Maladie de l’herbe : une étude dans le cadre du Respe - La Semaine Vétérinaire n° 1749 du 27/01/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1749 du 27/01/2018

RECHERCHE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : PIERRE TRITZ 

La maladie de l’herbe (MH) ou dysautonomie équine (equine grass sickness, en anglais) est une polyneuropathie qui atteint le système nerveux central et périphérique chez le cheval. Cette maladie d’étiologie inconnue atteint presque exclusivement les chevaux à l’herbe, qui développent des symptômes caractéristiques en relation avec une dégénérescence neuronale.

Depuis la première description en Écosse en 1909, les symptômes ont été observés dans plusieurs pays, essentiellement en Europe du Nord (Allemagne, Suisse, Pays-Bas, Autriche, Danemark, notamment).

Diverses hypothèses ont été évoquées : des agents infectieux ou toxiques présents dans le sol, qui se développent dans les pâtures sous certaines conditions environnementales ou dans l’intestin en cas de dysmicrobisme ; une toxi-infection à la toxine botulique (BoNT) de type C ou C1 de Clostridium botulinum ; une entérotoxicité particulière de Clostridium perfringens 1,2….

Trois formes de la maladie

Il existe trois formes décrites de la maladie : aiguë, subaiguë et chronique. Les symptômes principaux sont des coliques, de la tachycardie, un iléus, de la dysphagie, des bouchons œsophagiens, du ptyalisme, des tremblements, de la sudation, une ptôse palpébrale et une rhinite sèche.

Les examens complémentaires de première intention sont un test à la phényléphrine, une endoscopie de l’œsophage, un transit baryté, une analyse d’urine (protéines, créatinine, pH, glucosurie), une prise de sang (hématocrite, urée, cortisol).

Les examens complémentaires de seconde intention sont la bactériologie, avec la recherche de C. botulinum dans le contenu intestinal, de la toxine BoNT/C dans le sérum ou le contenu intestinal, la biopsie de l’iléon sous laparotomie, la biopsie rectale.

À l’autopsie, les principales lésions macroscopiques sont un contenu intestinal déshydraté dans le caecum et le côlon, recouvert par un film noirâtre.

Les formes aiguës et subaiguës de l’affection sont presque toujours fatales. La MH est essentiellement décrite dans les îles Britanniques et n’a fait l’objet que de très rares publications et études en France, dont une de la commission maladies infectieuses de l’Association vétérinaire équine française (Avef). Quelques cas ont été recensés par le Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (Respe), qui est alerté régulièrement par des vétérinaires ou des propriétaires inquiets, ce qui a conduit le conseil scientifique et technique (CST) du Respe à former un groupe de travail sur cette maladie en France. Il comprend Jackie Tapprest, de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) de Dozulé (Calvados), Michel-Robert Popoff, de l’Institut Pasteur, Dominique Votion, de l’université de Liège (Belgique), Virginie Maisonnier, du Respe, ainsi qu’Agnès Leblond et Pierre Tritz, coresponsables du collège nerveux du Respe.

Prévalence de la maladie

Malgré le faible nombre de cas rapportés en France, la MH représente un réel problème. D’abord parce que le diagnostic reste délicat : il est basé sur la clinique et l’épidémiologie, or la clinique est peu caractéristique et l’évolution vers la mort souvent bien trop rapide pour que des examens complémentaires en vue d’un diagnostic précis soient mis en œuvre.

En France, entre 2003 et 2007, 19 cas suspects et quatre confirmés ont été enregistrés dans le cadre du sous-réseau syndrome neurologique du Respe.

Une étude de la commission maladies infectieuses, parasitaires et épidémiologie de l’Avef, de mars 2010 à novembre 2011, a permis l’élaboration d’une grille de score1,3.

En 2015, plusieurs cas dramatiques de MH sur des trotteurs en Mayenne4 ont conduit le CST à mettre en place une étude épidémiologique, afin de mieux décrire la maladie en France, d’améliorer le diagnostic ante-mortem, de rechercher les facteurs de risque, et d’approcher enfin une étiologie.

L’objectif de l’étude

L’objectif général de l’étude est la surveillance de la MH chez les équidés. Les objectifs spécifiques sont :

- la réalisation d’un état des lieux pour recenser les cas en France ;

- la détection précoce des cas et l’appel à la vigilance selon les zones touchées ;

- l’amélioration des connaissances sur cette maladie à travers le recueil de données épidémiologiques et des analyses, la validation de la grille de score ;

- une aide au diagnostic de l’affection pour les vétérinaires sentinelles, avec restitution de l’information aux praticiens.

Ces réflexions laissent à penser que la MH, parce que mal connue, est en général sous-diagnostiquée en France, ou parfois suspectée à tort par certains praticiens. Pour progresser dans la connaissance de cette affection, le Respe, à la suite de la commission maladies infectieuses de l’Avef, a souhaité mettre en œuvre un protocole spécifique de collecte de données cliniques et épidémiologiques. L’objectif de ce travail est, en premier lieu, de valider le guide de procédure diagnostique pour qu’il permette de classer un individu en “suspect”, “probable” ou “confirmé”, en tenant compte d’un certain nombre de critères épidémiologiques, cliniques et d’examens complémentaires. Dans un deuxième temps, le recueil des cas permet de collecter des données complémentaires et d’établir la prévalence de la maladie en France. Celle-ci devrait permettre d’améliorer la procédure de suspicion et de diagnostic de l’affection, et finalement de préconiser de manière adéquate des mesures de prévention aux propriétaires souvent désemparés par la brutalité d’apparition, la gravité des cas et la possibilité d’une résurgence de la maladie dans leur exploitation.

1 Leblond A., Pertriaux G., Nicolier A. et coll. Maladie de l’herbe, le point et perspectives. Avef, Lyon 2011.

2 Pirie R. S., Jago R. C., Hudson P. H. Equine Grass Sickness. Equine Vet. J. 2014;46(5):545-553.

3 Bontemps J., Pertriaux G., Greppi M. C. et coll. Validation d’une grille de score pour la suspicion de maladie de l’herbe. Avef, Pau 2014.

4 Leleu C., Cuiller S., Arktar I. et coll. Multiples cas d’equine grass sickness (EGS) ou maladie de l’herbe. Avef, Paris 2015.

LES CONTACTS

Si vous souhaitez déclarer un cas ou obtenir des renseignements complémentaires, vous pouvez télécharger les documents relatifs à cette étude sur le site internet du Respe, sinon contacter le réseau ou l’un des responsables du sous-réseau syndrome neurologique du Respe, Pierre Tritz (pitritz@wanadoo.fr) ou Agnès Leblond (agnes.leblond@vetagrosup.fr).

LE PROTOCOLE

Les éléments à compléter et à recueillir lors de la sélection d’un cas sont :
- la déclaration en ligne sur Respe.net ;
- les prélèvements standardisés pour les examens de laboratoire.
Ils sont expédiés à l’Institut Pasteur et au laboratoire Labéo (pour les modalités, se référer au site du Respe).

Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr