Conte de la pleine lune

Représentants d’une nouvelle génération de cinéastes attirés par le cinéma de genre, les Brésiliens Juliana Rojas et Marco Dutra aiment dire que leur travail se nourrit aussi bien des films de Jacques Tourneur que de ceux de Walt Disney. Conçu comme un véritable conte de fée contemporain, ce film très abouti croise avec une singulière fluidité la parabole sociale, la romance, la comédie musicale et le film d’horreur. La première moitié, mystérieuse et inquiétante, se déroule dans le huis clos d’un luxueux appartement du centre moderne de São Paolo. Une infirmière des quartiers pauvres se présente auprès d’une jeune célibataire qui cherche quelqu’un pour prendre soin de son bébé à naître et, jusque-là, de sa grossesse. Tandis que les deux jeunes femmes – issues d’univers opposés – se rapprochent l’une de l’autre, la future mère révèle un comportement nocturne de plus en plus déroutant. Dans la seconde partie, l’enfant a 7 ans et vit désormais avec l’infirmière dans la périphérie populaire de la ville. Sa nature monstrueuse ne faisant plus mystère, le film se fait plus explicite. Sa grande originalité est de contrebalancer les irruptions frontales de sauvagerie par la même douceur hypnotique que dans la première partie. Qu’il soit sexuel ou maternel, l’amour est à la fois tendre et subversif, il se moque des “bonnes manières”. Méditation sans cynisme sur nos phobies et nos instincts – humains et bestiaux –, ce conte de loup-garou auréole la transgression d’une belle lumière lunaire.
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Les Bonnes Manières (As Boas Maneiras) de Juliana Rojas et Marco Dutra, avec Isabél Zuaa, Marjorie Estiano, Miguel Lobo, Cida Moreira, Brésil-France, 2 h 15, sortie le 21 mars.