Le difficile retour d’Afghanistan des chiens militaires - La Semaine Vétérinaire n° 1757 du 30/03/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1757 du 30/03/2018

ÉTATS-UNIS

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : BÉNÉDICTE ITURRIA 

Un rapport américain révèle d’importants manquements à la prise en charge des chiens militaires utilisés pendant les combats en Afghanistan entre 2011 et 2014.

Selon un rapport1 du bureau de l’Inspecteur général du Pentagone, le département de la défense américain (DOD), publié le 1er mars, les chiens renifleurs d’explosifs (tactical explosive detection dog, Tedd), qui ont servi pendant les combats en Afghanistan entre 2011 et 2014, ont fait l’objet de négligences à leur retour sur le sol américain. Ce rapport est le compte rendu d’une enquête faite à la demande de la commission des forces armées de la Chambre des représentants en 2016, à la suite notamment des plaintes formulées par des soldats en charge de ces animaux quant au sort de leur auxiliaire canin.

Un retour précipité, sans programme d’adoption

Le document a mis en lumière de nombreux manquements à la prise en charge de ces héros de guerre. 232 chiens ont servi aux côtés de soldats américains en Afghanistan dans le cadre du programme Tedd. Il a été brusquement arrêté en février 2014 et l’armée n’a donné à ses dirigeants que quelques semaines pour ramener les animaux aux États-Unis et leur trouver un nouveau foyer. La transition hâtive s’est mal déroulée par manque d’anticipation, de supervision et de procédures appropriées pour favoriser l’adoption des chiens à la fin du programme. Certains sont restés plus de 11 mois dans des chenils, avec un défaut de soins et d’attention. Les soldats ont dû faire eux-mêmes des recherches dans ces lieux pour retrouver leur chien. En cause, notamment, des failles dans le système permettant de prévenir les anciens maîtres lorsque leur compagnon était disponible à l’adoption. Comme l’explique le rapport, « de 2000 à 2015, le DOD n’avait pas de priorité établie pour les candidats à l’adoption de chiens militaires, et aucune priorité d’adoption pour leurs anciens gestionnaires ».

Parmi ces chiens militaires, 70 ont été transférés dans des unités de l’armée, 40 adoptés par leur ancien maître, 17 placés dans des organismes fédéraux, 46 dans des services de police locaux, fédéraux ou d’États, 47 ont été adoptés par des particuliers et 9 sont décédés (euthanasie ?). Trois chiens manquent à l’appel et l’armée n’a pu les localiser.

Aucune sélection ou contrôle particulier n’ont été pratiqués pour déterminer les futurs candidats à l’adoption. Ainsi, 13 Tedd adoptés par une compagnie privée ont été abandonnés dans un chenil en Virginie pendant plus d’un an, jusqu’à ce que deux associations de protection animale interviennent pour les réunir avec leurs anciens maîtres.

Des placements inadéquats

L’armée n’a pas toujours suivi les recommandations des vétérinaires, qui ont évalué les chiens en février 2014 sur la base militaire de Fort Bragg en Caroline du Nord. Ils conseillaient que certains animaux ne soient placés qu’avec leurs anciens maîtres ou des éducateurs, compte tenu de leurs antécédents d’agressions. Lors d’une semaine portes ouvertes aux civils à Fort Bragg, une consœur a décrit le contrôle des candidats aux adoptions comme très rapide et a fait part de ses inquiétudes concernant le manque d’aptitudes et de formations des prétendants pour gérer ce type de chiens. De plus, les Tedd avaient peu ou pas d’expérience avec les enfants ou d’autres animaux de compagnie. Il est fait état d’un chien qui aurait été formé au mordant autorisé à intégrer une famille avec enfants. Un autre atteint d’un syndrome de stress post-traumatique a été placé lui aussi dans un foyer avec enfants avant d’être transféré chez le shérif local neuf jours plus tard. « Les placements ont été faits sans dossiers complets d’aptitude à l’adoption et certaines familles ont adopté des Tedd avec de possibles tendances agressives ou inadéquates », indique le rapport.

L’obligation de castrer les mâles avant leur placement chez des particuliers ou leur précédent maître n’a pas été systématiquement appliquée (les vétérinaires n’ayant pas eu le temps nécessaire pour pratiquer toutes les stérilisations).

Le rapport pointe également le non-respect par l’armée de la règle édictée par le DOD concernant la formation de ces chiens : les animaux ont ainsi été fournis par des sous-traitants privés alors que cette tâche revient normalement au 341e escadron de l’Air Force, habilité à former et à distribuer les nouveaux chiens à tous les services de l’armée.

Selon le rapport, l’armée de terre travaille désormais à se conformer aux recommandations de l’inspecteur général pour mieux suivre et approuver les adoptions pour tout futur programme de chien de travail militaire qu’il décide de financer. Il a été convenu de proposer de meilleures procédures et règlements pour se conformer au système de gestion des chiens de travail du DOD et de donner de meilleures directives sur le contrôle des candidats non militaires à l’adoption.

1 bit.ly/2G4uAWt.

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