La protection juridique : une couverture méconnue - La Semaine Vétérinaire n° 1744 du 14/12/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1744 du 14/12/2017

ASSURANCE

ÉCO GESTION

Auteur(s) : SERGE TROUILLET  

La protection juridique est cette modeste assurance complémentaire que l’on souscrit par acquit de conscience, sûr de ne jamais avoir à l’actionner. Elle mérite pourtant d’être mieux connue. Le point avec Arnaud de Lavaur, avocat aux barreaux de Paris et de Bruxelles.

La protection juridique est proposée par divers organismes. Généralement intégrées à un autre contrat, ses primes sont modestes. La plupart du temps, même s’il ignore ce qu’elle couvre exactement, l’assuré ne la refuse pas. Il ne veut pas prendre de risques sur un terrain qui n’est pas le sien. Il peut ainsi en avoir souscrit plusieurs, sans même y avoir prêté attention. Dans son esprit, elle n’est rien moins que performative : il lui suffit d’en être pourvu pour se sentir protégé envers et contre tout.

Il sera toutefois bien avisé de prendre quelques précautions. Mieux vaut en effet la choisir associée à la responsabilité civile professionnelle (RCP) auprès d’un assureur spécialisé dans son domaine d’activité : il s’assurera ainsi qu’en plus de couvrir ses activités personnelles, elle répondra au mieux aux problématiques liées à son activité professionnelle propre.

Une couverture variant du simple au quadruple

Quand le vétérinaire contracte avec un assureur, la proposition de protection juridique lui apparaît donc le plus souvent comme un supplément. Et il lui vient rarement à l’idée d’en étudier le détail des conditions générales de vente ! Il n’a pas connaissance, en conséquence, du barème de prise en charge des frais de procédure. Or la couverture peut varier du simple au quadruple. Aussi lui est-il conseillé de s’informer sur les forfaits et les plafonds de cette prise en charge pour les procédures qui le concernent au premier chef. Ce sont le plus souvent des procédures devant les tribunaux de grande instance, devant le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires, devant les prud’hommes. Il saura quels sont les types de situations pouvant faire l’objet d’une couverture et à quelle hauteur.

Quelles qu’en soient les différences – et elles peuvent être notables –, cela ne se traduira que par une variation à la marge du montant annuel de l’assurance. De ce fait, il n’est jamais trop tard pour se faire adresser par son assureur ce barème listant un certain nombre de catégories de procédures, assorties d’un plafond de prise en charge, lequel peut être décliné en mode professionnel ou personnel, généralement moins élevé dans ce cas. Cette méconnaissance de la prise en charge de la protection juridique conduit soit à surestimer l’assiette de sa couverture, soit à ne pas l’actionner lorsqu’il y aurait lieu de le faire.

La prise en charge des frais de procédure

La protection juridique, dont la prime annuelle varie entre 80 et 150 €, concerne aussi bien la procédure engagée contre le vétérinaire que celle dont il prend lui-même l’initiative. Dès que l’assureur est appelé, il ouvre un dossier de sinistre. Les seules raisons qui justifieraient un refus de le faire ne peuvent être commandées que par l’absence de couverture au moment même du sinistre, ou de paiement de la prime. L’assureur indique alors les barèmes de prise en charge des procédures, avec ce qu’ils englobent (honoraires d’avocat, frais d’huissier, d’expertise judiciaire, etc.), son seuil d’intervention se situant néanmoins aux alentours de 400 €.

L’assureur n’a pas de contrôle de l’opportunité de la procédure ; il n’a pas la direction du procès. Il peut néanmoins proposer un avocat référencé si l’assuré le souhaite. Mais celui-ci n’y est pas tenu. Il peut choisir l’avocat de son choix. La seule limite est la prise en charge par l’assureur des frais de procédure, dont les honoraires de l’avocat, à hauteur maximale du montant indiqué dans le barème. Le seul lien entre l’assureur et l’avocat sera alors d’ordre financier, avec la prise en charge, par le premier, de tout ou partie des honoraires du second.

Une couverture souvent ignorée

Si un client, un propriétaire d’animal, décide d’engager une procédure contre le vétérinaire, celui-ci doit actionner son assurance responsabilité civile professionnelle. Dans ce cas de figure, l’assureur prend le relais lui-même. Le vétérinaire ne s’occupe plus de rien. La protection juridique n’est actionnée en général que lorsque l’assuré est à l’initiative de celle-ci. Pour un problème avec son associé, avec un salarié, avec le propriétaire de son local professionnel, avec un client, etc.

La prise en charge ne concerne pas uniquement les procédures devant les tribunaux. On s’oriente de plus en plus vers d’autres moyens de régler les conflits, par la médiation, la conciliation, l’arbitrage, souvent pris en charge également par la protection juridique. Afin de limiter les frais de procédure et de gagner du temps, la recherche d’une solution amiable en amont est privilégiée par les assureurs, qui proposent une hot-line, des permanences animées par des juristes spécialisés. De manière générale, les plafonds des barèmes proposés ont vocation à couvrir une grande partie des frais exposés dans les procédures engagées.

Un système vertueux limitant les coûts

Quand on arrive à la fin de la procédure et que l’on obtient gain de cause, les sommes revenant à l’assuré pour les frais de procédure, en l’occurrence les frais de condamnation de la partie adverse pour couvrir ceux d’avocat et de procédure (selon l’article 700 du Code de procédure civile), sont versées en priorité à l’assuré jusqu’à son désintéressement, si les frais de procédure ont été supérieurs à ceux couverts par la protection juridique, le solde allant à l’assureur. En revanche, si l’assuré perd et qu’il est condamné à payer des frais de procédure, ces derniers ne sont pas couverts par l’assureur. Celui-ci couvre tout ou partie des honoraires d’avocat, mais pas de celui de la partie adverse…

Par ailleurs, l’activation de la protection juridique n’induit pas une augmentation du montant des primes, lequel est décorrélé des montants en jeu lors des procédures dans lesquelles il se trouve engagé. C’est un système assez vertueux, qui permet d’aborder les éventuelles difficultés personnelles ou professionnelles en s’assurant d’être aidé par des professionnels spécialisés et en limitant significativement le coût pour l’assuré.

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