La lactation de pseudo-gestation est probablement sous-diagnostiquée - La Semaine Vétérinaire n° 1773 du 24/08/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1773 du 24/08/2018

REPRODUCTION

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : AURÉLIEN LÉOBON  

Une étude britannique s’intéresse à cette entité et souligne son lien avec une potentielle agressivité envers l’homme, qui devrait constituer un signe d’appel.

La lactation de pseudo-gestation est communément rencontrée en pratique généraliste. Les chiennes sont présentées pour des signes cliniques compatibles avec un péri- ou post-partum : gynécomastie, galactorrhée, comportement maternel exacerbé, voire agressivité. Son origine précise reste mal connue. Dans la plupart des cas, une progestéronémie basse et une hyperprolactinémie sont présentes. Certaines races apparaissent surreprésentées : beagle, lévrier afghan, boxer, teckel, etc. La durée des signes cliniques est variable, des régressions spontanées sont décrites. C’est une affection de la chienne entière qui prédispose au développement de tumeurs mammaires. Elle peut toucher des chiennes qui ont été stérilisées, notamment si l'acte a été réalisé au cours du dioestrus. Cela peut se traduire par une agressivité sans cause sous-jacente identifiée rendant son diagnostic difficile. La difficulté de l’identification de cette affection, notamment dans ses manifestations frustes, tient également au fait qu’il n’existe pas à l’heure actuelle de tests hormonaux permettant un diagnostic définitif.

Gynécomastie et galactorrhée conduisent au diagnostic dans 90 % des cas

Une équipe écossaise de l’université de Glasgow s’est emparée du sujet en réalisant une étude rétrospective au Royaume-Uni1. Des questionnaires ont été envoyés à près de 2 000 cliniques tirées au sort dans le but de mieux appréhender l’anamnèse, la prévalence, le diagnostic et le traitement de cette affection au Royaume-Uni. Près de 20 % des praticiens sollicités ont répondu. 97 % de ceux-ci affirment avoir pris en charge une lactation de pseudo-gestation au cours des 12 derniers mois. Près d’un sur deux indiquent l’avoir diagnostiquée au moins une fois chez une chienne stérilisée, bien que ce soit très rare selon eux. Les signes cliniques menant au diagnostic sont la gynécomastie et la galactorrhée dans 90 % des cas. Le comportement maternel exacerbé est rapporté dans 65 % des cas. 96 % des praticiens interrogés affirment avoir déjà diagnostiqué cette affection sur la seule base d’un changement de comportement. En ce qui concerne le traitement, 47 % des praticiens concèdent ne pas mettre en place de traitement, 48 % affirment utiliser la cabergoline, les autres utilisent du mégestrol, de la proligestone, une prise en charge comportementale ou un régime alimentaire adapté. Les éléments qui poussaient les praticiens à ne pas traiter étaient la durée et l’intensité des signes cliniques, le coût du traitement ou les effets indésirables potentiels notamment. En moyenne, les animaux traités recevaient entre 5 et 6 jours de cabergoline. 4 % des praticiens ont choisi la stérilisation comme prise en charge de cette affection, ce qui est déconseillé.

Le traitement médical ne semble pas être la pierre angulaire du traitement

Cette étude met en lumière que les praticiens diagnostiquent cette affection lors de gynécomastie, de galactorrhée ou encore de comportement maternel inapproprié. La présence d’une agressivité ne constitue pas, pour le panel sélectionné, un signe d’appel fort. L’intérêt du traitement médical est discutable notamment pour des sujets présentant peu de signes cliniques. La cabergoline, inhibiteur sélectif de la prolactine, semble être le traitement médical de choix en dépit de son coût. Une durée de 5 à 6 jours est en général nécessaire à la résolution des signes cliniques. Cette étude, bien que présentant des biais (aspect rétrospectif, échantillonnage, etc.), a l’avantage d’aborder un sujet d’intérêt pour le praticien généraliste. Il en ressort que le traitement médical ne semble pas être la pierre angulaire de la prise en charge de ces animaux et que le vétérinaire devrait considérer l’agressivité vis-à-vis de l’homme comme l’un des signes d’appel de cette affection.

1 Amanda L. Root, Tim D. Parkin, Pippa Hutchison et coll. Canine pseudopregnancy: an evaluation of prevalence and current treatment protocols in the UK. BMC Vet. Res. 2018;14:170.

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