Les conflits de propriété… d’un animal de compagnie - La Semaine Vétérinaire n° 1742 du 30/11/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1742 du 30/11/2017

DROIT

ÉCO GESTION

Auteur(s) : CÉLINE PECCAVY  

L’argent ne fait pas le bonheur, selon le dicton, mais achète-t-on la propriété ? Qu’en est-il juridiquement, lors d’un litige relatif à la propriété d’un chien ? Explications.

Réflexion autour de plusieurs décisions où un homme et une femme, qui ont été proches, se disputent la propriété d’un animal. Il y a débat en raison du fait que l’auteur du paiement n’est pas forcément celui dont le nom figure sur l’acte de vente ou sur la carte d’identification de l’animal. Des éléments donc parfaitement contradictoires. Comment s’y retrouver ?

Dans l’un de ces procès, une médiation était intervenue. De l’avis du médiateur, monsieur, qui avait repris possession du chien, devait le restituer car madame, son ex-concubine, avait entièrement financé le chien. Le médiateur ne s’attachait alors qu’au financement du prix de vente, sans prendre en considération les autres éléments du dossier. Le tribunal, au final, ira dans la même direction de propriété, mais pas du tout pour les mêmes raisons, comme nous allons le voir.

Que vaut, dans ce type de dossier, la carte d’identification ? Comme toujours, pas grand-chose. Rappelons que déjà bon nombre de décisions ont reconnu qu’elle ne valait pas titre de propriété. Dans l’affaire où la médiation est intervenue, le relevé I-CAD1 était au nom de monsieur uniquement. Le juge n’en fera pas cas et passera même sous silence cet élément pour rendre son jugement en faveur de madame.

Dans les autres dossiers, le document n’a été utilisé que pour renforcer et conforter l’acte de vente. Ainsi : « Force est de constater que le bon de commande a été établi au nom de M. X et que le chien a été inscrit au nom de M. X sur le fichier I-CAD, ce qui corrobore la propriété du chien par M. X. » Dans l’autre espèce, le vendeur « atteste avoir vendu le cheval à M me X, ce que confirme la carte d’immatriculation faisant apparaître cette dernière en qualité de propriétaire ».

C’est donc l’acte de vente qui va être déterminant juridiquement et non la carte d’identification qui, au mieux, viendra seulement ensuite affermir une propriété déjà existante.

Quid, par ailleurs, du financement ? Est-il synonyme de propriété ? Pour répondre à cette question, il convient déjà de chercher à savoir si les deux protagonistes formaient ou non un couple. Les règles du concubinage entraînent en effet des conséquences bien particulières.

Dans une affaire récente, un juge aux affaires familiales vient rappeler qu’ « il est admis que toutes les fois où un concubin a procédé seul à une acquisition, il doit être réputé propriétaire exclusif, sans considération de l’origine des deniers utilisés. Il en résulte qu’en présence d’un titre, les concubins ne devront être considérés comme propriétaires indivis que si le titre est expressément rédigé en ce sens, l’origine des deniers étant sans incidence sur cette qualité, sachant qu’il y sera néanmoins référé pour établir les comptes entre les parties ».

Voilà qui est posé. Si l’acte de vente contient le nom des deux concubins, peu importe qui a payé. La propriété n’est absolument pas liée à ce paiement. Celle-ci est indivise avec toutes les suites légales que cela comporte. Et elles ne sont pas moindres.

On pourrait penser que l’animal étant désormais considéré comme un être vivant doué de sensibilité, on n’en viendrait pas à des méthodes “barbares”. Eh bien si ! Dans ce même jugement, le magistrat met noir sur blanc que l’animal étant en indivision, il y aurait lieu de procéder pour sa propriété à un tirage au sort. Incroyable, mais malheureusement réel.

Le tirage au sort n’a finalement pas eu lieu et, prenant en considération le fait que madame avait payé intégralement le prix de vente et qu’en outre elle avait, à la séparation du couple, gardé dans un premier temps le chien, le juge lui a octroyé la pleine propriété, sans soulte à verser.

Une autre affaire, survenue en dehors du concubinage, avait précédemment été développée dans cette rubrique2 : le cas du cheval payé et offert par un homme à l’une de ses amies. Le paiement de monsieur avait été considéré comme une donation et le payeur n’avait pas été reconnu comme propriétaire. En conclusion, l’argent ne peut pas toujours acheter la propriété.

1 Identification des carnivores domestiques.

2 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1730 du 8/9/2017, page 51.

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