La génétique, outil de la médecine préventive féline - La Semaine Vétérinaire n° 1766 du 01/06/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1766 du 01/06/2018

DÉPISTAGE

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : MYLÈNE PANIZO  

Établir une prédisposition à une maladie (voire la diagnostiquer), gérer au mieux les reproductions, déterminer les profils sanguins pour éviter les incompatibilités lors de transfusion, telles sont les applications des tests génétiques. Ceux-ci sont appelés à se développer dans les années à venir et contribueront alors à une médecine personnalisée.

L’utilisation de la génétique permet de développer des outils pratiques en clinique, au service de la médecine préventive. Le chat a été moins étudié que le chien dans ce domaine. Le premier séquençage du génome d’un chat a été réalisé en 2007. À ce jour, 62 mutations ont été identifiées chez cette espèce (contre 232 chez le chien). Cependant, la recherche en génétique féline s’accélère grâce aux progrès techniques permettant notamment une meilleure qualité du séquençage, comme l’a expliqué Marie Abitbol, maître de conférences en génétique à VetAgro Sup (Lyon) lors de la journée de la Société d’ethnozootechnie en octobre 2017 à Paris.

Bien choisir et réaliser un test génétique

Les études génétiques permettent d’identifier des mutations impliquées dans des maladies héréditaires. Il s’agit pour l’essentiel de maladies monogéniques (et souvent autosomiques récessives). Lorsqu’une mutation causale est identifiée, un test génétique peut être mis au point. Le premier critère pour choisir un test ADN est la race du chat. En effet, une même maladie peut être due à différentes mutations selon les races. La myocardiopathie hypertrophique, par exemple, est due à une mutation différente chez le maine coon (gène MyBPC3, mutation A31P) et chez le ragdoll (même gène MyBPC3, mais autre mutation R820W). Le choix du test est aussi fonction de la maladie : une même affection peut être due à différentes mutations, au sein d’une race : chez le bengal, l’atrophie progressive de la rétine est due à deux mutations distinctes (rdAc-PRA et Bengal PRA). En pratique, il conviendrait donc de tester le chat pour ces deux mutations.

Interpréter un test génétique pour le dépistage d’une maladie héréditaire

Un test génétique détecte une mutation et non une maladie. L’interprétation du résultat dépend de la corrélation génotype-phénotype : un test ADN peut être considéré comme diagnostique uniquement si la corrélation génotype-phénotype est très forte (par exemple dans le cas de l’hypokaliémie du burmese). Lorsque la corrélation est faible (notamment pour la myocardiopathie hypertrophique du maine coon), le test génétique doit être interprété comme étant un test de prédisposition. L’intérêt est d’assurer un suivi attentif d’un animal à risque, voire de mettre en place un traitement s’il existe. Les tests ADN permettent également d’établir un programme de reproduction : la gestion des accouplements en fonction des résultats des tests ADN dépend du type de transmission de la maladie (autosomique récessive ou dominante), de la fréquence de la mutation, de l’effectif dans la race, ainsi que de la gravité de la maladie. L’utilisation des tests de dépistage a permis notamment de faire diminuer nettement la prévalence de la polykystose rénale chez le persan (en 2003, elle s’élevait à 41,8 % en France ; en 2015, elle était de 10,8 %).

Autres utilités des tests génétiques

Dépister le groupe sanguin du chat (A, B ou AB) est l’une des autres applications des tests génétiques, à seule fin d’éviter les accidents de transfusion et l’érythrolyse néonatale. Ils permettent également de certifier un pedigree, ce qui est utile en cas de portée “multipaternelle”. La mention “DNA” inscrite sur le pedigree signifie que le chat a été identifié génétiquement, et celle de “DNA comp.” que la filiation a été vérifiée compatible par identification génétique. Ces deux mentions sont facultatives. Depuis 2015, il est également possible d’inscrire le résultat de certains tests génétiques de maladies sur le pedigree Loof1.

La génétique est donc un outil utile pour le praticien, qui s’inscrit dans le cadre de la médecine préventive. Dans un futur proche, de nouveaux tests génétiques de dépistage de maladies héréditaires félines vont être commercialisés. Pour Marie Abitbol, décrypter le génotype d’un chat deviendra fréquent, ce qui permettra de pratiquer une médecine de plus en plus personnalisée.

1 Livre officiel des origines félines.

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