Les vétérinaires canadiens sur le qui-vive - La Semaine Vétérinaire n° 1753 du 24/02/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1753 du 24/02/2018

FENTANYL

ACTU

Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR MICHAELLA IGOHO-MORADEL  

La crise du Fentanyl fait rage au Canada. Cet antidouleur utilisé en médecine vétérinaire peut être détourné en raison de son effet euphorisant. Plusieurs cas de surdosages liés à cet opioïde ont d’ailleurs été recensés. Certains vétérinaires canadiens s’inquiètent. Interrogé à ce sujet, l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ) revient sur les raisons du développement de cette problématique au Canada.

Comment expliquez-vous ce phénomène au Canada ?

Ordre des médecins vétérinaires du Québec : La nature même de ces substances fortement addictives, le fait qu’elles sont facilement accessibles sur le marché illicite et qu’elles ont été prescrites en trop grande quantité sont certainement des facteurs qui ont contribué à l’explosion de cette crise au Canada, comme c’est le cas ailleurs dans le monde.

Quels sont les opioïdes dont l’usage est le plus détourné ?

OMVQ : Nous n’avons pas ces données. L’Institut canadien d’information sur la santé fournit toutefois des statistiques intéressantes sur les quantités d’opioïdes délivrées au Canada1. Le site2 fournit également des statistiques sur les décès, les provinces les plus touchées, les hospitalisations, etc. Des détournements de médicaments vétérinaires à base de ces substances ont été constatés.Trois membres ont été jugés par le comité de discipline pour une utilisation inadéquate de médicaments. Deux d’entre eux entretenaient un commerce parallèle de vente et le troisième était de la consommation personnelle. Ces décisions sont publiques.

Quelles sont les actions des organisations vétérinaires pour endiguer ce fléau ?

OMVQ : Nous sommes grandement préoccupés, à l’OMVQ, par la question et avons mis cette situation dans nos priorités pour les prochains mois. Le conseil d’administration, le comité des médicaments et le comité d’inspection professionnelle seront appelés à participer à l’élaboration de protocoles pour augmenter la sécurité du public face à ces produits. Nous voulons nous assurer que les mécanismes de contrôle déjà en place sont adéquats, suffisants et appliqués avec la rigueur nécessaire. Nous souhaitons étudier la possibilité de les améliorer. Nous connaissons l’existence de produits à usage vétérinaire, de forte concentration, pour des espèces animales de grand poids et comprenons qu’ils peuvent, théoriquement, représenter un risque plus grand. Il ne faut pas oublier que des produits à usage vétérinaire peuvent se retrouver sur le marché noir de plusieurs façons, et pas seulement en passant par un médecin vétérinaire.

1 bit.ly/2CdLBM9.

2 canada.ca/opioides.

MÉCANISMES D’ENCADREMENT ACTUELS

Au Québec, les médecins vétérinaires doivent respecter différentes réglementations :
- une sur les conditions et modalités de vente des médicaments, qui place les opiacés dans l’annexe IV, soit les spécialités destinées aux animaux et vendues sur ordonnance ;
- une sur les ordonnances des médecins vétérinaires, qui encadre la prescription d’un médicament ;
- une sur l’étiquetage et l’emballage des médicaments destinés aux animaux, qui encadre les renseignements qui doivent être fournis avec le produit.
De plus, les substances contrôlées sont régies par le règlement sur les stupéfiants : Narcotic Control Regulations(NCR) ; Benzodiazepines and Other Targeted Substances Regulations(BOTSR) ;Food and Drug Regulations, part G(FDR-G).
Lors de la visite d’inspection professionnelle, sur place, l’inspecteur doit valider :
- le registre d’achat, chaque bouteille devant être identifiée avec un numéro unique ;
- le registre d’utilisation pour chaque bouteille en corrélation avec des dossiers clients, la conformité de l’ordonnance ;
- le registre d’élimination des substances périmées devant témoin.
L’Ordre des médecins vétérinaires veille à l’application de ces réglementations par l’intermédiaire du service de l’encadrement professionnel, lors du processus d’inspection de ses membres. Il surveille, entre autres, la gestion de la pharmacie et des ordonnances, la vente des médicaments au public et demande des registres d’achat, d’utilisation, ainsi que d’élimination des substances contrôlées, dont font partie les opioïdes. Finalement, l’Ordre s’assure d’une sensibilisation constante à l’attention de ses membres sur l’importance des bonnes pratiques d’utilisation, de prescription et d’entreposage des médicaments, via ses différents outils de communication.
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