Les soins à la faune sauvage non captive - La Semaine Vétérinaire n° 1735 du 14/10/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1735 du 14/10/2017

DÉCRYPTAGE

Auteur(s) : OLIVIER LAMBERT ET PHILIPPE GOURLAY 

Le vétérinaire peut être sollicité par des clients après qu’ils ont découvert un animal sauvage. Si cette démarche semble intuitive, le praticien se retrouve confronté à la réglementation entourant le recueil de ces espèces.

L’extension des villes et villages, la démocratisation de la randonnée, des loisirs naturalistes, l’ouverture et l’accessibilité des espaces naturels aux promeneurs font que l’homme et la faune sauvage se côtoient de plus en plus fréquemment. D’une part, ces activités anthropiques impactent largement la faune sauvage, mais d’autre part, les animaux blessés, malades et les jeunes orphelins ne restent alors jamais longtemps sans être découverts. Chaque année, plusieurs milliers d’animaux sauvages sont ainsi ramassés. Nourrir et soigner un animal sauvage ne s’improvise pourtant pas, et trouver une personne compétente dans ce domaine devient vite la préoccupation du découvreur. Celui-ci se tourne alors généralement vers le professionnel de la santé animale qu’est le vétérinaire. Si cette démarche semble intuitive, ce dernier se retrouve à son tour confronté à plusieurs questions qui vont conditionner la prise en charge de l’animal sauvage : quels sont ses rôles, droits, devoirs et possibilités de soins en matière d’accueil de la faune sauvage autochtone non captive ?

Rappel réglementaire sur la faune sauvage autochtone non captive

En France, la faune sauvage est principalement classée en trois catégories : les espèces « protégées » (arrêtés L.411-1 à L.412-1 et R.411-1 à R.412-7 du Code de l’environnement), les espèces « gibiers » (arrêté du 26 juin 1987) et les espèces susceptibles d’être classées « nuisibles » (décret n° 2012-402 du 23 mars 2012). De manière générale, la capture, le transport et la détention d’animaux sauvages, qu’ils soient vivants ou morts, sont interdits ou alors strictement réglementés. Néanmoins, une dérogation est accordée aux particuliers ou aux services de secours (pompiers, par exemple) qui ramassent un animal sauvage blessé. L’instruction PN/S2 n° 93-3 du 14 mai 1993 précise qu’en cas d’urgence (lorsque la survie de l’animal ou sa capacité à être réinséré dans la nature est manifestement menacée) et en l’absence de meilleure solution, le transport sans formalité est admis s’il est effectué dans les plus brefs délais et par le chemin le plus court vers une structure de soins : centre de réhabilitation de la faune sauvage (CRFS) ou vétérinaire.

Le vétérinaire a-t-il le droit de recevoir et de soigner un animal sauvage, mais aussi de le refuser ?

Selon le Code rural et de la pêche maritime et le Code de déontologie vétérinaire (article R.242-48), le vétérinaire a des devoirs fondamentaux relatifs à l’obligation de soins et de lutte contre la souffrance animale. Ainsi, il doit répondre à tout appel qui lui est adressé pour apporter des soins d’urgence à un animal vivant, quelle que soit l’espèce, dans les limites de ses compétences. S’il ne peut répondre à cette demande, il est tenu d’indiquer au découvreur des alternatives pour que l’animal soit pris en charge (nom d’un confrère compétent, coordonnées d’un CRFS).

En dehors des cas d’urgence (maintien de l’animal en vie et stabilisation dans l’attente d’une éventuelle intervention plus poussée), il peut soit refuser de prodiguer des soins à un animal lorsqu’il estime qu’il ne peut apporter des soins qualifiés, soit pratiquer tous les actes vétérinaires nécessaires s’il se juge compétent.

Quels soins le vétérinaire peut-il prodiguer et peut-il assurer lui-même l’hospitalisation, l’euthanasie ou le relâcher d’un animal sauvage blessé ?

Lorsque le vétérinaire accepte un animal sauvage blessé, il s’engage à s’assurer de la continuité des soins apportés. A minima, il doit pratiquer les soins conservatoires pour maintenir l’animal en vie dans

l’attente de la prise en charge par une

structure spécialisée et pour qu'il soit en mesure de supporter le transport vers

celle-ci. Il peut aussi effectuer tous les soins (examens complémentaires, interventions chirurgicales, etc.) qu’il estime nécessaires pour l’animal.

Cette période d’hospitalisation peut durer de quelques heures à quelques jours si besoin. En revanche, en dehors de cette étape de stabilisation médicale et de soins médicaux, le vétérinaire n’a pas le droit de garder l’animal pour la convalescence, de réaliser lui-même la rééducation, ni de pratiquer son relâcher. Si le praticien juge que l’état de l’animal ne permet pas d’envisager sa survie (et a fortiori son relâcher en milieu naturel), il a le devoir d’euthanasier l’animal.

Quelques consignes simples à appliquer avec un animal sauvage

Lors de la stabilisation médicale, l’animal est hospitalisé dans des conditions de détention, d’hygiène et de sécurité classiques. Il convient toutefois de prendre quelques précautions. S’agissant de faune sauvage non captive, toute manipulation et toute détention seront source d’un stress important (qui s’ajoute au traumatisme et au stress de la capture et du transport), qui peut être fatal à l’animal. Il doit donc être placé dans une zone calme (sonore et visuelle), à l’écart des animaux domestiques hospitalisés (également pour des raisons sanitaires), et les manipulations, uniquement de soins, sont limitées au strict minimum. De manière générale, les oiseaux sont maintenus en carton aéré de trous et les petits mammifères en boîte de transport type Vari Kennel®. Avant tout nourrissage, le vétérinaire devra avoir réchauffé et réhydraté l’animal, puis s’être assuré du régime alimentaire de l’espèce auprès de spécialistes.

À qui le vétérinaire facture-t-il les soins ?

En droit français, un animal sauvage non captif a le statut de res nullius, ce qui signifie qu’il n’est la propriété de personne. Il a une valeur patrimoniale, mais ni valeur affective ou économique. Dans ces conditions, les soins aux animaux sauvages sont gratuits : le vétérinaire ne peut donc pas demander à être payé, mais peut l’accepter si le découvreur souhaite le faire. Le recours rapide à un CRFS s’impose donc généralement.

Le vétérinaire doit-il déclarer l’animal ?

Le vétérinaire n’est pas tenu réglementairement de déclarer l’animal. Il contactera tout de même le CRFS le plus proche pour l’avertir de l’arrivée prochaine d’un nouveau pensionnaire et pour s’informer des consignes de soins animaliers spécifiques à prodiguer à l’animal reçu (mode de détention, nourriture, biologie de l’espèce, etc.). Cet échange sera par ailleurs essentiel pour trouver une solution de rapatriement de l’animal de la clinique ou du cabinet vétérinaire vers le centre, ce rapatriement étant le plus souvent réalisé par des bénévoles ou un réseau de transport affilié à ce CRFS. Pour rappel, les CRFS fonctionnent sous couvert de différentes autorisations (d’ouverture, de transport, certificat de capacité, etc.) et ont pour objectif de dispenser des soins à la faune sauvage en détresse en vue de sa réinsertion dans le milieu naturel : ce ne sont ni des refuges pour animaux exotiques, handicapés ou non relâchables, ni des animaleries, ni des établissements de présentation au public (visites interdites).

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