Phytothérapie : où en sont les travaux de l’ANMV ? - La Semaine Vétérinaire n° 1759 du 06/04/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1759 du 06/04/2018

MÉDECINE COMPLÉMENTAIRE

ACTU

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO-MORADEL 

L’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) se penche sur certaines plantes de première priorité, afin de favoriser la fixation de limites maximales de résidus.

En septembre dernier, lors de la première édition de sa journée de rencontre avec les différents acteurs de la santé animale, l’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) notait le fort engouement de certains vétérinaires et des propriétaires pour les produits dits naturels. Malgré cette tendance, les demandes d’autorisation de mise sur le marché (AMM) des laboratoires n’affluent pas auprès de l’agence. Il s’agit, par exemple, de la phytothérapie. En cause, notamment, l’absence de limites maximales de résidus (LMR), pour les animaux de rente, par exemple. Cette information est indispensable et doit être contenue dans le dossier de demande d’AMM. Des voix s’élèvent au sein de la profession afin de sortir du flou réglementaire sur la prescription de préparations extemporanées chez les animaux d’élevage. Mais la tâche n’est pas aisée. De son côté, l’ANMV se dit mobilisée pour faire bouger les lignes.

« L’agence travaille activement sur ce dossier »

Jean-Pierre Orand, directeur de l’ANMV, assure de son engagement dans cette voie : « L’agence travaille activement sur ce dossier. Le problème bloquant est celui des LMR. Notre objectif est d’alimenter la liste des plantes disposant d’une LMR. Nous tentons de monter un dossier à partir des données déjà existantes dans d’autres secteurs tels que la phytothérapie humaine, afin de travailler avec l’Agence européenne des médicaments (EMA) sur une méthodologie simplifiée. » La problématique ne se pose cependant pas uniquement au niveau national. Dans le contexte du Brexit, il n’est pas aisé de mobiliser l’EMA sur ces questions. Mais l’ANMV demande l’appui de la Commission européenne afin qu’elle saisisse l’agence européenne à ce sujet. Ses partenaires européens sont également sensibilisés. « Nous travaillons ainsi avec les différents acteurs de la santé animale (vétérinaires, éleveurs, entre autres), afin que tous mobilisent leurs fédérations européennes pour que ces discussions soient portées au niveau européen. L’objectif est d’avoir une cartographie sur la façon dont les produits à base de plantes sont utilisés en médecine vétérinaire dans d’autres pays de l’Union européenne, afin d’élaborer, d’ici juin, une note de position destinée à la Commission européenne. Nous avons déjà effectué ce travail après du réseau des agences des différents pays européens, et avons ainsi constaté que peu de pays européens ont adopté une réglementation nationale sur ce secteur », souligne Jean-Pierre Orand. En plus de ces actions, l’agence indique avoir effectué des travaux sur certaines plantes de première priorité. « Cela nous a permis d’envisager des mécanismes spécifiques, les partenariats publics-privés qui pourraient être pertinents et la mise en place de procédures de reconnaissance des données obtenues dans un autre pays européen. Par ailleurs, nous voulons stimuler l’industrie afin qu’elle puisse développer des AMM », précise le directeur de l’ANMV.

Une demande de clarification

Bon nombre de vétérinaires demandent une clarification du cadre réglementaire. « Sur une même huile essentielle, la composition peut grandement varier en fonction de l’année, des conditions climatiques, du moment de la récolte, et de la région ou du pays d’origine de la plante. Il est plus simple d’obtenir une AMM pour un produit standardisé, puisque sa composition est toujours identique. Pour faire évoluer le cadre légal, il faudrait une remontée d’informations de terrain par les praticiens qui utilisent ces produits », indique Léo Lisarde-Irola, vétérinaire dans l’Oise, qui a recours à la phytothérapie chez les gros animaux. Selon lui, la profession avance cependant trop lentement sur ce sujet, tandis que les éleveurs sont prêts à explorer ces solutions. « La France me semble en retard dans ces domaines et les laboratoires n’investissent pas ou peu dans ce secteur. Le plus problématique, aujourd’hui, est l’absence de fixation de LMR pour ces produits », ajoute-t-il. La balle est donc dans le camp de l’ANMV, qui porte ce dossier.

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