Hypertypes : propositions pour une stratégie d’éviction - La Semaine Vétérinaire n° 1744 du 14/12/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1744 du 14/12/2017

ÉTHIQUE

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : ALEXANDRE BALZER  

Alors que la profession s’empare de la problématique des conformations extrêmes à un niveau international 1, la Société centrale canine (SCC) cherche à restreindre les difficultés liées à l’interprétation des standards et veut limiter des récompenses contestables lors d’expositions canines. Des axes de lutte sont proposés.

Un hypertype2 est l’exagération d’une ou de plusieurs caractéristiques contenues dans le standard ou parfois même une complète déviation par rapport à celui-ci. Cette déviance est grave, car elle nuit au bien-être et à la santé de l’animal. Il est donc primordial de combattre ces hypertypes, qui sont une source d’inconfort du chien et d’affections diverses parfois graves. La notion d’hypertype n’est pas forcément subjective. En effet, dans le cas du basset hound, le standard de la race indique que la peau doit être « lâche et élastique sans exagération. Il est essentiel de garder à l’esprit qu’il s’agit d’un chien de travail qui doit être apte à accomplir sa fonction et qui doit, en conséquence, être puissant, actif et avoir une grande endurance ». Chez le bull mastiff, le standard précise que « le crâne est fort et carré, il est bien ridé quand le chien est attentif, mais il ne l’est pas au repos ». Enfin, on peut lire pour le chow-chow : « Les yeux sont foncés, ovales, de grandeur moyenne et nets. L’œil doit être exempt d’entropion… »

Quelles conséquences ?

Pour les chiens hypertypés, les exagérations ont été privilégiées, au point parfois de nuire à sa santé, à son bien-être et à ses capacités à remplir les fonctions pour lesquelles il a été sélectionné. Le berger allemand, par exemple, a souffert d’une angulation trop importante il y a quelques années. Pourtant, le standard disait bien : « Les postérieurs sont légèrement inclinés vers l’arrière, tout en restant, vus de l’arrière, parallèles entre eux. Les jarrets sont fermes et robustes, le métatarse, sous le jarret, est perpendiculaire au sol ».

« Dans la rédaction des standards, il n’apparaît jamais d’exagération, souligne Anne-Marie Class, secrétaire générale de la Société centrale canine (SCC) et juge de la SCC, à l’occasion de la journée de la recherche canine qui s’est tenue en avril 2017 à Paris. Il n’est jamais décrit d’hypertype. On peut noter qu’en exposition, l’hypertype devrait être aussi mal considéré qu’un manque de type. En effet, lorsqu’un chien n’est pas typé, il lui est attribué le qualificatif de très bon. Cela devrait être de même pour les chiens hypertypés. Il faut bien constater que ce n’est pas toujours le cas. Les hypertypes sont régulièrement mis en valeur, en exposition parfois, mais bien souvent dans les médias, les publicités et les réseaux sociaux. »

Qui sont les responsables ?

Bien entendu, les chiens ne sont en rien responsables, soulignent Anne-Marie Class et notre confrère Gilles Chaudieu. Ces hypertypes n’auraient pas été sélectionnés par la nature. Ils sont donc les victimes des humains. Les propriétaires ont, bien entendu, une part de responsabilités. En effet, si certains d’entre eux souhaitent avant tout un chien en bonne santé et équilibré, d’autres sont plus à la recherche du phénomène, qui pourra impressionner par son poids hors norme, sa taille gigantesque ou sa conformation exagérée. Les réseaux sociaux contribuent, par ailleurs, à alimenter la demande envers ces monstres, bien souvent mis en avant dans les forums. Les médias sont aussi en partie responsables. En effet, la mise en avant de chiens hypertypés, en particulier dans les publicités, augmente la demande pour ces races et ces hypertypes. Actuellement, le chien le plus à la mode dans la publicité est le basset hound. Les éleveurs sont également partie prenante. Sous la pression de la demande et de la mode, ils sont poussés à produire ce type de chiens, qui sont vendeurs. Les vétérinaires doivent aussi être attentifs à la détection des chiens pathologiques, et à bien prévenir les propriétaires des risques de transmission de ces tares.

Enfin, les juges d’exposition de la SCC ont leur part de responsabilité, car leur rôle est essentiel dans la lutte contre les hypertypes. Ils doivent être le rempart contre ces excès, en faisant attention de ne pas mettre sur le podium de tels chiens. En effet, les expositions peuvent conduire à la production de ces exagérations si on n’y prête pas attention. Mais ces animaux ne correspondent pas aux standards. Le chien de race peut être en danger face à ces hypertypes, si les chiens qui en ont développés continuent à gagner les expositions, si les standards ne sont pas respectés, si l’utilisation pour laquelle a été sélectionnée la race considérée est occultée ou s’il existe un manque de courage pour pénaliser les hypertypes. Une vigilance de tous les acteurs s’impose, préviennent les conférenciers.

1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1739 du 10/11/2017, page 27.

2 Article rédigé d’après les conférences d’Anne-Marie Class, secrétaire générale et juge de la SCC, et de Gilles Chaudieu, spécialiste en ophtalmologie vétérinaire, membre de la commission scientifique de la SCC, présentées lors de la journée de la recherche canine de la SCC, le 21 avril 2017, à Paris.

LES AXES DE LUTTE PROPOSÉS PAR LA SCC

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