Comment évaluer le juste prix de vente d’une clinique - La Semaine Vétérinaire n° 1748 du 19/01/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1748 du 19/01/2018

FINANCES

ÉCO GESTION

Auteur(s) : FRANÇOISE SIGOT 

Le prix d’une structure vétérinaire, qui n’est pas la valeur, résulte d’une négociation entre l’acheteur et le vendeur. Compte tenu des divers éléments à prendre en considération, le juste prix est difficile à trouver.

Que ce soit pour vendre sa clinique vétérinaire ou se faire une idée de son patrimoine, le calcul du prix de vente est une opération délicate à effectuer. Entre les éléments purement comptables et les données plus subjectives, le juste prix est difficile à trouver. Même si les conseils sont de plus en plus efficaces pour épauler les vétérinaires dans ce type d’opération, mieux vaut se faire par soi-même une première idée du prix auquel on peut raisonnablement espérer trouver un repreneur. Mais les méthodes de calcul divergent encore. De fait, opter pour deux simulations différentes permet de trouver plus facilement le juste prix. Pour céder son affaire, il convient enfin de prendre un peu de recul et de temps, car le résultat donné par la calculatrice est rarement celui qui figure sur le chèque. La vente étant aussi une affaire de négociation !

Les méthodes d’évaluation

« Deux écoles s’affrontent pour évaluer la valeur d’une clinique vétérinaire. La première s’appuie uniquement sur le chiffre d’affaires, alors que la seconde prend en compte d’autres éléments, qui permettent ainsi d’aboutir à une évaluation plus fiable », commente Dominique Favre, directeur de la communication opérationnelle d’Interfimo, société spécialiste du financement des professionnels libéraux (créée par les syndicats et les institutions des professions libérales, aujourd’hui filiale de LCL).

1 - La valeur dite patrimoniale (ou valeur des actifs)

Cette méthode d’évaluation vise à valoriser les actifs immobilisés en s’appuyant sur les données du marché. « Il s’agit de partir du chiffre d’affaires et de lui appliquer un coefficient », résume Dominique Favre. Le problème réside dans la difficulté à bien appréhender ce coefficient qui, pour les vétérinaires, varie entre 20 % et 80 %. « Il est de fait très difficile pour l’acheteur, comme pour le vendeur, de savoir où mettre la barre », tranche le directeur de la communication. Sauf peut-être à devenir un observateur hyper attentif du marché des prix de cession des cliniques, appliquer le “bon taux” est en effet très compliqué, tant les éléments qui influent sur la valeur d’une structure vétérinaire comme de bien d’autres est dépendante de nombreux facteurs.

2 - La valeur de rendement

« Avec cette méthode, le postulat est que la clinique vaut ce qu’elle rapporte », explique Dominique Favre. De fait, la méthode ne prend plus en compte le chiffre d’affaires, mais la rentabilité de la clinique à travers l’excédent brut d’exploitation (EBE). Une méthode simple consiste à appliquer un coefficient aux bénéfices réalisés sur les trois derniers exercices. Ce coefficient varie en général de 3 à 5 suivant les points forts et les points faibles de la clinique. Là encore, le “bon dosage” du coefficient est délicat, comme pour celui du pourcentage choisi pour déterminer la valeur patrimoniale. C’est pourquoi de plus en plus de spécialistes de la transaction et du financement des cliniques vétérinaires appliquent encore une autre méthode : celle de la capacité de remboursement. Pour déterminer cette valeur, il convient de partir des bénéfices non commerciaux (BNC) auxquels sont ajoutés les frais financiers et les amortissements pour déterminer l’EBE, lequel a vocation à assurer le train de vie du vétérinaire et lui permettre de s’acquitter des impôts. « Ce solde représente la capacité de remboursement de l’acquéreur », résume Dominique Favre. Ainsi, il est aisé de calculer une valeur qui permet à l’acquéreur de rembourser l’emprunt qu’il sollicite, tout en conservant un revenu proche de celui auquel il pourrait prétendre en restant salarié. Ce calcul intègre en général le remboursement de l’emprunt couvrant 100 % de la valeur d’achat. En effet, même si l’acquéreur bénéficie d’un apport, on considère que les capitaux propres qu’il investit dans la clinique méritent eux aussi d’être rémunérés, au même titre que ceux prêtés par la banque. Les mauvaises surprises sont ainsi évitées si l’activité s’avère un peu en deçà de celle du vendeur.

Le processus d’évaluation

Quelle que soit la méthode retenue, la valeur de la clinique va ainsi pouvoir être définie, mais pas forcément son prix. « Il faut bien avoir en tête que le prix n’est pas la valeur. Le prix résulte d’une négociation entre l’acheteur et le vendeur », insiste le directeur de la communication opérationnelle d’Interfimo. Au-delà de la négociation, le prix est également défini par la prise en compte d’éléments certes moins tangibles que les données comptables, donc moins faciles à évaluer, mais tout aussi décisifs. Parmi ces éléments, la localisation de la clinique a un poids non négligeable. « Une clinique dotée d’un parking aura toujours plus de valeur qu’une autre située sur un site difficilement accessible », illustre notamment Dominique Favre. Un établissement implanté au cœur d’un quartier dynamique où de nouvelles constructions sont prévues sera également mieux valorisé que celui installé dans une zone en perte de vitesse. La qualité et l’ancienneté des équipements représentent un élément clé de la valorisation d’une clinique. Les compétences de ses collaborateurs, leur ancienneté, tout comme leur rémunération, certaines clauses de leur contrat de travail et le taux de turnover sont aussi à prendre en compte.

La valeur de la clientèle et l’acquisition différée de l’immobilier

De même, la typologie de la clientèle doit être finement analysée avant de proposer un prix. Elle s’apprécie en réalisant une analyse de sa diversité, de son ancienneté, de sa fidélité ainsi que de sa localisation. Sans oublier son potentiel. Une clinique qui compte une majorité de clients seniors aura moins de valeur que celle ayant une clientèle jeune. Enfin, il est indispensable de tenir compte de la concurrence présente aux alentours et de l’intuitu personae, de la relation de confiance qui se tisse avec son vétérinaire, qui ne sera pas forcément aussi forte avec le nouveau, au point que certains clients pourront quitter la clinique.

Dernier élément à prendre en compte : l’immobilier. « Souvent, le vendeur souhaite conserver les murs de la clinique. Il prend alors le risque de voir le prix de vente moins élevé que s’il avait choisi de céder aussi les murs », estime Dominique Favre. Sauf si le vendeur ne dispose pas de liquidités ou d’une capacité d’emprunt suffisante pour lui permettre d’acquérir la clinique et les murs. Dans ce cas, mieux vaut privilégier une acquisition différée de l’immobilier. « Il faut alors prévoir une clause dans le contrat de vente stipulant que le vendeur s’engage à acquérir les murs dans un délai défini », conseille-t-il. Avec tous ces éléments, il est possible d’évaluer de façon relativement précise la valeur d’une clientèle. Mais puisque certains éléments sont subjectifs, il est préférable de s’entourer de compétences “neutres” pour parvenir à un résultat le plus objectif possible.

L’INCIDENCE DE LA FISCALITÉ

Lorsqu’il s’agit de céder sa clientèle, sa valeur est aussi liée à la fiscalité qui va s’appliquer lors de la vente et, de fait, lors de l’achat pour l’acquéreur. Suivant la modalité d’exercice que ce dernier choisira, s’il s’agit d’une cession de parts ou d’une vente totale de la structure, la fiscalité va avoir un impact sur les négociations et donc sur le prix. Il est essentiel d’en tenir compte et de formuler plusieurs hypothèses pour être en mesure de négocier efficacement l’opération.
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