LE SENS DE L’EXISTENCE - La Semaine Vétérinaire n° 1777 du 14/09/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1777 du 14/09/2018

LIVRE

DITES-NOUS TOUT

Auteur(s) : MICHEL BERTROU 

Sans vouloir réduire la profondeur de l’œuvre de J. M. Coetzee à la place qu’il donne aux animaux, ce qu’il a écrit dans Disgrâce (1999) et Elizabeth Costello (2003) fut très important pour nourrir la réflexion sur la souffrance et la maltraitance animales. Dans ce nouveau livre du prix Nobel sud-africain, qui réunit sept nouvelles (écrites entre 2003 et 2017), on retrouve Elizabeth Costello à différents âges de sa vie… surtout dans sa dernière phase. Son cerveau “automnal” n’a cependant rien perdu de son impertinence et les animaux restent une préoccupation. L’intellectuelle disserte ainsi sur l’âme des chats, la vie des chèvres, le destin tragique des poussins broyés à la naissance. Elle ne cesse aussi de rappeler notre animalité commune. Dans la nouvelle qui inspire le titre français du livre, elle imagine un abattoir de verre construit au milieu de la ville, « histoire de montrer ce qui se passe à l’intérieur » et ce que cela changerait autour. Par la pensée encore vive de ce double fictif, souvent déroutant, Coetzee questionne l'humanité (et le vivant) à l’obscure clarté de sa finitude. Comme l’écrivaine qui n’entend lever ni les doutes ni les ambiguïtés et refuse de se voir réduite à une identité figée, ces nouvelles n’ont aucune morale à délivrer. Ce qui est moral, dit le romancier à travers son personnage, c’est la littérature. Pour sauver les poussins du néant notamment… « C’est pour eux que j’écris, dit-elle à son fils, leur vie fut tellement brève, si facile à oublier. »

L’Abattoir de verre, de J. M. Coetzee, Le Seuil, 176 pages, 18 €.

Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr