La leptospirose, une maladie émergente sous-estimée - La Semaine Vétérinaire n° 1749 du 27/01/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1749 du 27/01/2018

ZOONOSE

ACTU

Auteur(s) : MYLÈNE PANIZO  

Chez l’homme comme chez le chien, une augmentation des cas de leptospirose est observée de par le monde. Des facteurs climatiques, l’augmentation du diagnostic et des activités aquatiques de loisir sont des explications possibles à cette recrudescence.

L’Académie vétérinaire de France a organisé une journée d’information sur la leptospirose et la borréliose de Lyme, le 18 janvier 2018 à l’École nationale vétérinaire d’Alfort, qui a réuni une centaine de professionnels de la santé (vétérinaires, médecins, biologistes, entre autres). La leptospirose est une maladie infectieuse qui touche aussi bien les humains que les animaux. Sa répartition mondiale en fait un enjeu majeur de santé publique et individuelle, qui s’inscrit dans le cadre du concept One Health.

La leptospirose est une maladie bactérienne zoonotique. Les leptospires se transmettent à l’homme lors de contact avec de l’eau souillée par de l’urine infectée. Le rat est le principal réservoir, mais la contamination humaine a également été décrite par les urines infectées d’animaux domestiques ou d’élevage. Édouard Tuaillon, médecin au service des maladies infectieuses et tropicales au centre hospitalier universitaire (CHU) de Montpellier (Hérault), a rappelé que la majorité des infections sont peu symptomatiques, mais que des cas mortels existent. Comme dans la plupart des espèces, après une phase bactériémique marquée par un symptôme pseudo-grippal, la leptospirose s’exprime par une atteinte principalement hépatorénale. Des formes pulmonaires graves sont décrites chez l’homme et chez le chien. En élevage, la leptospirose a un impact économique, car elle peut être associée à des avortements et à une diminution de la production de lait. L’importance des quantités de leptospires excrétées dans les urines de bovins infectés expose les éleveurs, les vétérinaires, mais aussi le personnel travaillant dans les abattoirs.

Une maladie sous-diagnostiquée

Mathieu Picardeau, directeur de recherche à l’Institut Pasteur, responsable du centre national de référence de la leptospirose, a rappelé qu’un million d’infections sévères sont recensées chez l’homme chaque année dans le monde, avec une mortalité supérieure à 10 %. Ces chiffres sont probablement largement sous-estimés, car il existe des régions sans aucune donnée épidémiologique (en Afrique, par exemple). La leptospirose est également souvent confondue avec d’autres maladies, telles que la dingue et le paludisme, car elle provoque une fièvre aiguë en début d’infection. Chez les animaux domestiques ou d’élevage, il existe peu de données fiables sur la prévalence de la maladie, qui est probablement également sous-diagnostiquée en médecine vétérinaire.

Une maladie émergente

La leptospirose est une maladie émergente en raison du réchauffement climatique, de l’augmentation des phénomènes extrêmes (ouragans, cyclones), qui entraînent des inondations. L’exposition à l’eau est en effet un facteur de risque majeur : des épidémies régulières sont constatées après la saison des pluies. De plus, la population vivant dans des bidonvilles ne cesse d’augmenter en raison de l’urbanisation croissante, ce qui accentue la proximité avec les rongeurs. En Europe, depuis 2014, un doublement des cas a été constaté chez l’homme. En 2017, 600 cas ont été décrits en France métropolitaine. Dans les territoires d’outre-mer, 50 à 100 fois plus de cas ont été constatés. Des facteurs climatiques, l’augmentation du diagnostic et des activités aquatiques de loisir sont des explications possibles à cette recrudescence. Chez le chien, une augmentation des cas a été observée depuis les années 2000, en Europe comme aux États-Unis. De plus, de nouveaux sérogroupes sont apparus.

Prévention

La prévention passe par une attention particulière sur les lieux d’exposition (ne pas boire l’eau de baignade, porter des chaussures, veiller à une bonne hygiène des mains, etc.). Le vétérinaire doit porter des gants et collecter les urines des animaux infectés dans des systèmes clos. Pour les personnes exposées, il existe un vaccin en France. Les chiens et les porcs peuvent également être protégés par un vaccin, en revanche il n’en existe aucun pour les chevaux ou les bovins.

Il est nécessaire d’informer la population sur la leptospirose afin de mieux la prévenir. Il est également important de sensibiliser la communauté scientifique et médicale pour mieux estimer la prévalence tant humaine qu’animale.

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