Prescription : des mauvaises pratiques sanctionnées - La Semaine Vétérinaire n° 1746 du 06/01/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1746 du 06/01/2018

JUSTICE ORDINALE

ACTU

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO-MORADEL  

Lorsqu’il y a non-respect des règles sur la prescription hors examen clinique et du principe de la cascade, la Chambre nationale de discipline ne transige pas.

La Chambre nationale de discipline a été saisie, en juin dernier, d’une affaire sans doute peu banale. Sur la balance, deux griefs qui intéressent particulièrement les praticiens. À la place des accusés, le docteur vétérinaire X poursuivi pour non-respect des règles de la prescription hors examen clinique et du principe dit de la cascade. En guise de piqûre de rappel, une peine de suspension d’exercice vétérinaire sur tout le territoire national et un retour sur les conditions dans lesquelles les pratiques susvisées doivent être effectuées.

Absence de suivi sanitaire permanent

L’affaire débute en chambre régionale de discipline par une relaxe, puis se poursuit en appel devant la Chambre nationale de discipline, qui prononce une sanction à l’encontre du Dr X. Dans sa décision, publiée un mois après l’audition, la juridiction disciplinaire rappelle notamment qu’une prescription hors examen clinique passe par un suivi sanitaire de qualité, mais surtout par l’établissement d’un protocole de soin (tel que le stipule le décret du 24 avril 2007). Les faits connus de la Chambre témoignent « d’une absence d’intervention de la clinique vétérinaire à l’élevage de M me C, [qu’]aucun bilan sanitaire et aucun protocole de soin n’a été formalisé (...), que le diagnostic de gale de boue posé (...) n’a fait l’objet d’aucun compte rendu ni d’aucune ordonnance mais d’un conseil verbal ». Pour la Chambre, ces éléments ne laissent pas de place au doute, le Dr X n’avait pas instauré de suivi sanitaire permanent et, de ce fait, ne pouvait prescrire de médicaments vétérinaires sans établir un diagnostic.

L’existence de mauvaises pratiques

Les conclusions de la Chambre nationale sont identiques en ce qui concerne la délivrance d’un médicament hors autorisation de mise sur le marché (AMM). C’est également l’occasion de rappeler les règles du principe dit de la cascade contenues dans l’article L.5143-5 du Code de la santé publique. En ce cas, l’utilisation hors AMM visait un antibiotique (le Cortexiline®) qui ne bénéficie d’aucune autorisation pour l’espèce équine. Ce médicament a été prescrit et délivré par le Dr X à la suite de l’échec d’un premier soin (constaté avec des photos de l’animal). Le vétérinaire justifie son choix par son expérience de praticien et l’efficacité dont le traitement a fait preuve. La Chambre se veut d’autant plus ferme que « l’usage d’un médicament contenant des antibiotiques en une période de lutte nationale contre l’antibiorésistance (...) révèle l’existence de mauvaises pratiques ». C’est notamment en s’appuyant sur ces motivations qu’elle décide de prononcer à l’encontre du vétérinaire la peine de la suspension de l’exercice vétérinaire pendant la durée d’un mois, dont 15 jours avec sursis.

Des factures douteuses

Tout a commencé lorsque Mme A a confié sa jument du 14 août 2014 au 9 février 2015 à un haras dont Mme C est la gérante. Le Dr X est chargé du suivi sanitaire permanent. Mme A s’étonne de recevoir, en janvier 2015, des factures révélant que sa jument et son poulain avaient connu des problèmes de santé. Elle soutient, face au Dr X, « que des médicaments et des examens complémentaires avaient été prescrits sans examen clinique des animaux et que M me C se serait rendue dans la clinique pour obtenir des traitements médicamenteux ». Selon Mme A, cette allégation n’aurait pas été démentie par le vétérinaire. De son côté, le Dr X prétend être intervenu de façon régulière dans le haras et lors de trois visites réalisées dans le même mois. C’est à cette période que l’état de santé de la jument lui aurait été signalé. Mme A ajoute que les ordonnances qui lui avaient été adressées ne concernaient pas son cheval, mais plutôt l’élevage de Mme C. De même, elle indique que les factures ne correspondaient pas à ces ordonnances.

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