Cryptosporidium hominis excrété par des veaux asymptomatiques en France - La Semaine Vétérinaire n° 1781 du 11/10/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1781 du 11/10/2018

PARASITOLOGIE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : KARIM ADJOU  

La cryptosporidiose est une infection néonatale des jeunes ruminants (bovins, caprins et ovins) caractérisée par une diarrhée aiguë d’aspect variable (muqueuse jaune pâle à aqueuse profuse) associée à de la dépression, de l’anorexie et des douleurs abdominales (photo du centre et droite). L’agent étiologique le plus souvent responsable est un protozoaire : Cryptosporidium parvum dont les oocystes (photo de gauche), formes résistantes du parasite dans le milieu extérieur, sont sporulées et directement infectantes pour un autre animal. L’infection d’un animal à l’autre se fait par voie oro-fécale, avec une possibilité d’infection croisée entre les bovins, les caprins et les ovins, lors du partage des locaux ou de pâturage. Les cryptosporidies (C. parvum) peuvent aussi être transmises à l’homme.

Une équipe travaillant sur les cryptosporidies au centre hospitalier universitaire de Rouen (Seine-Maritime) vient de publier les résultats d’une enquête1 portant sur des veaux de 44 exploitations françaises. Cette dernière tente de déterminer si ces animaux sont porteurs de cryptosporidies et quelles sous espèces ils hébergent. L’étude, effectuée dans des exploitations tirées au sort entre février et novembre 2015, a permis de prélever des matières fécales sur les veaux âgés de 1 semaine à 2 mois dans 14 départements répartis en France métropolitaine.

La mise en évidence des oocystes a été effectuée par microscopie optique avec coloration de Heine, méthode utilisée classiquement en laboratoire d’analyses, afin de visualiser les oocystes de cryptosporidies qui ne prennent pas le colorant et apparaissent brillants sur un fond rouge sombre. Cette technique, sensible et facile à réaliser, est plutôt réservée au domaine vétérinaire. Le diagnostic moléculaire repose ensuite sur la recherche d’ADN de Cryptosporidium par amplification génique, technique très sensible, mais pratiquée uniquement dans des laboratoires spécialisés ou de références, ou par polymerase chain reaction (PCR) qui permet également d’identifier les espèces et les sous-espèces de cryptosporidies par analyse des fragments de restriction ou par PCR spécifique.

25 % des exploitations étudiées touchées par C. Hominis

Dans cette étude, des parasites ont été détectés chez les veaux de 29 exploitations suivies (sur 44). En effet, C. hominis était présent dans les matières fécales de veaux de 12 élevages et C. parvum a été retrouvé dans les 29 exploitations. Les deux espèces ont été détectées concomitamment dans 9 exploitations, mais jamais sur le même veau. 25 % des élevages évalués comprenaient donc des veaux excréteurs d’oocystes de C. hominis, agents de la cryptosporidiose considérés comme spécifiques à l’espèce humaine (contrairement à C. parvum qui affecte les deux espèces). Un seul génotype de C. hominis a été retrouvé dans toutes les régions étudiées et il semble dominant. L’Ouest (Côtes-d’Armor, Ille-et-Vilaine et Morbihan) est la région caractérisée par le taux d’élevages positifs pour C. hominis le plus élevé avec quatre génotypes différents, dont trois sont décrits comme étant humains ou appartenant à des primates non humains. La majorité des veaux excréteurs étaient asymptomatiques.

Tandis que les bovins sont considérés comme l’un des réservoirs de C. parvum et jouent un rôle crucial dans la transmission zoonotique du parasite à l’homme, les résultats de cette enquête suggèrent par conséquent que les veaux seraient aussi susceptibles de provoquer des infections humaines en excrétant des isolats de C. hominis.

1 Razakandrainibe R., Diawara E. H. I., Costa D. et coll. Common occurrence of Cryptosporidium hominis in asymptomatic and symptomatic calves in France. Plos Negl. Trop. Dis. 2018;12(3):e0006355.

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