage, lors du pansage, lors de l’utilisation des aides, etc.).

Michael Hewetson DMV, diplomate Eceim.

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