Pathologie comparée (homme et animal) : une ressource essentielle pour la profession ? - La Semaine Vétérinaire n° 1773 du 24/08/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1773 du 24/08/2018

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@... VOUS !

Auteur(s) : CHANTAL BÉRAUD 

LE CONCEPT ONE HEALTH EST FONDAMENTAL

En oncologie vétérinaire, les liens avec la médecine humaine sont essentiels. Par exemple, dans les cas où l’on manque de standards de soin, on cherche ce qui se fait déjà en médecine humaine, pour déterminer la stratégie la plus adaptée à l’animal. Ainsi, pour traiter un carcinome ovarien, nous allons choisir un protocole à base de carboplatine, car c’est ce protocole de soins que l’on suit pour une femme. Par ailleurs, aujourd’hui, je travaille régulièrement en correspondance avec des laboratoires humains et des confrères hématologues dans les hôpitaux. Désormais, les nouvelles molécules sont testées de manière simultanée chez l’homme, le chien et le chat (alors qu’auparavant, on les testait d’abord chez l’animal, modèle expérimental). Voilà aussi pourquoi, au cours de ma formation, j’ai choisi de suivre des stages au centre hospitalier de Lyon sud, dans les services de radio-oncologie et d’hémato-oncologie. Seules deux contraintes supplémentaires sont l’apanage des vétérinaires : nous devons en effet pratiquer en tenant davantage compte du coût financier, et dans le respect de la réserve hospitalière. Actuellement, on a accès à une quinzaine de médicaments pour les animaux, avec une liste qui n’évolue pas depuis quelques années. Nous essayons de travailler là-dessus aussi…

DAVID SAYAG

JE BAIGNE DANS LA PATHOLOGIE COMPARÉE !

Ma thèse d’université était consacrée aux amyotrophies spinales, en maladies humaines, et je travaille aujourd’hui à l’École nationale vétérinaire d'Alfort (ENVA), au laboratoire BNMS de neurobiologie, qui fonctionne notamment grâce au soutien financier de l’Association française contre les myopathies (AFM). Autant dire que les échanges d’information se font dans les deux sens ! Le vétérinaire profite, par exemple, des techniques humaines de diagnostics. Les examens complémentaires d’imagerie (scanners, IRM, etc.) sont aussi adaptés aux chiens et aux chats. À l’inverse, la collaboration entre cliniciens et généticiens vétérinaires a, par exemple, permis de caractériser une myopathie canine centronucléaire avec un nouveau gène, qui plus tard a aussi été identifié chez une famille humaine ! Par ailleurs, les chiens et les chats sont également des sentinelles médicales qui permettent de démontrer les effets nocifs toxiques de certains facteurs environnementaux sur l’homme, puisque leurs maladies évoluent plus rapidement. Oui, décidément, le vétérinaire est l’acteur privilégié de cette pathologie comparée, car lui seul, dans un réel souci de bientraitance animale (suivi de protocoles antidouleurs, etc.), possède aussi le savoir-faire clinique relatif à la manipulation de la matière vivante.

STÉPHANE BLOT

UNE ACTION PERTINENTE ET LÉGITIME

Je cherche à comprendre les mécanismes qui sous-tendent les maladies de la rétine et à élaborer de nouvelles stratégies thérapeutiques (pharmacologiques, biomatériaux, etc.). En ophtalmologie, les preuves de concept, moins coûteuses à établir chez la souris, sont difficilement extrapolables à l’homme, en raison des différences anatomo-physiologiques interespèces. En revanche, certains vétérinaires praticiens soignent des animaux présentant des maladies des yeux similaires à celles rencontrées chez l’homme. C’est pourquoi il est important de développer des instruments et des thérapeutiques pour un bénéfice mutuel homme-animaux. Par exemple, la mise au point d’un instrument (pupillomètre chromatique) permettant de mesurer la constriction pupillaire chez le chat et le chien est désormais utilisée pour dépister des glaucomes chez les bébés. Rappelons aussi que le traitement par thérapie génétique de l’amaurose (cécité) des chiens briards a été appliqué, avec succès, chez les bébés : nés aveugles, ils revoient ! Enfin, concernant la chirurgie de la cataracte par incision étroite (phacoémulsification), les médecins ont bénéficié des études pionnières des vétérinaires et, en retour, leur ont fait bénéficier de la technologie des implants pliables.


SERGE ROSOLEN
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