Les anticorps maternels réduisent l’efficacité de la vaccination SDRP - La Semaine Vétérinaire n° 1779 du 28/09/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1779 du 28/09/2018

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : TANIT HALFON 

Une équipe de chercheurs de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) s’est penchée sur l’impact des anticorps neutralisants d’origine maternelle (Anom) sur la vaccination des porcelets contre le syndrome dysgénésique et respiratoire porcin (SDRP). Si de précédentes études ont montré sur le terrain, que la présence d’un taux élevé d’anticorps d’origine maternelle n’a pas d’effet sur l’efficacité du vaccin, une précédente expérimentation réalisée par l’Anses a mis en évidence que les Anom interféraient avec la réponse humorale et cellulaire postvaccinale, en inhibant pendant 4 semaines la production d’anticorps et de cellules sécrétrices d’interféron gamma (IFNg) spécifiques du SDRP chez des porcelets vaccinés à 3 semaines d’âge. De plus, les animaux présentant un taux élevé d’Anom ne présentaient pas de virémie vaccinale pendant 4 semaines postvaccination.

Comparaison de plusieurs groupes de porcelets

Dans cet essai, 56 porcelets sont sélectionnés dans un élevage naisseur/engraisseur indemne de SDRP, et vaccinant les truies. à l’âge de 3 semaines, les porcelets sont transférés dans les animaleries de l’Anses et divisés en deux groupes de 28 individus chacun, le premier présentant de faibles niveaux d’Anom (groupe A-) et le deuxième avec des niveaux élevés (groupe A+). 16 porcelets de chaque groupe sont vaccinés (V+) à l’aide de Porcilis PRRS® de MSD par voie intramusculaire, deux fois à une semaine d’intervalle, la première injection n’ayant pas entraîné de réponse suffisante1. Quatre semaines après la seconde injection, les chercheurs inoculent à 8 porcelets de chaque groupe vacciné (A+V+, A-V+) et à 8 porcelets non vaccinés (4 porcelets A+ et 4 porcelets A-) la souche SDRP Finistère par voie intranasale. Les 8 porcelets non infectés des groupes A+V+, A-V+ et V- (4 porcelets A+ et 4 porcelets A-) sont mis en contact avec les animaux infectés le jour suivant. Les 8 porcelets restants non vaccinés et non infectés servant de témoins (4 A+ et 4 A-).

Inhibition de la réponse immunitaire

69 % des porcelets du groupe A- étaient virémiques une semaine après la seconde injection, contre 6 % pour l’autre groupe, soit un seul porcelet. De plus, la proportion d’animaux virémiques du groupe A+ est restée à des niveaux inférieurs par rapport au groupe A- (31 % à 2 semaines après la seconde injection [S2] et 25 % à 4 semaines [S4], contre 50 % à S2 et S4). 4 semaines après la seconde injection, 94 % des animaux du groupe A-V+ ont présenté une séroconversion contre 44 % pour le groupe A+V+. Bien qu’aucune différence significative n’ait été observée pour le nombre de cellules sécrétrices d’IFNg spécifiques du SDRP, le seul porcelet qui présentait une virémie une semaine après la seconde injection avait un niveau de réponse IFNg 16 fois plus élevé que la réponse moyenne des autres animaux de son groupe.

Réduction de la charge virale

Après inoculation, la clinique était modérée, sans différence notable entre les animaux vaccinés et les animaux non vaccinés. Les charges virales des porcelets A-V+ à J4 et J10 postinoculation (pi) étaient significativement plus faibles que celles des animaux V-. Aucune différence n’était en revanche observée entre les porcelets des groupes A+V+ et V-. De plus, une corrélation négative entre la réponse IFNg spécifique et la virémie est notée pour les groupes inoculés à J7 et J15 pi. à l’exception d’un seul porcelet A+V+, tous les animaux en contact avec les infectés ont été contaminés par le virus, sans que les charges virales des porcelets A+V+ soient différentes de celles des V-. De plus, les animaux au contact du groupe A-V+ présentaient à J7 pi une virémie significativement plus faible que les V- et que les A+V+. Pour les auteurs, ces résultats confirment l’inhibition de la réplication de la souche vaccinale et de l’induction d’une réponse immune par les Anom et montrent leur interférence sur l’efficacité vaccinale. L’hypothèse évoquée est celle d’une moins bonne protection cellulaire. à noter qu’à la différence du précédent essai la virémie vaccinale est plus précoce chez les porcelets du groupe A+, en lien probablement, selon les chercheurs, avec la seconde injection de primovaccination. De plus, la nécessité de procéder à une seconde injection et les taux élevés d’IFNg retrouvés au moment de la première injection suggèrent qu’une réponse antivirale non spécifique pourrait également affecter l’efficacité vaccinale.

1 Une semaine après la première injection, le génome du virus SDRP n’a été détecté que chez deux porcelets du groupe A-V+ par polymerase chain reaction (PCR) et chez aucun individu du groupe A+V+.

Patricia Renson Chercheuse à l’Anses. Article rédigé d’après une présentation faite lors du congrès annuel de l’AFMVP à Rennes (Ille-et-Vilaine), les 30 novembre et 1 er décembre 2017.

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